Indice de coïncidence

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L'indice de coïncidence est une technique de cryptanalyse inventée par William F. Friedman en 1920 et publiée dans The Index of Coincidence and its Applications in Cryptography.

L'indice permet de savoir si un texte a été chiffré avec un chiffre mono-alphabétique ou un chiffre poly-alphabétique en étudiant la probabilité de répétition des lettres du message chiffré. Il donne également une indication sur la longueur de la clé probable.

L'indice se calcule avec la formule suivante :  IC = \sum_{q=A}^{q=Z} \frac{n_{q}(n_{q}-1)}{n(n-1)} avec n le nombre de lettres total du message, nA le nombre de A, nB le nombre de B, etc.

En français, l'indice de coïncidence vaut environ 0,0746. Dans le cas de lettres uniformément distribuées (contenu aléatoire sans biais), l'indice se monte à 0,0385. L'indice ne varie pas si une substitution monoalphabétique des lettres à été opérée au préalable. C’est-à-dire que si l'on remplace par exemple 'a' par 'z' et 'z' par 'a', l'indice ne changera pas.

Sommaire

[modifier] Indice de coïncidence pour les chiffrements polyalphabétiques

Dans le cas où plusieurs alphabets seraient utilisés mais que le nombre d'alphabets est inconnu, l'indice de coïncidence peut être un précieux allié pour déterminer ce nombre. On utilise alors la formule suivante :

 IC = \frac{n-m}{m(n-1)}\cdot IC_{langue} + \frac{n(m-1)}{(n-1)m}\cdot 0,038 avec n le nombre total de lettres dans le message, m le nombre d'alphabets, IClangue l'indice pour la langue analysée et 0.038 est un terme correspondant à un contenu uniformément distribué. En variant m, on peut comparer l'indice obtenu avec cette formule avec l'indice réel provenant de la formule classique.

[modifier] Raisonnement mathématique

Soit 26 lettres et un tirage au sort aléatoire, sans biais. La chance d'obtenir une lettre donnée est de 1/26. Obtenir deux lettres identiques se monte à une probabilité de (1/26)2. La probabilité d'obtenir deux paires identiques est de l'ordre de : 26*(1/26)2 = 0,0385. C'est l'indice de coïncidence pour un message avec des lettres uniformément distribuées.

Introduisons maintenant un biais dans la distribution. Nous avons 100 lettres et le nombre d'unités pour chaque lettre n'est pas identique. Disons que nous avons 20 lettres « A », 5 lettres « B », 7 lettres « C », ..., et un seul « Z ». Dans ce cas, la chance de trouver toute paire de lettres identiques est : (20/100)2 + (5/100)2 + (7/100)2 + ... + (1/100)2. Nous avons alors l'indice de coïncidence pour un langage qui suit cette distribution.

[modifier] Autres langues

On peut aussi obtenir une estimation de la langue utilisée dans un texte en regardant son indice de coïncidence, la distribution des lettres n'étant pas la même entre les langues. Les indices peuvent légèrement varier selon les sources et les textes considérés pour l'analyse. Friedman donne par exemple un indice de 0,0778 pour le français.

Langue Indice
Français 0,0778
Anglais 0,0667
Allemand 0.0762
Espagnol 0,0770
Russe 0,0529
Italien 0,0738
Danois 0,0707
Néerlandais 0,0798
Finnois 0,0737
Grec 0,0691
Hébreu 0,0768
Japonais 0,0772
Malaysien 0,0852
Norvégien 0,0694
Portugais 0,0745
Serbe 0,0643
Suédois 0,0644
Arabe 0,0758
Esperanto 0,0690

[modifier] Exemple d'utilisation

L'indice est très utile lors de la vérification automatique d'un déchiffrement, en particulier lors d'une recherche exhaustive de toutes les clés. Dans leur excellent dossier sur la machine Enigma, Guillaume Munch et Julien Milli donnent un exemple concret d'utilisation de l'indice pour repérer la configuration de rotors la plus probable[1]. Les configurations incorrectes fournissent un indice d'environ 0,0386, ce qui est très proche de l'indice de données aléatoires uniformément distribuées. La configuration probable, quant à elle, donne un indice de 0,0648. On peut vraisemblablement supposer qu'il s'agit des bons paramètres. Cet exemple est d'autant plus intéressant qu'Enigma est en partie polyalphabétique via un tableau de substitution. L'indice trouvé est ainsi inférieur à celui d'une langue comme l'allemand ou le français. Avec une analyse un peu plus poussée soit manuelle ou automatique, on peut retrouver les substitutions les plus probables en tentant de maximiser l'indice de coïncidence et s'approcher de 0,075.

Un tel procédé peut être utilisé sur tous les types de chiffrement lors d'une attaque automatisée.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes et références

  1. Dossier sur Enigma, chapitre 6

[modifier] Liens externes

[modifier] Articles connexes


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