Île Clipperton

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Clipperton ou île de La Passion
Carte de l'Île de Clipperton
Localisation de Clipperton
Administration
Statut politique Domaine public de l'État français
Capitale Aucune habitation
Gouvernement
- Administrateur

le ministre de l’Outre-Mer
Géographie
Superficie 9 km² dont lagon : 7 km²
Démographie
Population  (2006) 0 hab.
Densité 0 hab./km²
Langues Français
Autres
Fuseau horaire UTC -8

10°18′N 109°13′W / 10.3, -109.217 L'Île Clipperton – baptisée « île de la Passion » par les Français – est une possession française composée par un atoll situé dans l'océan Pacifique, à 12 000 kilomètres de la France et 1 280 kilomètres à l'ouest du Mexique.

Sommaire

[modifier] Géographie

Carte de l’île.
Carte de l’île.
L'île de Clipperton vu par le satellite SPOT.
L'île de Clipperton vu par le satellite SPOT.


[modifier] Une possession très isolée

Clipperton – de son nom de baptême français « île de la Passion » – est le plus petit territoire que possède la France aux confins du Pacifique. Il se situe à 1 280 kilomètres de la première côte continentale, Acapulco au Mexique, et à 945 kilomètres de la première terre, celle de la petite île de Soccoro de l’archipel mexicain des Revillagigedo au nord, tandis que Nuku Hiva, aux îles Marquises, terre française la plus proche, est à 4 018 kilomètres au sud-ouest. L’archipel des Hawaii est à 4 930 kilomètres.

[modifier] Un atoll corallien

Seul atoll corallien de cette partie de l'Océan Pacifique, Clipperton a une forme sub-circulaire de 12 kilomètres de circonférence. La superficie des terres émergées n'est que de 1,7 kilomètres carrés et le point culminant est un rocher volcanique de 29 mètres d’altitude, qui émerge du lagon.

Le sol de l'atoll est constitué de graviers et sables coralliens souvent cimentés de guano. La houle importante dans cette région rend tout débarquement périlleux.

[modifier] Le lagon

Ouvert à l’origine par deux passes (au sud-est et au nord-est), le lagon (7,2 kilomètres carrés) s’est fermé entre 1840 et 1858, probablement du fait de tempêtes. L’isolement des eaux du lagon de l’océan a entraîné la mort des coraux et une eutrophisation du milieu, qui forme un écosystème très inhabituel.

L’évaporation des eaux du lagon est inférieure aux précipitations ; l’eau y est donc douce en surface, salée et légèrement acide à partir de 6 mètres de profondeur. Il présente plusieurs fosses de plus de 20 mètres, sa profondeur maximale connue étant de 90 mètres au Trou sans fond. Les tentatives d’exploration de ce puits sous-marin (peut-être une ancienne cheminée volcanique) par le commandant Cousteau ont été empêchées par une trop forte concentration d’hydrogène sulfuré.

[modifier] Histoire

Une palmeraie à Clipperton.
Une palmeraie à Clipperton.

[modifier] Une ancienne possession espagnole ?

Découverte par Fernand de Magellan pour la Couronne espagnole en 1521 et baptisée Isla Médanos, elle est apparue dans les cartes de la Nouvelle-Espagne depuis le XVIe siècle. Les intérêts colonialistes de la France sur le Pacifique ont néanmoins exigé une deuxième découverte deux siècles plus tard, sous prétexte que l'île était inconnue, ce qui paraît fort improbable étant donné que l'île se trouve sur la route entre le Mexique et les Philippines, qui faisaient aussi partie de l'Empire espagnol.

[modifier] Une redécouverte française ?

L'île fut donc « redécouverte » le Vendredi Saint 2 avril 1711 par les Français Martin de Chassiron et Michel du Bocage, commandants des frégates La Découverte et La Princesse, qui en dressèrent la première carte. En souvenir de cette journée, ils la baptisèrent île de la Passion.

Le nom de Clipperton lui vient du flibustier et naturaliste anglais John Clipperton (ou Clippington) qui, pour certains, aurait croisé au large de cette île, et, pour d'autres, y aurait même débarqué en 1704 après avoir fait sécession et quitté l'expédition de William Dampier. Bien qu'aucune trace écrite de son passage n'ait été retrouvée, l'histoire retint le nom de Clipperton sans que l'on sache vraiment pourquoi, sans doute à cause d'une de ces légendes de trésor.

