Anselm Kiefer

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Anselm Kiefer
Naissance 8 mars 1945
Donaueschingen Allemagne Allemagne
Nationalité allemande
Activité(s) Artiste peintre, sculpteur
Formation Littérature et linguistique puis aux Beaux-Arts de Düsseldorf
Maître Joseph Beuys
Influencé par Joseph Beuys

Anselm Kiefer, né le 8 mars 1945 à Donaueschingen, est un artiste plasticien contemporain allemand qui vit et travaille en France depuis 1993.

Sommaire

[modifier] Biographie

Anselm Kiefer nait sous les bombardements et grandit au milieu des ruines, dans la région frontalière du lac de Constance et de la Forêt-Noire aux confins de la Suisse, l'Autriche et surtout de la France, dont la culture l'influença dès lors[1]. Il a tout d'abord étudié le droit, la littérature et la linguistique, avant de s'orienter vers l'art en fréquentant en 1966 les académies de Fribourg-en-Brisgau, Karlsruhe et Düsseldorf[2]. En 1969 il se rend célèbre dans le milieu artistique en se prenant en photo, faisant le salut nazi dans de grandes villes d'Europe. Sa volonté est de réveiller les consciences en affirmant que le nazisme n'est pas mort mais que le sujet reste occulté : « Étudiant en droit j'avais des professeurs brillants et fascistes. À l'école le sujet était évoqué pendant deux semaines. À la maison on ne l'évoquait pas ». Il étudia également de 1970 à 1972 avec Joseph Beuys à la Kunstakademie de Düsseldorf, et devient un des plus importants artistes allemands de l'après-guerre.

Dans les années 1980, Kieffer travaillait à Buchen dans le Bade-Wurtemberg. Depuis 1993 Anselm Kiefer habite et travaille en France à Barjac (Gard), où il a transformé une friche industrielle en un atelier de 35 hectares, appelé La Ribaute.

[modifier] Son travail

Ses toiles et plus généralement ses œuvres, saturées de matière (sable, terre, strates de plomb que Kiefer appelle "livres", suie, salive, craie, cheveux, cendre, matériaux de ruine et de rebut), évoquent la catastrophe et les destructions de la Seconde Guerre mondiale, en particulier la Shoah. Le choix des matières exprime également sa sensibilité à la couleur : « Plus vous restez devant mes tableaux, plus vous découvrez les couleurs. Au premier coup d'œil, on a l'impression que mes tableaux sont gris mais en faisant plus attention, on remarque que je travaille avec la matière qui apporte la couleur »[3]. L'esprit qui se trouve dans la matière a également son importance. La suie par exemple est la résultante d'une matière initiale différente qui a subi, grâce au feu, de nombreuses transformations. La suie est donc l'étape finale et définitive d'une autre matière[3]. Dans certaines toiles, l'artiste superpose à cette représentation du désastre un symbole de l'art ou du génie : ainsi dans Icarus, les sables du Brandebourg (1981), c'est la forme d'une aile peinte à l'huile. Il est également auteur de sculptures monumentales en forme de tours ou de maisons, à l'intérieur desquelles sont disposés des toiles et des objets-sculptures.

Convaincu de la nécessité de revisiter l'identité allemande de l'après-guerre, sans la renier, il questionne ses grands récits (notamment la Chanson des Nibelungen et Parsifal), ses événements historiques fondateurs (comme la bataille d'Arminius ou le tombeau d'Alaric Ier), ses grandes figures philosophiques et littéraires, ainsi que l'exploitation qui en fut faite par le nazisme[2]. La poésie est une autre de ses sources d'inspiration majeures, qu'il utilise autant en référence qu'en matériau même de ses créations plastiques en inscrivant fréquemment des fragments de textes à même la surface de la toile ou de la sculpture. Depuis les années 1990, il a dédié plusieurs séries d'œuvres aux poètes Paul Celan, Ingeborg Bachmann et Velimir Khlebnikov, trois auteurs ayant entrepris de dresser le langage contre l'oubli et la barbarie. Il est également très influencé par le mysticisme de Robert Fludd et les écrits de la Kabbale.

Ses œuvres font partie des collections des plus grands musées du monde. Le 24 octobre 2007 trois de ses œuvres (Anthanor une peinture de 11 mètres de haut, Danaë et Hortus conclusus, deux sculptures) entrent dans les collections pérennes du musée du Louvre[4], une première pour l'institution depuis 1954[5],[6]. Il a inauguré le programme Monumenta du Grand Palais à Paris en 2007, avec un travail qui rend hommage notamment aux poètes Paul Celan et Ingeborg Bachmann, mais aussi à Céline.

