Apprentissage de la lecture

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L'apprentissage de la lecture est un sujet qui a intéressé de nombreux pédagogues. Il est un des apprentissages essentiels de l'école primaire avec l'écriture et les mathématiques, et le premier but de la scolarité obligatoire.

Père faisant lire ses enfants
Père faisant lire ses enfants

Sommaire

[modifier] Âge idéal et contexte

Dans de nombreux pays, l'apprentissage de la lecture commence à l'âge de la scolarité obligatoire, aux alentours de six ans, et parfois dès cinq ans comme au États-Unis.

Certains considèrent par contre qu'il est nécessaire d'attendre jusqu'à sept ans afin que l'enfant ait la maturité nécessaire. C'est le cas par exemple dans le système éducatif finlandais.

Pour pouvoir aborder efficacement l'apprentissage de la lecture, certaines compétences préalables doivent être acquises tant d'un point de vue intellectuel que du point de vue psychomoteur : compréhension du langage, aptitude à l'analyse et à la synthèse mais aussi latéralisation et motricité fine.

L'envie d'apprendre, et l'ambiance de confiance dans laquelle se passe l'apprentissage sont également des points importants. Pour cela, la lecture régulière d'histoires à un enfant est considérée comme un facteur fortement incitatif.

[modifier] Méthodes

On oppose habituellement deux types de méthodes d'apprentissage de la lecture : l'une va de l'élément simple, la lettre, vers le texte (méthodes synthétiques, dites également syllabiques ou alphabétiques), l'autre va du texte vers la lettre (méthodes analytiques, dites également semi-globales). Une autre voie se dessine, basée sur des travaux de psychologie cognitive, appelée méthode stratégique. Celle-ci envisage des stratégies de lecture à activer en fonction de plusieurs éléments :

  • les deux méthodes précitées ;
  • l'influence du contexte proche (mots avant ou après ce qu'on est en train de lire) ou plus global du texte ;
  • l'influence des connaissances personnelles que l'on relie à ce que l'on lit.

[modifier] Méthode syllabique

Méthode d'apprentissage de la lecture mise au point par le pasteur Stuber (1762)
Méthode d'apprentissage de la lecture mise au point par le pasteur Stuber (1762)

La méthode syllabique, également appelée « méthode synthétique », repose sur les propriétés phonétiques de notre alphabet. Déjà pratiquée dans la Grèce antique, elle consiste à partir des éléments les plus simples : les lettres et les sons. Une fois que ceux-ci sont maîtrisés, l'enfant apprend à les composer en syllabes puis en mots.

La méthode syllabique à entrée alphabétique part de la reconnaissance des lettres, ou graphème. C'est le fameux « B - A, BA » (où les lettres B et A donnent la syllabe BA).

La Méthode Boscher (utilisée au début du XXe siècle et rééditée avec de forts tirages de nos jours) est de type alphabétique. Actuellement, il existe de nouvelles méthodes alphabétiques comme Lire avec Léo et Léa. La Méthode Alpha et La Planète des Alphas ont pour but d'apprendre à l'enfant à associer les sons et les lettres d'une manière ludique sans passer par des textes écrits.

La France, à l'image de nombreux autres pays[réf. nécessaire], a décidé en janvier[1] et mars 2006[2] l'utilisation des méthodes syllabiques ou alphabétiques pour l'apprentissage de la lecture.

À noter : l'approche syllabique à entrée phonique prend pour point de départ les sons de la langue, les phonèmes, que l'on met en relation avec les graphèmes (quelles sont les différentes façons d'écrire ce son) puis que l'on repère dans les mots et enfin dans les phrases. Cette approche est celle qui est utilisée par les méthodes mixtes et ne doit pas être confondue avec la précédente. La méthode du Sablier, apparue au Canada dans les années 1970 est la première de ce type, dans lequel on peut également classer Au fil des mots.

[modifier] Méthode globale

La méthode globale décrite dès 1787 par Nicolas Adam, également appelée « méthode analytique », a été popularisée au début du XXe siècle par Ovide Decroly.

La lecture se fait par la reconnaissance d'un mot en entier, et non par le code de l'écrit. Ce type de méthode est utilisé pour apprendre à lire des langues comme le chinois, basées sur des idéogrammes.

