Fahrenheit 451

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Fahrenheit 451 (titre original : Fahrenheit 451) (1953) est un roman de Ray Bradbury. Le titre fait référence à la température, en degrés Fahrenheit, à laquelle le papier commence à brûler spontanément au contact de l’air.

Sommaire

[modifier] Résumé de l’œuvre

Bradbury décrit un avenir où les livres sont brûlés par les pompiers. L’un d'eux, Guy Montag, jusque là pleinement satisfait de son travail, va un jour décider de soustraire des livres à leur destruction promise, et les lire... Commence alors pour Montag la découverte d’un monde inconnu, dissimulé par les médias et censuré par la société, où, par-delà les livres interdits, Montag va découvrir ceux qui croient toujours en la poésie et la littérature. Il y aura tout d'abord Clarisse McClellan, une jeune fille mélancolique opposée en tous points à son épouse, (endoctrinée par la propagande télévisée), puis Faber, un ancien professeur de littérature marginalisé. Et viendront finalement les membres d'une communauté itinérante, ayant chacun appris un livre afin de le sauver de l'oubli auquel il était promis. Mais une guerre totale menace cette société de consommation, et Montag doit également faire face à sa propre hiérarchie. Les Pompiers, gardiens de cette société brûleuse de livres, traitent en effet sévèrement le transfuge de l'un des leurs de l'autre côté de la flamme...

Montag découvrira ainsi, au travers de ses rencontres, comment la littérature permet de partager ses questions, ses angoisses, ses passions. La littérature, c’est la vie ; en revanche, la vie médiatique moderne est présentée comme une vie simplifiée, débarrassée de ses aspérités, une vie creuse et monotone, qui conduit inconsciemment les êtres au désespoir et au suicide. Et Montag apprendra également la liberté, ce poison instillé par les livres.

[modifier] L’œuvre dans son contexte

[modifier] La science-fiction

Les années 1920/1950 marquent aux États-Unis le premier âge d’or de la science-fiction. Le ‘mouvement’ allie des romans et nouvelles, publiées sous formes d’épisodes dans des magazines et des films (Metropolis, Fritz Lang, 1927), qui sont souvent restés dans les mémoires pour leurs effets spéciaux. À l’époque la SF se résume cependant à une littérature de gare. C’est vers les années 50 qu’ont émergé les principaux écrivains SF (Lovecraft, Asimov…) et notamment Bradbury. Il se démarque cependant par un style plus poétique et une vision souvent pessimiste de la société d’aujourd’hui et assez anti-scientifique.

Bradbury rejette en outre le titre d'écrivain de science-fiction : «Avant tout, je n'écris pas de science-fiction. J'ai écrit seulement un livre de science-fiction et c'est Fahrenheit 451, basé sur la réalité. La science-fiction est une description de la réalité. La Fantasy est une description de l'irréel. Donc les chroniques martiennes ne sont pas de la science-fiction, c'est de la fantasy.[1] »

[modifier] Le maccarthisme

En 1952, l’Amérique est au cœur du maccarthisme. Ainsi, la virulence du sénateur Joseph MacCarthy met un terme à la carrière de nombreux écrivains et cinéastes, souvent amis de Bradbury. Le climat de paranoïa est d’autant plus lourd que les faits sont volontairement déformés et mis à la disposition du public.

[modifier] Analyse de l’œuvre

[modifier] Le titre

Fahrenheit 451 : ‘température à laquelle le papier s’enflamme et se consume.’
En fait, le titre évoque deux aspects de la façon dont on brûle un livre :

  • Bien entendu, les spectaculaires autodafés organisés par les pompiers…
  • … mais aussi le fait que la lecture soit rendue impossible par l’atrophie de tout intérêt pour la chose littéraire.

[modifier] Le genre

Contre-utopie : (Dystopie) le genre projette dans le futur des faits d’actualité en les amplifiant pour leur intemporelle ; l’œuvre appartient donc au genre de l’apologue.

[modifier] Les thèses de l’œuvre

[modifier] Une allégorie possible : le maccarthisme

Une condamnation du maccarthisme : l’œuvre présente de nombreux points communs avec la situation aux USA en 1952 ; en effet, dans l’œuvre, les intellectuels sont éliminés par la délation de leurs voisins dans le but d’assurer la sécurité nationale (une seule parole => pas de naissance de mouvements de contestation) et le ‘bonheur commun’.


