Dernier théorème de Fermat

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Travail de Diophante traduit du grec en latin par Claude-Gaspard Bachet de Méziriac. Cette édition du livre a été publiée en 1621. La page 85 contient le problème II.VIII de Diophante, et est la page sur laquelle Pierre de Fermat écrivit que la marge était trop petite pour contenir la démonstration.
Travail de Diophante traduit du grec en latin par Claude-Gaspard Bachet de Méziriac. Cette édition du livre a été publiée en 1621. La page 85 contient le problème II.VIII de Diophante, et est la page sur laquelle Pierre de Fermat écrivit que la marge était trop petite pour contenir la démonstration.

En mathématiques, le dernier théorème de Fermat, ou théorème de Fermat-Wiles, énonce qu'il n'y a pas de nombres entiers non nuls x, y et z tels que:

x^n+y^n=z^n \,

dès que n est un entier strictement supérieur à 2.

Pour les valeurs de n inférieures ou égales à 2, il existe une infinité de solutions. Le cas n = 1 est évident. Le cas n = 2 admet notamment la solution classique 32 + 42 = 52. De manière générale, toutes les solutions pour n = 2 sont données par : x=2kml, y=k(m2-l2), z=k(m2+l2), où les nombres k, l et m satisfont les conditions: k entier, m>l, m et l de parités différentes. On appelle parfois ces entiers les triplets pythagoriciens.

Cependant, dès que n est supérieur à deux, ce n'est plus possible. Le théorème doit son nom à Pierre de Fermat qui écrivit en marge d'une traduction de l'Arithmetica de Diophante, à côté de l'énoncé de ce problème :

«  J’ai trouvé une merveilleuse démonstration de cette proposition, mais la marge est trop étroite pour la contenir.  »

Cette note sibylline laissait penser qu'une démonstration élémentaire était possible ; ce qui a donc vivement émoustillé la curiosité des gens. Après avoir été l'objet de fiévreuses recherches pendant plus de 300 ans, le théorème a finalement été démontré en 1994 par le mathématicien Andrew Wiles. La plupart des mathématiciens pensent aujourd'hui que Fermat s'était trompé en pensant avoir correctement démontré sa conjecture : la preuve connue (affinée depuis) fait appel à des outils très puissants de théorie des nombres.

Plus précisément, Wiles a prouvé un cas particulier de la conjecture de Shimura-Taniyama-Weil, dont on savait depuis quelque temps déjà, via les travaux de Yves Hellegouarch, Gerhard Frey, Jean-Pierre Serre et Ken Ribet qu'elle impliquait le théorème. La preuve fait appel aux formes modulaires, à des représentations galoisiennes…

Sommaire

[modifier] Méthode de la démonstration

Pour démontrer ce théorème, Andrew Wiles a utilisé la méthode suivante :

  1. Associer aux solutions de l'équation de Fermat une courbe elliptique particulière, dite courbe de Frey-Hellegouarch,
  2. Démontrer que la courbe de Frey-Hellegouarch ne peut pas être associée à une forme modulaire,
  3. Démontrer que toute courbe elliptique – ou une classe suffisammant importante pour contenir celle de Frey-Hellegouarch – est toujours associée à une forme modulaire : C'est la fameuse conjecture de Shimura-Taniyama-Weil, si importante en théorie des nombres,

Ainsi, il serait démontré que l'équation de Fermat ne peut avoir de solutions.

[modifier] Les courbes elliptiques

Une courbe elliptique est une courbe d'équation de la forme : y2 + axy + by = x3 + cx2 + dx + e

Les coefficients a,b,c,d et e sont des éléments du corps sur lequel est définie la courbe. Pour qu'une telle courbe soit effectivement une courbe elliptique, il faut que la courbe ainsi définie ne soit pas singulière, c’est-à-dire qu'elle n'ait ni point de rebroussement, ni point double. Cette dernière condition s'exprime par le fait qu'un certain polynôme sur les coefficients, analogue à un discriminant, ne s'annule pas.

