Georges Arnaud

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À ne pas confondre avec Georges-Jean Arnaud (né en 1928) et auteur de la série La Compagnie des glaces.


Georges Arnaud est le nom de plume de l'écrivain, journaliste d'investigation et militant politique Henri Girard (1917-1987). Georges est son deuxième prénom, Arnaud le nom de jeune fille de sa mère.

Sommaire

[modifier] Biographie

Né le 16 juillet 1917 à Montpellier (Hérault), Henri Girard est un enfant passablement indiscipliné. Rêvant d'aventures et d'exotisme, il a neuf ans lorsque sa mère décède en 1926. Valentine Girard est emportée par la tuberculose, maladie dont Henri souffrira lui-même au cours de sa vie. Élève moyen, il est cependant doué pour les matières littéraires. Après l'obtention du baccalauréat, il étudie le droit à Paris. Licencié en droit, il fait sciences politiques et commence à écrire.

Il se marie une première fois en 1938. Mobilisé en 1940 (engagé volontaire après avoir été réformé), il est capturé par l'armée allemande, puis s'évade et se réfugie à Clermont-Ferrand, en zone non-occupée. Il envisage alors une carrière dans la fonction publique, sans doute encouragé par son père, haut fonctionnaire au ministère des Affaires étrangères.

Le 25 octobre 1941, le père d'Henri, Georges Girard, sa tante et une domestique (ainsi que le chien, selon la légende) sont assassinés à coups de serpe dans la demeure familiale d'Escoire, en Périgord. Henri Girard donne l'alerte le lendemain matin. Face aux circonstances mystérieuses du drame (aucun témoin, absence de mobile, pas de traces d'effraction), il est arrêté. Bien qu'il proteste de son innocence, il passe dix-neuf mois en prison, jusqu'à la spectaculaire conclusion de son procès, le 2 juin 1943. Alors qu'il risquait la peine de mort, Henri Girard bénéficie de l'intervention magistrale de l'avocat Maurice Garçon, ancien ami de son père. Acquitté par les jurés après quelques minutes de délibération seulement, il reçoit un triomphe de la part du public du Palais de justice. L'affaire d'Escoire ne sera cependant jamais élucidée. Des années plus tard, Gérard de Villiers, auteur de la série SAS, racontera qu'Arnaud lui avait confié être l'auteur des crimes.... ou du moins pretend avoir recueilli cette confidence. Rien ne prouve cependant, à l'heure actuelle, que ces paroles furent vraiment prononcées. Néanmoins, les proches du château et autres témoins des faits semblent n'avoir jamais douté de l'identité du criminel. http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/vifdusujet/

Sur ces circonstances, le jeune homme se fera appeler Georges Arnaud.

Il vit à Paris de 1943 à 1947 où il dépense rapidement l'héritage familial, avec le mépris pour les contingences matérielles qu'il affichera toute sa vie. Il se lie à une jeune chanteuse, avec qui il aura deux fils. Ses biens saisis par les huissiers, il s'embarque pour l'Amérique du Sud le 2 mai 1947.

Sur ce continent, Georges Arnaud mène pendant deux ans une vie de bourlingueur. Il a multiplié les métiers, de chercheur d'or à barman et passant par chauffeur de taxis et de camions.

De retour en France en 1950, il publie son premier roman Le Salaire de la peur, inspiré de son périple en Amérique du Sud. Le livre rencontre immédiatement un immense succès.

Son divorce est prononcé en 1951 (la mère de ses fils le poursuivra pour ne pas lui avoir versé de pension alimentaire). Paraissent ensuite de nouveaux ouvrages tirés de ses expériences : Le Voyage du mauvais larron et Schtibilem 41 (sur son séjour en prison). Georges Arnaud réalise parallèlement des reportages pour différents journaux.

En 1952 le cinéaste Henri-Georges Clouzot tourne l'adaptation du Le Salaire de la peur avec Yves Montand et Charles Vanel. L'année suivante, le film est récompensé au Festival de Cannes (Grand Prix et prix d'interprétation à Charles Vanel). Arnaud restera réservé quant à la fidélité de cette adaptation.

En 1953 Henri Girard rencontre sa nouvelle compagne, Rolande, qu'il finira par épouser en 1966. Toujours en 1953, sa pièce Les Aveux les plus doux lui vaut un nouveau succès. Édouard Molinaro en tirera en 1970 une adaptation pour l'écran.

En 1957, aux Editions de Minuit, il signe avec l'avocat Jacques Vergès un manifeste, Pour Djamila Bouhired. Cette dernière, combattante du FLN, soupçonnée d'être une poseuse de bombes, est capturée par les paras français. Torturée, jugée et condamnée à mort en juillet 1957, Djamila Bouhired sera défendue par Jacques Vergès, qui obtiendra que sa peine soit commuée (et épousera sa cliente, libérée en 1962). Pour Djamila Bouhired est, avec le livre d'Henri Alleg La Question, l'un des manifestes qui alerteront l'opinion publique sur les mauvais traitements et les tortures infligés par l'armée aux indépendantistes algériens.