[modifier] Un intérêt colonial assez tardif

Intéressée non pas par le phosphate de l'île mais par sa position stratégique dans le Pacifique face à l'isthme de Panama dans la perspective d'un percement futur, la France en prit possession le 17 novembre 1858 officiellement par publication dans divers journaux, sans qu'aucun État ne vienne contester cette possession. Le projet était de faire de l'île un port de relâche pour les bateaux à vapeur, la construction d'un phare sur le « Rocher » (point culminant de l'île) qui serait visible à 30 miles nautiques, le percement de la passe près du « Rocher ».

[modifier] La tentative d'annexion par le Mexique

La découverte d'une grande quantité de guano sur l'île incita le Mexique, plus proche, à revendiquer Clipperton et à l'occuper dès 1897. L'exploitation du guano fut concédé à la Pacific Phosphate Company. On a aussi parlé, en 1895-1896, d'une occupation de l'île par les États-Unis mais sans suite. Par suite de la révolution mexicaine, les bateaux chargés d'approvisionner l'île deux fois par an ne vinrent plus.

En 1914, le gouvernement du Mexique oublia la garnison de soldats avec femmes et enfants installés sur place depuis 1906. Ils y moururent du scorbut et de naufrages, à l'exception de trois femmes et huit enfants qui furent sauvés par le navire américain Yorktown le 18 juillet 1917. C'est l'histoire des célèbres « Oubliés de Clipperton ». On retrouva sur l'île le gardien du phare, mort la veille assassiné par les femmes dont il avait abusé pendant plus de deux ans, selon les dires des survivantes.

[modifier] La souveraineté française reconnue

Bien que l'îlot n'ait jamais eu de population française, la souveraineté française fut reconnue le 28 janvier 1931 par l'arbitrage de la Cour internationale et du roi Victor-Emmanuel III d'Italie (le Mexique reconnut définitivement la souveraineté française sur l'île en 1959[1]).

En 1944, les États-Unis occupèrent l'île d'autorité. Ils ouvrirent une passe dans la couronne (qu'ils refermèrent en partant) et nivelèrent une piste d'aviation toujours praticable. Suite à une protestation de la France (qui venait d'être libérée par les propres États-Unis) en janvier 1945 par le ministre français des Affaires étrangères Georges Bidault, les États-Unis rétrocédèrent le territoire à la France le 21 mars 1945.

[modifier] L'époque des expéditions scientifiques

  • De 1966 à 1969 se succédèrent par périodes de quatre mois les « Missions Bougainville » de la marine française qui réalisèrent des études très détaillées, notamment de l'hydrobiologie du lagon et de la faune.
  • L'expédition franco-mexicane, Surpaclip s'y rendit en novembre 1997 et fit un état des lieux. Ce fut la première fois que les Mexicains y retournèrent officiellement depuis le drame des années 1914-1917.
  • C'est en l'an 2000 que des rats sont accidentellement introduits sur l'île, à la suite d'un naufrage. Les dégâts sur les écosystèmes sont considérables.

[modifier] Administration

Depuis l'adoption en 1982, de la Convention internationale sur le droit de la mer, l'îlot confère à la France le droit de contrôler et d'exploiter tout autour de l'île une zone maritime de 435 612 km². L'Académie des sciences d'outre-mer, dès 1981, a recommandé la mise en place sur l'atoll d'une base de pêche, avec réouverture du lagon et construction d'une piste aérienne.

Bien qu'ayant été sous la juridiction des Établissements français d'Océanie de 1936 puis de la Polynésie française jusqu'au 18 mars 1986, l'île relève aujourd'hui du domaine public maritime et est inscrite au tableau des propriétés domaniales de l'État. Elle est, à ce titre, sous l'autorité du Premier ministre, autorité qu'il délégue au Haut Commissaire de la République de Polynésie française, représentant de l'État, à qui il appartenait d'accorder des autorisations aux particuliers désirant aborder l'atoll ou y obtenir des concessions d'exploitation.