[modifier] La description d’une société apocalyptique

  • Une société déshumanisée : la société décrite par Fahrenheit 451 montre que de nombreuses valeurs humaines ont sombré ; l’amour, puisque Montag et sa femme ne se rappellent plus leur première rencontre, l’intelligence a aussi sombré ; en effet, les gens se contentent de l’opinion officielle et même les "gardiens de la vérité", comme Beatty, ne comprennent pas ce qu’ils disent, puisque d’après eux, la culture et le dialogue se résument à un échange de citations. Même la communication a sombré, chacun fait preuve d’un individualisme forcené. Les gens sont redevenus des enfants, ils vivent dans l’immanence et veulent uniquement agir : ‘Les gens ne parlent de rien’. Enfin, on peut dire que cette société est redevenue primitive, puisqu’elle pratique le culte de la violence, au nom du bonheur.
  • L’échec d’une société du bonheur : la société présentée par Fahrenheit 451 est a priori parfaite, puisque les gens qui y vivent sont heureux, comme l’explique Beatty dans son discours. Cependant, ceci n’est qu’une illusion. En effet, dès les premières pages, Montag se rend compte qu’il n’est pas heureux. Inconsciemment, Mildred sait qu’elle n’est pas heureuse, puisqu’elle tente de se suicider à l’aide de somnifères. D’ailleurs, son cas n’est pas exceptionnel : ‘Des cas comme ça […] on en a tellement depuis quelques années.
  • Une société machiavélique : Sous couvert de proposer du bonheur aux gens, elle en profite pour leur vendre une foule de produits ; ainsi, Montag s’est mis dans une situation financière délicate pour pouvoir offrir à sa femme sa télévision murale ; cependant, le système profite aussi de leur inconscience pour leur vendre des choses bien plus importantes, comme un président ou une guerre.

[modifier] Ce qui a causé l’émergence d’une telle société

  • Les méfaits de l’émergence d’une culture de masse : comme le décrit le pompier Beatty, l’émergence d’une telle société n’a été rendue possible que par l’émergence d’une culture de masse, facilité par la déliquescence du système scolaire ; ‘le cinéma et la radio, les magazines, les livres sont nivelés par le bas en une vaste soupe’. Les gens se sont désintéressés de la culture et ont préféré faire du sport, regarder la télévision …
  • L’absence de mobilisation des intellectuels : la situation a aussi été rendue possible par le fait que les intellectuels comme Faber ne se soient pas mobilisés : ‘J’ai vu où on allait, il y a longtemps de ça. Je n’ai rien dit. Je suis un de ces innocents qui auraient pu élever la voix quand personne ne voulait écouter les ‘coupables’.’ On peut considérer que ce message est un appel à la communauté des intellectuels pour qu’ils se mobilisent contre l'analphabétisation de la société.

[modifier] Les solutions / L’opinion de Bradbury sur le bonheur

  • L’échec de la révolution : Selon Bradbury, fomenter une révolution pour tenter d’inverser le processus est voué à l’échec ; en effet, le régime est trop puissant, d’ailleurs, Montag se fait prendre. Mais, plus que dangereuse, une telle tentative est inefficace, comme le laisse entendre le titre de la partie où est décrite la révolution (Le tamis et le sable). Le message révolutionnaire (le sable) ne serait pas écouté par la population (le tamis), obnubilée par la télévision.
  • Une vision humaniste de l’homme et du monde : Bradbury croit cependant qu’il faut garder l’espoir, car une société comme celle qu’il dépeint n’est pas viable ; en effet, elle a perdu la guerre ; il faut attendre des temps meilleurs. De plus, tout peut recommencer ; ‘c’est ce que l’homme a de merveilleux, il ne se laisse jamais gagner par le découragement’. Enfin, pour lui, le bonheur consiste à jouir des bonheurs prodigués par la nature et non de bonheurs artificiels : ‘Regarde le monde, il est plus extraordinaire que tous les rêves fabriqués ou achetés en usine.


[modifier] Adaptations

  • François Truffaut en a fait un film, sorti en 1966, avec Oskar Werner, Julie Christie, Cyril Cusack, Anton Diffring (cf. Fahrenheit 451). Cette incursion de Truffaut dans la science-fiction lui permet à la fois d’explorer un futur plausible et de dénoncer les risques des avancées techniques dans un régime totalitaire. Une partie de son enfance, marquée par son amour des livres et le nazisme qui brûlait ces livres dans les rues apparaissent.
  • Une nouvelle adaptation du roman est annoncée pour 2008 réalisée par Frank Darabont.
  • Penser au film Fahrenheit 9/11 palme d’or à Cannes, de Michael Moore qui y fait explicitement référence : le titre est inspiré du fait que le cri d’alarme à lancer à la société abêtie n’est plus fait par le papier (et donc les intellectuels) mais par cet événement du 11 septembre 2001 qui doit permettre à la population de ne pas voter pour George Walker Bush aux élections présidentielles de 2004 (ce qui fut un échec de ce côté). Moore considère que les intellectuels de gauche américains ont trahi leur mission. Ray Bradbury a exprimé sa colère au fait que Moore ait pastiché le titre de son roman sans sa permission, mais il ne peut le poursuivre en justice parce qu’il n’avait pas placé le titre sous copyright.
  • Une bande dessinée de Donald Duck (parue dans Mickey Parade[2]) pastiche le roman sous le titre de La Brigade du Silence (en version française). Dans cette histoire, Donald fait partie d’une brigade de pompiers qui doivent brûler tous les instruments de musique sous l’ordre de Picsou qui prétend que la musique rend triste.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens externes

[modifier] Notes

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L'Homme démoli de Alfred Bester
Prix Hugo du meilleur roman
1954 (attribué en 2004)
They'd Rather Be Right de Mark Clifton et Frank Riley