Georges Arnaud est alors arrêté pour non-dénonciation de malfaiteur, qui a donne une conférence de presse (Francis Jeanson) en faveur de l'indépendance de l'Algérie qui s'était déroulée dans un grand hôtel parisien. Il reçoit le soutien de Joseph Kessel, Jean-Paul Sartre, Jacques Prévert, François Maspero, André Frossard et d'autres personnalités. On s'élève à la fois contre la tentative de violation du secret professionnel, dont Arnaud bénéficie en tant que journaliste et, de plus en plus, contre la pratique de la torture en Algérie qui constitue le véritable enjeu de cette affaire. Inaugurant la stratégie dite d'enfermement militant, Georges Arnaud passe deux mois en prison. Il profite du scandale occasionné pour demander non seulement son acquittement mais aussi des excuses de la part de l'armée. Son procès aboutira à une condamnation en sursis à deux années d'emprisonnement. Ce verdict sera in fine annulé par la cour de cassation.

En 1962, Georges Arnaud s'exile en Algérie avec sa famille. Il contribue à la création d'une école de journalisme et au lancement du journal Révolution africaine.

En 1972, la tuberculose le contraint un séjour en France, notamment à Chamonix. Il quitte définitivement l'Algérie en 1974.

De 1975 à 1981, il réalise des reportages remarqués pour la télévision française, notamment sur la secte Moon ou sur l'affaire Peiper (ancien SS criminel de guerre, réfugié en Haute-Saône, dont la maison fut incendiée en 1976 - un cadavre non identifiable fut découvert dans les décombres).

En 1984, la famille de Georges Arnaud s'établit en Catalogne où il terminera ses jours. Henri Girard-Georges Arnaud succombe à une crise cardiaque le 5 mars 1987 à Barcelone.

[modifier] Œuvres

  • Le Salaire de la peur, Julliard, 1950
  • Le Voyage du mauvais larron, Julliard, 1951 ; Le Pré aux Clercs, 1987 (édition revue et corrigée)
  • Lumière de soufre, Julliard, 1952
  • Indiens des hauts plateaux, revue 9, n°8, décembre 1952
  • Prisons 53, Julliard 1953
  • Schtibilem 41, Julliard, 1953
  • Les Oreilles sur le dos, Editions du Scorpion, 1953 ; Julliard, 1974 (édition revue et corrigée)
  • Les Aveux les plus doux, Julliard, 1954
  • Les Aveux les plus doux (scénario), Editions des Lettres françaises, 1954
  • Indiens pas morts, Delpire Editeur, 1956
  • Pour Djamila Bouhired, Editions de Minuit, 1957
  • Maréchal P…, Editeurs Français Réunis, 1958
  • La plus grande Pente, Julliard, 1961
  • Mon procès, Editions de Minuit, 1961
  • Préface au Meurtre de Roger Ackroyd d’Agatha Christie, Le Livre de Poche, 1961
  • L’Affaire Peiper : plus qu’un fait divers, Atelier Marcel Jullian, 1978
  • Chroniques du crime et de l’innocence, Jean-Claude Lattès, 1982
  • Juste avant l’aube, en collaboration avec Jean Anglade, Presses de la Cité, 1990

[modifier] Famille

Deux fils : Dominique (1946) et Henri (1947) ; deux filles : Catherine (1962) et Laurence (1964).

[modifier] Le mystère du triple crime d’Escoire

Dans son livre, Du crime d’Escoire au Salaire de la Peur, Jacques Lagrange prétend avoir découvert une intrigue rocambolesque où apparaissent les ministres des Affaires étrangères, de l’Intérieur, les services secrets et même le complot d'une faction royaliste. Cette version fantaisiste a été justement écartée par l'historien Guy Penaud (qui a eu accès au dossier constitué par Me Maurice Garçon) qui a publié un ouvrage complet sur cette affaire Le triple crime du château d'Escoire (Editions de La Lauze à Périgueux). Il démontre que si Henri Girard (Georges Arnaud) a bénéficié de la clémence des magistrats d'assises et des jurés c'est parce que le président d'assises Hurlaux (impliqué dans l'affaire Stavisky) est intervenu auprès de Me Maurice Garçon : en examinant avec indulgence cette affaire aux assises il espérait que sa carrière de magistrat serait reconstituée !

[modifier] Les deux Georges Arnaud : une malheureuse homonymie

De son vrai nom Henri, Georges, Charles, Achille Girard, Georges Arnaud est contemporain d'un autre écrivain français, dont pour comble d'ironie Georges Arnaud était le véritable patronyme. Ce dernier a dû signer ses œuvres Georges-Jean Arnaud ou Georges J. Arnaud pour se singulariser. « J’ai souffert énormément qu’il y ait un autre Georges Arnaud… De voir un bouquin aussi bon que Le Salaire de la peur avoir un succès formidable, parce que c’était un certain Georges Arnaud qui, lui-même, avait pris un pseudonyme, j’avais l’impression qu’on m’avait fauché mon nom ».

[modifier] Liens externes

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