Insurrection en Irak de 1991

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A partir du 2 mars 1991, commence en Irak une des plus grandes insurrections contemporaines. Le Quid annonce 30 000 morts tandis que le bilan annoncé par la Bibliothèque des émeutes est de 750 000 morts. Si rien ne vient contredire ces nombres, rien non plus ne vient les confirmer. La répression provoque un million (au moins) de réfugiés, en Iran et dans les marais au nord de Bassora.

Sommaire

[modifier] Déroulement

L'insurrection irakienne est issue de la défaite du régime Bassiste durant la guerre du Golfe de 1991. Cette conséquence est remarquable, un État vaincu dans une guerre entre états est immédiatement le théâtre d'une insurrection.

Il est remarquable que, à côté de manifestations contre le régime, le premier geste offensif à Bassora a été d'attaquer les prisons et d'y libérer les détenus. C'est visiblement la liberté qui est le premier objet de la révolte. S'y ajoute, comme semble l'indiquer la haine contre l'Occident, combinée à celle contre Saddam Hussein, l'honneur (l'humiliation de la défaite de l'Irak, mais aussi l'irrespect pour les populations civiles irakiennes). Le mouvement se déroule sous l'empreinte de la nécessité : Bassora, qui en est le berceau, après avoir été bombardée pendant huit ans par les Iraniens lors de la guerre Iran-Irak, a été pilonnée tous les jours, du 17 janvier au 28 février 1991, par l'aviation américaine. L'eau, la nourriture et les médicaments y manquent dès avant le début de l'insurrection, l'air y est presque aussi irrespirable qu'au Koweït voisin, les troupes d'élite de Saddam Hussein, y ayant leur quartier général, y accaparent en priorité tout approvisionnement.

Bassora est le départ et le centre de la révolte. Les premiers insurgés semblent être des jeunes, rapidement rejoints par d'innombrables déserteurs. Il semble qu'aucune ville n'ait été prise plus de quarante-huit heures, à l'exception de Bassora, les 3 et 4 mars. C'est probablement ce qui a propagé le mouvement à tout l'Irak. Le 5, les principales villes kurdes sont insurgées. Le 6, le mouvement semble en extension maximale en nombre de villes insurgées simultanément. Les désertions se multiplient.

Le 5 mars, les villes d'Arbil et de Sulaimaniya, dont les populations sont en grande majorité kurde, se sont insurgées. Le 6, les émeutes ont gagné Kirkouk et Raniyah. Ce soulèvement y commence invariablement le 7 mars, par l'arrivée de la guérilla kurde dans Raniyah, le 8 les rebelles prennent le contrôle du quartier général de la sécurité à Sulaimaniya après 48 heures de combat et exécutent sommairement les prisonniers baassites. Ils contrôlent alors la ville.

Du 7 au 14 se joue la bataille. Il n'y a plus d'informations précises sur les lieux. Il n'y a plus de bilan de victimes après celui de l'opposition irakienne en exil, le 7 : 30 000 morts. Le 7, les guérillas kurdes commencent à reprendre les villes kurdes aux insurgés. Apparemment Nadjaf et Karbala se sont hissées au rang de champs de bataille permanents, à côté de Bassora. Le 13, il paraît y avoir une seconde et décisive défaite de l'insurrection dans Bagdad. Impossible, après ce 12e jour d'insurrection, de connaître quoi que ce soit, sur l'organisation, le ravitaillement, le moral, les idées et les perspectives.

Saddam Hussein, s'avère maintenant dictateur avisé. Sur l'extérieur, il cède aux exigences des vainqueurs, sur l'intérieur il se replie sur Bagdad et compte rapidement ses forces. Il est clair que les rebelles sont quasiment sans défense contre les chars, les hélicoptères et l'artillerie de l'armée irakienne. Ils n'ont que très peu de matériel à leur opposer : quelques RPG et missiles SAM. Très vite il comprend que les guérillas kurdes n'attaqueront pas Bagdad, qu'elles sont incapables de s'emparer de l'Etat irakien, et qu'elles sont même un rempart policier et militaire contre une insurrection dans les villes du Nord. Il leur abandonne le Kurdistan, et lance une offensive, avec toutes ses forces, contre les insurgés du Sud. En même temps, il expulse la presse occidentale, sans doute avec la complicité américaine. Vers le 7 ou 8 mars (cinquième ou sixième jour de l'insurrection), il endigue la contagion ; au plus tard le 10, il sait qu'il a rétabli ses chances ; le 16 mars, lors de son discours télévisé, il sait qu'il a gagné.