Elle est adaptée dans les années 1980 par Évelyne Charmeux et Jean Foucambert sous le nom de méthode idéovisuelle. Cette méthode consiste à utiliser directement des mots entiers simples et familiers, voire des phrases entières, sous forme de différents jeux de devinettes. Le manuel Objectif lire[3] s'en inspire.

Cette méthode est fort peu utilisée dans sa forme pure. Les méthodes mixtes, en raison de leur « départ global », sont associées à cette méthode[4].

La méthode globale est vivement critiquée par le professeur agrégé de lettres Jean-Paul Brighelli ; celui-ci expose sa thèse dans l'essai intitulé La Fabrique du crétin[5].

[modifier] Méthode mixte

Appelée également « méthode semi-globale », cette méthode tente de combiner les avantages de la méthode analytique et synthétique, les mots appris par l'analytique étant utilisés pour découvrir les syllabes et sonorités, permettant ainsi le déchiffrage de nouveaux mots. En pratique, elle commence généralement par faire apprendre par cœur un certain nombre de mots, tels qu'articles et mots de liaison, pour poursuivre en se combinant avec une analyse syllabique ou phonétique.

Les méthodes Gafi le fantôme, Ratus (influence syllabique), Ribambelle (méthode interactive), Abracadalire, Mini-loup, Grindelire, Vocaligram sont des méthodes mixtes.

La méthode mixte n'est pas une méthode synthétique. C'est une méthode analytique puisqu'elle va du texte vers la lettre et qu'elle aborde la lecture par les phonèmes auxquels elle fait correspondre les différents graphèmes.

Dans les faits, elle est pratiquement la seule utilisée depuis 30 ans en France. Ses détracteurs l'accusent de provoquer dyslexie et dysorthographie.

[modifier] Méthode naturelle

Célestin Freinet a créé en 1925 la « méthode naturelle ». Fondée sur le processus du tâtonnement expérimental et les interactions entre l'individu et le groupe, elle s'appuie sur les intérêts réels de l'enfant et lui permet de mettre en œuvre simultanément toutes les approches qui lui sont nécessaires : syllabique, globale, corporelle, sociale... La méthode naturelle n'utilise pas de manuel, mais les écrits des enfants eux-mêmes, riches de sens pour eux.

[modifier] Autres méthodes

Il existe d'autres méthodes, utilisées en particulier pour la rééducation :

  • La méthode « phonétique et gestuelle » de Suzanne Borel-Maisonny pour la rééducation des sourds et malentendants ainsi que des enfants souffrant de troubles du langage.
  • La méthode Bordesoules, créée 1961 par Roger-Henry Bordesoules pour lutter contre la dyslexie. Les lettres deviennent des idéogrammes, chargés de sens, qui s'impriment dans la mémoire et déjouent l'esprit trop logique qui souvent fait obstacle à l'apprentissage du code arbitraire.
  • La démarche Ani-mot-lire de Marie-Joëlle Bouchard décrit la marche à suivre et les outils utilisables en cycle 2 pour découvrir ensemble le fonctionnement du code et la compréhension de l'écrit sur les supports vrais que sont les livres de la littérature enfantine. C'est une "éducation à la lecture" qui permet de développer les compétences (combinaisons de connaissances, capacités et attitudes) dans les quatre domaines : du langage, du code, de la culture et des échanges sociaux[6].

[modifier] Perfectionnement et vitesse de lecture

De nombreuses études établissent que le temps consacré à lire par l'enfant est un déterminant essentiel du niveau de lecture. Or, ce dernier influence positivement le premier en retour par le biais du développement de l'intérêt pour la lecture. De fait, l'écart entre les pratiques ou les représentations de la lecture se creuse très facilement entre les jeunes qui lisent et ceux qui ne lisent pas, les premiers pouvant être confrontés à 5 millions de mots par an, les seconds à moins de 10 000. Les milieux familial et scolaire ont de ce point de vue un rôle fondamental à jouer en tant que déclencheurs possibles de la lecture précoce des enfants.

L'écart qui se creuserait inéluctablement est appelé Effet Matthieu.

[modifier] Vitesse de lecture en fonction de l'âge en mots par minute (WPM)

Vitesse de lecture en fonction de l'âge en WPM (words per minute)
Vitesse de lecture en fonction de l'âge en WPM (words per minute)

Les résultats de Lefavrais (1967, test de l'alouette) se rapportent à la lecture à voix haute tandis que les autres résultats en allemand et en anglais se rapportent à la lecture silencieuse. Les resultats de Taylor sont plus elevés parce que les élèves ont du passer un test de compréhension et les résultats avec une compréhension insuffisante du texte ne sont pas contenus dans la statistique.



