Apanage

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Un apanage est une concession de fief, prise sur le domaine royal, faite par le souverain régnant aux fils puînés exclus de la succession.

Le système de l'apanage a fortement influencé la construction territoriale de la France et explique le blason de plusieurs provinces de France. Le mot apanage ou appanage vient du bas-latin ad panem qui signifie « pour donner du pain » (panem).

Sommaire

[modifier] Le système d'apanage

Un apanage est une concession de fief par le souverain à ses plus jeunes fils, alors que le fils aîné devient roi à la mort de son père. C'est une portion du domaine royal donné au fils cadet du roi. L'apanage revient à la Couronne lorsqu'il n'y a plus d'héritier mâle, selon un arrêt du Parlement de 1283[1]. Les apanages ont été considérés comme la part d'héritage transmise aux plus jeunes fils. Ces terres ne pouvaient être vendues, ni hypothéquées, ni employées comme dot, et devaient revenir au domaine royal à l'extinction de la lignée princière. Les filles étaient exclues du système apanagiste.

Le système d'apanage a été utilisé pour éviter les révoltes des fils cadets, qui se trouvaient sans héritage, tout en évitant un affaiblissement du royaume.

En effet, selon la coutume franque, l'héritage se fait par partage entre les fils survivants. Le royaume étant considéré comme domaine familial, plusieurs partages ont donc eu lieu sous les Mérovingiens (le premier dès la mort de Clovis en 511), et plus tard les Carolingiens, dont le traité de Verdun de 843 qui a donné naissance à des territoires indépendants.

Les conséquences de cette méthode (démembrement du royaume, guerres civiles, luttes entre héritiers...) ont conduit à l'adoption du système de l'apanage, qui a l'avantage de détourner les fils puînés de prétentions sur la couronne, qui va à l'aîné. De plus, à terme, le système apanagiste garantit l’unité du domaine royal. Le premier roi qui créa un apanage fut Henri Ier qui, en 1032, donna la Bourgogne à son frère Robert Ier, dont la descendance conserve le duché jusqu'en 1361 (extinction de la première Maison capétienne de Bourgogne). Louis VIII et Louis IX créent aussi des apanages. Ce sont les rois de la dynastie de Valois, en particulier Jean II le Bon, qui usent le plus largement du système des apanages pour doter leurs fils cadets (dont le plus jeune fils de Jean II le Bon, Philippe le Hardi, qui fonde ainsi la seconde Maison capétienne de Bourgogne en 1364).


Cependant, les provinces concédées en apanage avaient tendance à devenir indépendantes de fait (par exemple le duché de Bourgogne) et l'autorité du roi n'y était reconnue qu'avec peine. Théoriquement, les apanages pouvaient être réincorporés dans le domaine royal mais seulement si le dernier seigneur n'avait aucun héritier masculin (même avant Philippe IV le Bel et, a fortiori, après). Il y a, au-dessus de la volonté du souverain français, un corpus de lois fondamentales du royaume auxquelles il ne peut déroger. Ainsi, même s'il omet volontairement de préciser qu'un apanage est constitué pour les hoirs mâles du premier titulaire, le roi ne peut empêcher que cet apanage est, effectivement, constitué seulement jusqu'à extinction de la lignée mâle; Autre exemple de Loi Fondamentale du Royaume, la succession au Trône. Elle est réglée car la Couronne est indisponible. Ce n'est pas parce que Charles VI "désigne" Henry V de Lancastre comme héritier que Charles VII cesse d'être juridiquement le dauphin de France et qu'il sera, à la mort de son père, le seul Roi de France légitime. C'est pourquoi, en dépit de l'oubli (volontaire ou non) de Jean II le Bon de la masculinité pour le duché de Bourgogne, cet apanage s'éteint en 1477 et fait retour au domaine royal sans contestation possible par Marie de Bourgogne, fille de Charles le Téméraire.

Les rois ont tenté autant que possible de se débarrasser des apanages les plus puissants : par exemple, François Ier confisqua le Bourbonnais en 1531, le dernier apanage d'importance, à l'occasion de la trahison du connétable de Bourbon. À partir de Louis XII l'accession au trône de princes apanagistes (Louis XII, François Ier et Henri IV) permet le retour à la couronne de grands fiefs constitués au cours du Moyen Âge.

L'article 1 de l'Édit de Moulins (1566) déclare que le domaine royal (défini dans l'article 2 en tant que tout domaine contrôlé par la couronne pendant plus de 10 années) ne pouvait pas être aliéné, excepté dans deux cas : par l'enclenchement, en cas d'urgence financière, avec une option perpétuelle pour racheter le domaine ; et pour former un apanage, qui doit retourner à la couronne à l'extinction de la ligne masculine en son état original. L'apanagiste ne peut donc pas se séparer de son apanage de quelque façon.

Après Charles V, une distinction claire doit être faite entre les titres donnés comme noms aux enfants de France, et les apanages réels. À leur naissance les princes français recevaient un titre indépendamment d'un apanage de fiefs. Ainsi, le duc d'Anjou, petit-fils de Louis XIV, n'a jamais possédé l'Anjou et n'a jamais reçu un quelconque revenu de cette province. Le roi attendait que le prince ait atteint l'âge adulte et ait été sur le point de se marier avant de doter sa maison d'un apanage. Le but de l'apanage était alors de lui fournir un revenu suffisant pour tenir son rang. Le fief donné dans l'apanage pouvait ou non être celui correspondant au titre nominal du prince. Seulement sept apanages ont été donnés de 1515 à 1789.

Les apanages ont été supprimés en 1792 avant la proclamation de la République. Les plus jeunes princes devaient désormais recevoir une allocation mais aucun territoire. Les apanages ont été rétablis par Napoléon Bonaparte et confirmés par le roi Louis XVIII. Le dernier des apanages, l'Orléanais, fut réincorporé à la couronne de la France quand le duc d'Orléans, Louis-Philippe Ier,devint roi des Français en 1830.

[modifier] Créations d'apanages

[modifier] Autre sens

Le mot apanage est encore employé en français mais dans un sens non historique : « avoir l'apanage de quelque chose » est utilisé, souvent dans un sens ironique et négatif, pour remettre en cause la possession exclusive de quelque chose. Par exemple « Les vaches n'ont pas l'apanage du prion ».

[modifier] Notes

  1. Robert Favreau, in Jean Combes (dir.), Histoire du Poitou et des Pays charentais : Deux-Sèvres, Vienne, Charente, Charente-Maritime, Clermont-Ferrand, Éditions Gérard Tisserand, 2001, ISBN 2-84494-084-6, p 182