A partir de là, les hélicoptères irakiens bombardent massivement. Le 15, un "état-major rebelle shi'ite" s'exprime par l'agence de presse iranienne. C'est la seule fois qu'on entend parler d'une structure organisée issue de l'insurrection. Le 16, Saddam Hussein est suffisamment rassuré pour paraître à la télévision. Le 17. Pour la première fois depuis le 2, les combats ont cessé dans Bassora. Le 18, les guérillas kurdes prennent Kirkouk. L'insurrection kurde s'effondre rapidement : l'armée irakienne reprend Kirkouk le 28, Dahuk et Irbil le 30 mars, Zakho le 1er avril et Suleimaniya le 3 avril.

A Nadjaf et à Karbala, lorsque la ville est reprise, et que la garde républicaine va dans la suivante, elle se soulève à nouveau. Bassora, pacifiée sous les hélicoptères le jour, s'insurge la nuit. Comme les fuyards se battent à nouveau jusque dans Bagdad, où l'information iranienne signale une violente répression le 23. Fin mars, et pendant le mois d'avril, quelques émeutes se poursuivent, de plus en plus faibles. La famine et l'armée irakienne font fuir des Kurdes vers les camps approvisionnés par les occidentaux. Les États-unis ont en effet déclenché l'Operation Provide Comfort pour stopper l'avancée de l'armée irakienne et fournir de l'aide humanitaire aux réfugiés.

[modifier] Interprétations

En elle-même la révolte des villes du Nord n'avait rien de spécifiquement kurde, ni celle des villes du Sud de spécifiquement shi'ite. Comme dans beaucoup de révoltes spontanées, celle-ci a été officiellement prédécoupée selon des récupérateurs préexistants, à savoir l'opposition shi'ite en exil et l'opposition kurde.

Dès le premier jour de la révolte de Bassora, 40 journalistes quittent le Koweït pour l'Irak. Ils furent arrêtés et disparurent. Le 6 mars, l'Irak donne quarante-huit heures à tous les journalistes pour le quitter ; les 40 arrêtés reparaissent, expulsés.

Les États-Unis, sous la pression de leurs alliés musulmans, ont arrêté la guerre avant d'avoir détruit l'armée irakienne, qu'ils ne voulaient qu'affaiblir. Ils ont interdit à l'Irak d'utiliser ses avions après le cessez-le feu mais ont toléré l'usage par l'Irak de ses hélicoptères qui ont été très utiles pour vaincre l'insurrection. Leur attitude, au sud de l'Irak, a été de repousser ceux qui fuyaient la répression, vers la répression. Le gouvernement américain prétendait craindre un démembrement de l'Irak. En mars 1991, les États-Unis ont abattu deux avions irakiens et a permis à tous les autres de bombarder (napalm, phosphore, acide sulfurique) les insurgés. Bien peu d'observateurs se sont interrogés sur le réarmement et le financement en quelques jours d'une armée en déroute, dont certains membres ont rejoint l'insurrection. Le Koweït ferme sa frontière aux réfugiés irakiens, de même que l'Arabie saoudite.

[modifier] Conséquences des soulèvements

En juillet 1991 de graves affrontements éclatent à Erbil et Souleymania. Suite à ces affrontements l'armée irakienne se retire définitivement de ces deux villes difficiles à contrôler. Entre 100 000 et 150 000 soldats irakiens restent néanmoins positionnés le long de la ligne de front de la région kurde. En octobre 1991, Bagdad impose un embargo à la région kurde sur les vivres et l'essence qui durera jusqu'a la chute du régime bassiste lors de l'opération Libération de l'Irak.

[modifier] Réferences