La vitesse de lecture est le résultat de l’équilibre entre la discrimination et la généralisation visuelles.

La vitesse de lecture dépend de la perception globale des mots entiers - s’il n y a pas de mots inconnus.

Les mots inconnus demandent une analyse par le système fovéal: lettre par lettre ou syllabe par syllabe ou mot par mot (pour les mots composés).

Si la vitesse de lecture ne dépasse pas les 150 mots par minute (WPM) il est plus facile de se faire lire le texte que de lire soi-même.

C’est la barrière importante à passer pour devenir un bon lecteur.[7]

[modifier] Voir aussi

Conférence principale: Journée de formation à Sion de l' ICT-VS.2005 "Les difficultés de la lecture".Fichier pdf de la conférence

[modifier] Articles connexes

[modifier] Notes

  1. Circulaire du ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, n°2006-003, publiée au Bulletin officiel de l'Éducation nationale du 03/01/06
  2. Arrêté du du ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche du 24/03/06 publié au Journal officiel du 30/03/06
  3. Lelouch Bernard, Christian Blier, Objectif lire : guide de lectures CP, Delagrave, coll. « Objectif lire », 1986 (ISBN 220600349X)
  4. Voir à ce sujet Marc le Bris, Et vos enfants ne sauront pas lire... ni compter, Stock, 2004.
  5. Jean-Paul Brighelli, La Fabrique du crétin : la mort programmée de l'école, Jean-Claude Gawsewitch Editeur, 2005 (ISBN 9782350130354)
  6. Ani-mot-lire
  7. Hans-Werner Hunziker, (2006) Im Auge des Lesers foveale und periphere Wahrnehmung: vom Buchstabieren zur Lesefreude ISBN 978-3-7266-0068-6

[modifier] Bibliographie

  • (en) M.J. Adams, Beginning to read : Thinking and learning about print, MIT Press, Cambridge, MA, 1990
  • S.L. Carbonnel, P. Gillet, M.-D. Martory, S. Valdois, Approche cognitive des troubles de la lecture et de l'écriture chez l'enfant et l'adulte, éditions Solal, Marseille, 1996
  • J. Ecaille, A. Magnan, L’apprentissage de la lecture, Armand Colin, Paris, 2002
  • M. Fayol, Jean Emile Gombert, P. Lecocq, L. Sprenger-Charolles, D. Zagar, Psychologie Cognitive de la Lecture, PUF, Paris, 1992
  • Jean Emile Gombert, P. Colé, M. Fayol, R. Goigoux, P. Mousty, S. Valdois, Enseigner la lecture au cycle 2, Nathan, Paris, 2000
  • (en) U.C. Goswami, P. Bryant, Phonological skills and learning to read, Lawrence Erlbaum, Hillsdale, NJ, 1990
  • (en) R.M. Joshi, C.L. Leong, B.L.J. Kaczmarek, Eds, Literacy acquisition: the role of phonology, morphology and orthography, IOS Press Ohmsha, Nato Science Series, Washington, DC, 2003
  • J. Morais, L’art de lire, Odile Jacob, Paris, 1994
  • Observatoire National de la Lecture, Apprendre à lire, Odile Jacob / CNDP, Paris, 1998
  • Observatoire National de la Lecture, Maîtriser la lecture, Odile Jacob / CNDP, Paris, 2000
  • L. Rieben, M. Fayol, C. Perfetti, Eds., Des orthographes et leur acquisition, Delachaux et Niestlé, Neuchâtel, Paris, 1997
  • L. Rieben, C. Perfetti, Eds, L’apprenti lecteur. Recherches empiriques et implications pédagogiques, Delachaux et Niestlé, Neuchâtel, Paris, 1989
  • L. Srenger-Charolles, S. Casalis, Lire - Lecture et écriture : acquisition et troubles du développement, PUF, Paris, 1996
  • J.-P. Terrail, « La syllabique est-elle réactionnaire ? », dans Revue du Mauss, no  28 (2006) [lire en ligne]
  • Caroe Tisset, Apprendre à lire au cycle 2, Hachette Éducation, 1994
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