Si l'on prend l'exemple du corps des réels : L'équation d'une courbe elliptique définie sur le corps des nombres réels peut être mise sous une forme plus simple (dite équation de Weierstrass) : y2 = x3 + ax + b.

A cette courbe, on peut associer un discriminant : Δ = -16(4a3 + 27b2).Un discriminant différent de zéro indique une courbe sans singularités (ou encore courbe non-singulière) et donc une courbe effectivement elliptique.

[modifier] La courbe de Frey-Hellegouarch

En 1984, l'allemand Gerhard Frey, en reprenant des idées plus anciennes de Yves Hellegouarch, démontra que les solutions de l'équation de Fermat pour n>2, permettaient de définir des courbes elliptiques semi-stables aux propriétés vraiment étranges; ce sont les courbes d'équation : y2 = x3 + (An - Bn)x2 - AnBn où A et B satisfont à l'équation de Fermat.

Pour conclure, il suffit donc de montrer que la courbe elliptique ainsi définie a des propriétés trop bizarres pour pouvoir exister. Comme dans d'autres situations en mathématiques, le fait d'intégrer le problème de Fermat dans un cadre apparemment beaucoup plus difficile constitue quand même une avancée, parce qu'on dispose alors de tout un outillage développé pour ce cadre.

[modifier] La démonstration de Ken Ribet

En 1986, après pratiquement 2 ans d'effort, l'américain Kenneth Ribet put démontrer que la courbe de Frey-Hellegouarch n'était pas paramétrable par des fonctions modulaires.

Il ne restait plus qu'à démontrer la conjecture de Shimura-Taniyama-Weil : Toute courbe elliptique est paramétrable par des fonctions modulaires.

[modifier] La conjecture de Shimura-Taniyama-Weil

Cette conjecture précise que les courbes elliptiques peuvent toujours être associées (ou paramétrées ou dérivent) à des fonctions spéciales dites modulaires (généralisation des fonctions trigonométriques).

Pour démonter cette conjecture, Andrew Wiles va utiliser les notions mathématiques suivantes :

  • Les séries L,
  • Les formes modulaires,
  • Les Groupes de Galois absolu

La démonstration complète est publiée en 1995 dans Annals of Mathematics.

[modifier] Remarques

Ce théorème n'a aucune application en soi : c'est par les idées qu'il a fallu mettre en œuvre pour le démontrer, par les outils qui ont été mis en place pour ce faire, qu'il prend une telle valeur. L'article Démonstrations du dernier théorème de Fermat montre quelques exemples d'outils découverts et utilisés pour la résolution de ce problème.

On peut également comprendre ce théorème graphiquement en considérant la courbe d'équation  xn + yn = 1 : si n > 2, cette courbe ne passe par aucun point à coordonnées rationnelles non nulles.

L'usage voulant qu'on donne à un théorème le nom de celui qui en a apporté la démonstration, l'appellation de « théorème de Fermat » ne se justifie pas à proprement parler. Il faudrait parler soit d'une « conjecture de Fermat », soit du « théorème de Wiles ».

Contrairement à ce qu'on a pu parfois voir dans des journaux ou à la télévision (en raison du type de formule qui y figure), ce théorème n'a pas vraiment de relation avec le théorème de Pythagore. En fait, l'objet du théorème de Pythagore est de donner une caractérisation géométrique des triangles pythagoriciens, c'est-à-dire dont les longueurs des côtés forment un triplet pythagoricien, ces triplets étant eux-mêmes les solutions de l'équation de Fermat dans le cas n = 2. L'analogie avec le théorème de Fermat est donc la question de l'existence de triplets pythagoriciens, et la question de leur interprétation géométrique est nettement une autre question. Remarquons néanmoins que Fermat s'est évidemment inspiré de la notion de triplet pythagoricien : sa conjecture est en effet notée en marge d'un exposé de Diophante sur les triplets pythagoriciens.

[modifier] Références

[modifier] Voir aussi