Kétamine

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Kétamine
Nomenclature IUPAC
2-(2-chlorophenyl)-2-methylamino-cyclohexan-1-one
Apparence
Poudre cristalline • Solution limpide
Identifiants
Numéro CAS 6740-88-1
Code ATC N01AX03
N01AX14
PubChem 3821
Données chimiques
Formule brute C13H16ClNO
Masse molaire 237.725 g/mol
pKa 7,5
Classe thérapeutique
Analgésique • Anesthésique général
Données pharmacocinétiques
Biodisponibilité Orale : ~17 %
IM : ~93 %
Métabolisme Hépatique
Demi-vie d'élim. 2,5 à 3 h
Excrétion Urinaire (90 %)
Considérations thérapeutiques
Voie d'administration Orale, IV, IM
Conduite automobile Dangereuse
Caractère psychotrope
Catégorie Hallucinogène
Mode de consommation Inhalation, injection
Autres dénominations Kéta, Ket, K, Spécial K, Spé, Poudre d'ange, Ketty, Kit kat, Vitamine K (à ne pas confondre avec la Vitamine K)
Unités du SI et en CNTP, sauf indication contraire

Le chlorhydrate de kétamine est une molécule utilisée comme anesthésique général en médecine humaine et en médecine vétérinaire.

D'un point de vue pharmacologique elle est très proche du dextrométhorphane et de la phencyclidine.

La kétamine est aussi utilisée de manière détournée.

Sommaire

[modifier] Historique

Elle a été synthétisée pour la première fois par Calvin Stevens en 1962 pour les laboratoires Parkes Davis[1].

Elle est introduite en médecine vétérinaire dès 1965[1].

À partir de 1965, elle est utilisée pour les anesthésies brèves. Le professeur Edward Domino la décrit alors comme anesthésiant dissociatif[2].

Elle fut utilisée pour la première fois par les soldats américains durant la guerre du Viêt Nam, mais on en évita rapidement l'emploi en raison de ses effets secondaires : elle provoque des sensations proches d'une expérience de mort imminente.

[modifier] Chimie

Elle fait partie de la famille des cycloalkylarylamines.

Dans sa forme hydrochloride, elle se présente comme une poudre cristalline soluble dans l'eau et l'alcool.

[modifier] Pharmacologie

La kétamine influe moins sur les fonctions respiratoires et cardiaques que d'autres molécules. Lorsqu'elle est utilisée à des doses anesthésiques, elle peut même avoir tendance à stimuler le système circulatoire plutôt que de le ralentir[3]. Il est quelquefois possible de pratiquer une anesthésie à la kétamine sans prendre de mesure de protection pour les voies respiratoires.

La kétamine est aussi un analgésique puissant et peut être utilisé en doses infra-anesthésiques pour soulager des douleurs aiguës ; toutefois, ses propriétés psychotropes doivent alors être prises en considération.

D'un point de vue psychopharmacologique, il s'agit d'un inhibiteur de glutamate non compétitif au niveau des récepteurs de NMDA. Cet effet est observé principalement au niveau de l'hippocampe et du cortex préfrontal, ce qui explique ses effets importants sur la mémoire et la conscience.

[modifier] Usage thérapeutique

[modifier] Indications

Elle reste parfois utilisée en médecine humaine pour des patients dont on ne connaît pas les antécédents médicaux (comme les victimes d'accidents de la route). Dans ces conditions, c'est alors le premier produit que l'on tente d'employer, pour son efficacité et son innocuité.

Elle reste aussi utilisée en pédiatrie, pour de petites opérations chirurgicales et accessoirement pour le traitement de la migraine.

En médecine vétérinaire, elle est utilisée aussi bien pour de grands animaux, comme les chevaux, que pour des opérations chirurgicales sur de plus petits animaux, notamment pour anesthésier chiens, chats, lapins, furets, rats.

Des recherches sont actuellement menées sur son utilité pour traiter la douleur, l'alcoolisme et la dépendance à l'héroïne.
Notamment en Russie où les expériences négatives vécues sous kétamine créent des états aversifs envers l'alcool.[2]

[modifier] Effets secondaires

Les patients traités à la kétamine rapportent des expériences d'états altérés de conscience, alors qu'ils étaient sous anesthésie. De tels effets secondaires psychotropes ont rendu son usage moins fréquent.

En tant qu'anesthésiant, elle pose d'autres problèmes comme l'absence de profondeur de l'anesthésie et des effets secondaires comme des migraines, des nausées, des vomissements, une confusion ou une sensation d'irréalité sont décrits.[2]

[modifier] Usage détourné et récréatif

La kétamine vendue illégalement provient de sources légitimes détournées, telles que les cliniques vétérinaires mais elle est aussi synthétisée dans des laboratoires clandestins[1]. Elle se présente soit sous la forme d'une poudre cristalline, soluble dans l'eau ou dans l'alcool soit sous forme liquide[4].

De nombreux usagers de drogues ont souvent un premier contact involontaire avec la kétamine lorsqu'une dose leur est vendue comme une autre drogue .

Le mode d'usage le plus répandu est le « sniff »[2].

[modifier] Effets et conséquences

Kétamine
Noms commerciaux :
  • Ketalar® (Belgique + Suisse)
    Belgique :
    • Réservé à l'usage hospitalier
    • Produit spécialement règlementé assimilé aux stupéfiants

  • Kétamine Panpharma (France)
    Réservé à l'usage hospitalier

  • Imalgène®, Kétamine Virbac (France)
    Usage vétérinaire
Classe :
Anesthésique général
Autres informations :
Sous classe : Anesthésique dissociatif

L'effet immédiat d'une prise est un fort sentiment d'apaisement dû à l'effet anesthésique qui dure 10 à 40 minutes. Il est suivi d'une phase hallucinatoire qui affecte les sens, le jugement et la coordination motrice pendant 4 à 6 heures[4].

