Arès

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Tête d'Arès casqué du type de l'Arès Borghèse, copie d'une œuvre d'Alcamène, du cercle de Phidias, IVe siècle av. J.-C., Glyptothèque de Munich (Inv. 212)
Tête d'Arès casqué du type de l'Arès Borghèse, copie d'une œuvre d'Alcamène, du cercle de Phidias, IVe siècle av. J.-C., Glyptothèque de Munich (Inv. 212)

Arès (en grec ancien Ἄρης / Arês ou Ἄρεως / Areôs) est le dieu de la guerre et de la destruction dans la mythologie grecque. Fils de Zeus et de Héra, il est identifié à Mars chez les Romains.

Sommaire

[modifier] Rôles

[modifier] Dieu de la guerre

Zeus s'interpose entre Athéna et Arès, cratère à volutes de Nicosthénès, British Museum (B364)
Zeus s'interpose entre Athéna et Arès, cratère à volutes de Nicosthénès, British Museum (B364)

Arès est le dieu de la guerre, de la brutalité et du carnage. Il va au combat accompagné de sa sœur Éris (la Discorde), ses fils Déimos (la Terreur) et Phobos , ainsi que d'Ényo, déesse des batailles. Lui-même est souvent appelé Ἐνυάλιος / Enyálios. Traditionnellement, les Grecs interprètent son nom comme un dérivé du mot « tueur », ἀναίρης / anaírês.

En tant que tel, il est haï des autres dieux, en particulier Zeus, lequel lui déclare dans l'Iliade :

« Je te hais plus qu'aucun des dieux qui vivent sur l'Olympe
Car tu ne rêves que discordes, guerres et combats[1]. »

Héra, sa mère, ne l'apprécie guère plus, dépitée qu'elle est de le voir prendre parti pour les Troyens pendant la guerre de Troie. Elle déclare pareillement à son sujet :

« Zeus Père, n'es-tu pas outré des sévices d'Arès ?
Combien de braves Achéens n'a-t-il pas fait périr
à tort et à travers ! J'en suis navrée, et cependant
Aphrodite et Apollon à l'arc d'argent sont tout heureux
d'avoir lâché ce fou qui ne connaît aucune loi[2]. »

Athéna, déesse de la guerre comme lui, représente les aspects positifs de la guerre, comme la victoire, alors qu'il en incarne les aspects négatifs. Les deux se haïssent particulièrement. Devant Troie, elle incite Diomède à le frapper, et lui jette elle-même un gros bloc de pierre, qui l'atteint au cou. Il faut dire que, seul parmi les dieux, Arès prend part personnellement au combat, et ne dédaigne pas de dépouiller Périphas de ses armes[3], à l'instar d'un mortel.

Seule Aphrodite témoigne de l'affection à son « bon frère »[4] qui selon d'autres légendes est également son amant. Dans son Œdipe à Colone, Sophocle peut ainsi le proclamer « le dieu à qui tout honneur est refusé parmi les dieux »[5].

Son nom désigne toute forme de mort violente, et plus particulièrement la peste. La guerre est surnommée « danse d'Arès » dans les épopées. Les Grecs voient en lui le « dieu des larmes »[6]. Seul l’Hymne homérique qui lui est consacré, sans doute tardif, le montre sous un jour bienveillant et le nomme :

« Cœur hardi, porteur de bouclier sauveur des cités, coiffé d'airain,
Aux mains robustes, infatigable, fort par la lance, rempart de l'Olympe,
Père de la Victoire, heureuse conclusion des guerres, auxiliaire de Thémis ;
Maître absolu de l'adversaire, guide des hommes les plus justes[7]. »

Il est intéressant de comparer la haine qu'inspirait aux Grecs la force brute d'Arès au respect que portaient les Romains à son homologue Mars : on peut y voir le contraste de valeurs entre ces deux civilisations antiques.

[modifier] Garant des serments

Arès est aussi le dieu vengeur. En tant que tel, son nom est utilisé dans les serments solennels. C'est par exemple le cas dans le serment prêté par les jeunes Athéniens pendant leur éphébie.

[modifier] Vicissitudes

Sa force aveugle n'en fait pas un combattant invincible : dans le Bouclier d'Héraclès du pseudo-Hésiode[8], il est vaincu par deux fois par Héraclès et dans l'Iliade, il doit s'avouer vaincu face à Diomède. L'Iliade relate également que les Aloades l'enferment pendant treize mois dans une jarre de bronze. Selon le scholiaste[9], c'est pour avoir causé la mort d'Adonis, placé sous la charge des Aloades. Il est délivré, à bout de forces, par Hermès. Il s'agit probablement de l'explication étiologique d'un festival survenant tous les 13 mois, durant lequel toutes sortes de licences étaient permises[10].

Selon Euripide[11] et Hellanicos[12], quand Halirrhothios, fils de Poséidon, violente Alcippé — fille qu'il a avec Aglaure, fille de Cécrops —, il le tue. Pour ce meurtre, Arès est traduit devant le tribunal des dieux olympiens, sur la colline qui prend son nom (cf. Aréopage). Selon Euripide, il est acquitté. D'après Panyasis[13] cependant, il semble qu'Arès doive servir parmi les mortels, sans doute pour prix de ce meurtre.