De fait, cette possession française ne fait pas formellement partie des TOM. Depuis février 2007, Clipperton est directement administrée par le ministre de l’Outre-Mer. Depuis la loi no 2007-224 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer, Clipperton est soumise au titre II de la loi no 55-1052 du 6 août 1955 portant statut des Terres australes et antarctiques françaises et de l'île de Clipperton.

Régulièrement, au moins une fois par an, un bâtiment de la Marine nationale française visite l'île pour remplacer la plaque commémorative et le drapeau national très souvent saccagés par les contrebandiers, les pêcheurs et les chercheurs de trésors.

L'île dispose d'un code postal officiel : 98799

[modifier] Ecosystèmes

A la suite d'un naufrage daté de l'an 2000, des rats ont été introduits dans cet écosystème qui s'en est trouvé profondément bouleversé. La flore est très rare, constituant essentiellement en quelques bouquets de cocotiers.

Malgré des ressources limitées la faune comprend de nombreux individus vivant cependant sur l’île:

  • Les crabes:
    • 12 millions de crabes orange de la famille des Gecarcinadae
  • Les colonies d'oiseaux sont nombreuses.
    • La plus grande colonie de fous masqués au monde (110 000 individus dénombrés en 1997 et 2001 par C. Jost et confirmé en 2005).

Les écosystèmes de Clipperton (les bosquets, les sols dénudés, le lagon et les fonds marins proches) sont également régulièrement recouverts par des déchets dérivants, qui forment une pollution inquiétante.

Les requins abondent dans les eaux voisines.

[modifier] Des ressources intérieures inexistantes

Le phosphate a été exploité de 1898 à 1917. Les ressources de guano sont également épuisées. Aujourd'hui inhabité, l'îlot n'abrite même plus de station météorologique.

[modifier] Une ZEE très vaste

L'intérêt actuel réside dans la zone économique exclusive française de 435 612 km² qui l'entoure, permettant à la France d'être membre de l'ITTC (Inter Tropical Tuna Fish Commissions) du Pacifique nord et de pouvoir pêcher le thon.

La mission océanographique mexicano-française SURPACLIP a aussi découvert en 1997 la présence de nodules polymétalliques riches en nickel et en cuivre.

[modifier] Anecdotes

On raconte que l'Espagne aurait cartographié une île de La Passion sous une fausse latitude et une fausse longitude. Elle resterait ainsi propriétaire d'une île Clipperton fantôme.

Certaines encyclopédies indiqueraient toujours que l'île Clipperton a une cinquantaine d'habitants. Un article jamais mis à jour depuis 1917.

Le journaliste Gabriel Macé a souvent parlé de Clipperton dans Le Canard enchaîné. Il est du reste devenu un spécialiste de l'îlot.

[modifier] Notes

  1. Rapport du Sénat : mission effectuée au Mexique du 20 au 28 février 1999.
  2. Jean-Louis Etienne: cap sur Clipperton, Fabrice Nodé-Langlois, Le Figaro, 13/11/04

[modifier] Filmographie

Clipperton, l'île de La Passion, documentaire de C. Jost, Éditions CDP Nouméa/SCEREN, Paris, 2004 [1]

    • Clipperton, commenté par Jean-Louis Étienne, documentaire lié au savoir scientifique, réalisé par un groupe d'étudiant / Toulon, 2005 ([2]).
    • La isla de la pasíon, film mexicain de 1942 (IMDB).
    • Isla de la pasión, téléfilm mexicain de 2004 (IMDB).
    • Clipperton, l'île mystérieuse, film documentaire réalisé par Stéphane Dugast et Xavier Gasselin, 2004 [3]

[modifier] Bibliographie

Anne Vallaeys ; Agua verde

    • Jost C., Risques environnementaux et enjeux à Clipperton, in Cybergéo, revue européenne de géographie
    • Juet H., Clipperton, l'île Passion, Éditions Thélès, Paris, 258 p., 2004
    • Jean-Hugues Lime, Le Roi de Clipperton, roman, Le Cherche-Midi éditeur, 2002 ; ISBN 2-86274-947-8 pour la 1re édition.
    • André Rossfelder, Tropique du crabe - Clipperton, l'île tragique, roman, éd. Albin Michel, 1976 ; ISBN 2-226-00284-7.
    • Laura Restrepo, La isla de la pasíon, roman ; ISBN 968-406-317-2 ; en espagnol (pas de traduction française disponible)

[modifier] Liens externes

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