À fortes doses, elle provoque des altérations de la respiration[3] et peut aussi induire une perte de connaissance voire un coma[4].

Lors de la phase hallucinatoire, la kétamine peut provoquer un état dissocié : soit l'usager perd la sensation de lui-même (sensation de se « détacher de son corps ») soit la notion de réalité. Certains relatent des expériences de decorporation ou de NDE[1].

Comme d'autres anesthésiques dissociants utilisés à des doses faibles à moyennement fortes, ses effets hallucinogènes ne se font sentir que dans l'obscurité ou dans des conditions de privation sensorielle.

[modifier] Interactions

L'utilisation combinée de kétamine avec d'autres produits peut être dangereuse. L'alcool notamment, augmente les risques de dépression respiratoire.

[modifier] Effets à court terme

L'impression de dissociation entre le corps et l'esprit laisse l'usager sans défense, doublée de l'effet analgésique ainsi un usager de kétamine peut se blesser sans en prendre conscience.

En cas de nausées ou de vomissements, un risque d'étouffement par invasion pulmonaire des vomissements est possible du fait de l'incoordination motrice qu'entraîne le produit.

Elle peut aussi provoquer des anomalies du rythme cardiaque allant parfois jusqu'à l'arrêt, risques aggravés si l'usager présente des antécédants ou effectue un mélange avec des substances aggravantes.

La « descente » - fin des effets - est subite et brusque[2].

[modifier] Effets à long terme

Elle peut affecter la mémoire à court terme et à long terme. Elle peut entraîner chez le consommateur régulier des troubles psychologiques du type paranoïa et égocentrisme.

Elle peut provoquer une dépendance psychique.

Il existe un effet retour ou flash back qui replace brièvement l'usager dans l'état généré par la consommation de kétamine sans en consommer, et ce plusieurs mois après la dernière prise[1].

[modifier] K-hole

Certains usagers décrivent des expériences de mort imminente et des expériences dite « K-hole » qui sont à rapprocher du bad trip[2].

Le K-hole est une sorte de trou noir avec troubles cognitifs et amnésiques, troubles de l'humeur et du comportement, délires hallucinatoires, cauchemars[2], perte d'identité et du contact à la réalité. Le K-hole est caractérisé par les usagers comme une impression de se retrouver profondément dans son esprit, le monde terrestre semblant distant (d'où l'expression hole, trou en anglais, pour décrire cette sensation).

Une fois les effets passés, il est courant que l'utilisateur ait une amnésie de ce qu'il a ressenti. Le retour à la réalité est un processus lent et progressif. L'amnésie peut affecter des notions plus anciennes de l'utilisateur comme son identité, qu'il est humain ou de ce que cela signifie. Il peut y avoir une dissociation entre le corps et l'esprit, l'utilisateur n'a alors plus conscience de son corps ou bouge difficilement. Cette dissociation est parfois utilisée à des fins thérapeutiques.

Le K-hole peut mener à un syndrome post-hallucinatoire persistant, une impossibilité de retour à un état normal et l'installation définitive des symptômes (amnésie, trouble locomoteur, psychose paranoïde, etc.)

[modifier] Aspect culturel

En 1978, John Lilly publie son livre The scientist. A metaphysical autobiography où il décrit de nombreuses expériences liées à son usage[2].

Dans le film français Avida, de Benoît Delépine et Gustave Kervern, la kétamine est utilisée de manière complètement décalée par deux employés de zoo qui se tirent dessus mutuellement avec des fusils anesthésiants.

Elle est de même utilisée dans l'épisode final de la saison 2 de Dr House. Elle permettra au docteur House de marcher, alors même que cela lui était impossible avant.

Elle a inspiré la chanson "Special K" du groupe anglais Placebo, et la chanson "K-Hole" du groupe Nord-Américain de folk CocoRosie.

Elle est utilisée dans la saison 4 de Nip/Tuck par une femme qui veut ressentir l'impression de se détacher de son corps et qui se met en état d'hypothermie avancée. Le but étant d'être au plus près de la mort.

Elle apparait dans le film "Las Vegas parano" (Fear and Loathing in Las Vegas) avec Johnny Depp.

Dans le premier épisode de "Queer as Folk" (Version américaine), Brian propose à Justin du Spécial K et ce dernier répond qu'il n'a pas faim mais qu'il adore les céréales.

[modifier] Législation

La fréquence d'utilisation de la kétamine en tant que stupéfiant augmente, et elle commence à être prise en compte dans les rapports établis sur des rave parties. La kétamine a été placée sur la Liste III de la loi sur les substances contrôlées aux États-Unis en août 1999. Dans de nombreux pays, la kétamine est considérée comme un stupéfiant, et son utilisation hors d'un cadre médical est répréhensible.

[modifier] Notes et références

  1. abcde Denis Richard, Jean-Louis Senon, Marc Valleur, Dictionnaire des drogues et des dépendances, Larousse, 2004 (ISBN 2-03-505431-1)
  2. abcdefgh Michel Hautefeuille, Dan Véléa, Les drogues de synthèse, Presses Universitaires de France, coll. « Que sais-je ? », 2002 (ISBN 2-13-052059-6)
  3. ab Yasmina Salmandjee, Les drogues, Tout savoir sur leurs effets, leurs risques et la législation, Eyrolles, coll. « Eyrolles Pratique », 2003 (ISBN 2-7081-3532-5)
  4. abc Amine Benyamina, Le cannabis et les autres drogues, Solar, 2005 (ISBN 2-263-03904-X)



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