[modifier] Formellement

Lors des expositions Anselm Kiefer conçoit des environnements qui mêlent constructions, sculptures, tableaux, et des projets monumentaux. Ces dernières années, dans ces environnements se trouvent ce qu'Anselm Kiefer appelle des « maisons », qui sont espaces-sculptures dédiés à la présentation de peintures et sculptures[7]. Sensible au cadre de présentation de sa peinture, il refuse qu'elles soient présentes dans les foires[7] ; il conçoit depuis 1993 des bâtiments autour d'ensembles d'œuvres, les collectionneurs acquérant ainsi l'ensemble. Ces « maisons » ont généralement la forme de pavillons formellement sobres, dont l'extérieur est couvert de tôle ondulée et l'intérieur présente des murs blancs semblables aux cimaises des musées.

[modifier] Œuvres sélectives

  • 1973: Parsifal, série d'œuvres sur papier.
  • 1988: Melancholia, cendres sur photo sur plomb dans un cadre vitré en acier, 170*230 cm.
  • 1989: Angel of History, sculpture en plomb et autre matériaux.
  • 1995: Les Reines de France, série de tableaux grand format.
  • 1997: Les Ordres de la nuit, au musée Guggenheim de Bilbao.
  • 1998: Sternenfall, tableaux grands formats.
  • 1999: Frauen der Antike, série de sculptures de robes de mariée.
  • 2007: Athanor, peinture dans les collections permanentes du musée du Louvre.

[modifier] Principales expositions individuelles

[modifier] Citations

  • «L'Histoire pour moi est un matériau comme le paysage ou la couleur.»[2]
  • «Pour se connaître soi, il faut connaître son peuple, son histoire... j'ai donc plongé dans l'Histoire, réveillé la mémoire, non pour changer la politique, mais pour me changer moi, et puisé dans les mythes pour exprimer mon émotion. C'était une réalité trop lourde pour être réelle, il fallait passer par le mythe pour la restituer.»
  • «Ma biographie est la biographie de l'Allemagne.»
  • «Le matin avant de commencer à travailler, je vais dans ma bibliothèque. Elle fait soixante mètres de long, cela me permet de déambuler comme au Vatican. Souvent, je trouve un livre dont j'ai besoin, quel qu'en soit le sujet, qu'il s'agisse de mode ou de littérature. C'est très curieux, comme on trouve très souvent ce que l'on cherche. Je pense que nous avons un accès à nos livres qui ne passe pas par l'intellect, qui transite ailleurs que par le cerveau.»
  • «Sans mémoire, il ne peut y avoir d'identité, d'autant que je considère que l'identité remonte bien plus loin dans le temps que notre propre naissance»
  • «Une peinture est toujours une défaite» (interviewé par Frédéric Taddéi, sur Europe 1, le 11 juin 2007)
  • «Quand je finis un tableau ou une sculpture je construis une maison autour, car l'oeuvre doit avoir sa propre peau»
  • «Je vois mes tableaux comme des œuvres qui méritent d'être transformées»

[modifier] Anecdotes

La Cathédrale de Cologne lors des restaurations.
La Cathédrale de Cologne lors des restaurations.
  • Les feuilles de plomb qu'Anselm Kiefer utilise dans ses œuvres (notamment pour la série Fraüen der Antike et celle des Livres) proviennent du toit de la cathédrale de Cologne lors de sa rénovation.

[modifier] Références bibliographiques

[modifier] Notes et références

  1. Anselm Kieffer au Louvre, éditions du Regard, Paris, 2007, (ISBN 978-2-84105-219-6), p.26.
  2. abc Petit dictionnaire des artistes contemporains, Pascale Le Thorel-Daviot, éditions Larousse, Paris, 1996, p.135-136, (ISBN 2-03-511333-4).
  3. ab Interview émission Regardes les hommes changer sur Europe 1
  4. Après une année de discussions, notamment avec le département des arts graphiques du Louvre, ces trois œuvres furent installées dans la colonnade de l'escalier nord, et s'intègrent dans le décor inachevé de Percier et Fontaine datant du XIXe siècle.
  5. Anselm Kieffer au Louvre, éditions du Regard, Paris, 2007, (ISBN 978-2-84105-219-6), p.9.
  6. Anselm Kiefer entre définitivement au Louvre, dans Le Monde du 24 octobre 2007.
  7. ab Pluie d'étoiles au Grand Palais, Art press nº334, mai 2007, p.28-32.

[modifier] Liens externes