[modifier] Amours et postérité

Présentés dans l'Iliade comme purement fraternels, les rapports d'Arès et d'Aphrodite deviennent dans l'Odyssée[14] à la fois amoureux et adultères, puisque la déesse de l'amour y est mariée à Héphaïstos — celui-ci étant l'époux d'une dénommée Charis dans l’Iliade. Encore une fois, Arès est tourné en ridicule : dénoncés par Hélios, le soleil, les amoureux tombent dans le piège du mari trompé qui les capture dans un filet et les exhibe aux dieux hilares. Honteux, Arès doit se réfugier chez lui, en Thrace.

Selon la Théogonie[15] — où Héphaïstos est l'époux d'Aglaé, l'une des trois Charites — Aphrodite donne à Arès trois enfants : Déimos, Phobos et Harmonie, épouse de Cadmos, le fondateur de Thèbes. La paternité d'Éros et Antéros apparaît pour la première fois chez le poète lyrique Simonide et paraît lui être attribuée plutôt par commodité. Il est aussi vu comme père de Pathos (la passion) et de Himéros (le désir).

Ses autres enfants sont souvent des criminels ou des fous :

[modifier] Lieux de culte

Statue d'Arès, villa Hadriana
Statue d'Arès, villa Hadriana

Sa résidence préférée est la Thrace — les Thraces, pour les Grecs, étaient un peuple guerrier et batailleur. Il est révéré par les peuples de Colchide et de Scythie. En Grèce, il n'a que peu de lieux de culte. Une fontaine lui est consacrée à Thèbes, en souvenir de la légende de Cadmos, qui avait semé là les dents d'un dragon, fils d'Arès, qui donnèrent naissance aux Spartes. Par la suite, Cadmos fait la paix avec Arès en épousant Harmonie, fille du dieu et d'Aphrodite, avant de fonder Thèbes. La métaphore est claire : la fin des guerres apporte l'ordre et l'harmonie, et permet la fondation de la cité[16].

C'est surtout à Sparte qu'il fait l'objet d'un culte. Les éphèbes lui sacrifient un chien à Thérapné, en Laconie. À Géronthrai, située au nord d'Hélos, toujours en Laconie, il est célébré dans des fêtes excluant les femmes. À Sparte même, un sanctuaire lui est dédié sous le nom d'Arès Théritas, c'est-à-dire « le sauvage », épiclèse parfois rattachée à Théra, sa nourrice.

En Attique, il possède un sanctuaire à Acharnes. Une stèle, actuellement conservée à l'École française d'Athènes, reproduit sans doute la statue du culte. Au Ier siècle, le sanctuaire est transféré sur l'Agora d'Athènes et une nouvelle statue est érigée, dont l'Arès Borghèse est sans doute une copie.

À Tégée, en Arcadie, les femmes le célèbrent dans des fêtes qui leur sont réservées, et commémorent leur vaillance contre les Spartiates. Près de Trézène, un sanctuaire lui est consacré en souvenir des Amazones, ses filles. À Athènes, il est vénéré en association avec Aphrodite. Enfin, il a des temples à Argos et Salamine.

Au total, sa place dans la religion grecque antique est bien loin d'égaler celle de Mars chez les Romains.

[modifier] Épiclèses, attributs & sanctuaires

  • Attributs : la torche, la lance, le casque, le primevère, le vautour ;
  • Épithètes homériques :
    • fléau des hommes (βροτολοιγός / brotoloigós),
    • souillé de sang (μιαιφόνος / miaiphónos),
    • assailleur de remparts (τειχεσιπλήτης / teikhesiplếtês),
    • brutal (μαλερός / malerós) ;
  • Épiclèses :
    • Ényalos (Ἐνυάλιος),
    • Théritas (Θηρίτας) ;
  • Sanctuaires : Sparte, Acharnes (Attique), Thèbes.

[modifier] Notes

  1. Homère, Iliade [détail des éditions] [lire en ligne] (V, 872-873). Extrait de la traduction de Frédéric Mugler pour Actes Sud.
  2. Iliade (VII, 756-761).
  3. liade'' (V, 842-844).
  4. Iliade (V, 359).
  5. Sophocle, Œdipe à Colone [détail des éditions] [lire en ligne] (v. 210).
  6. Eschyle, Suppliantes [détail des éditions] [lire en ligne] (v. 681).
  7. Extrait de la traduction de Renée Jacquin.
  8. Hésiode, Bouclier d'Héraclès [détail des éditions] [lire en ligne] (v. 357–167 ; 424–466).
  9. ΣbT Iliade V, 385.
  10. Burkert, p. 169.
  11. Euripide, Électre [détail des éditions] [lire en ligne] (v. 1258–1262).
  12. Hellanicos (4F38).
  13. Frag. 3 PEG.
  14. Homère, Odyssée [détail des éditions] [lire en ligne] (VIII, 266-366).
  15. Hésiode, Théogonie [détail des éditions] [lire en ligne] (v. 933-937).
  16. Burkert, p. 170.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

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[modifier] Bibliographie

  • (en) Walter Burkert, Greek Religion (traduction de l'original allemand Griechische Religion des archaischen und klassichen Epoche, 1977), Blackwell, Oxford, 1985 (ISBN 978-0-631-15624-6), p. 169-170.
  • (en) Timothy Gantz, Early Greek Myth, Johns Hopkins University Press, 1993 [détail édition], p. 78-81.


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