Tibétains

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Jeunes moines bouddhistes tibétains de l'école Gelug du Monastère de Drépung au Tibet
Jeunes moines bouddhistes tibétains de l'école Gelug du Monastère de Drépung au Tibet

Les Tibétains forment un peuple d'Asie vivant dans l'actuelle région autonome du Tibet et dans les provinces chinoises voisines. Ils composent une des 56 nationalités de Chine. Environ 5 % des Tibétains vivent en exil[1].

Historiquement, le Tibet comprenait trois régions principales : la région de Ü-Tsang correspondant à la plus grande partie de la région autonome du Tibet actuelle, l'Amdo incorporé à la province chinoise du Qinghai[2] et le Kham dont la partie orientale est incorporée à la province chinoise du Sichuan[3], sa partie occidentale étant rattachée à la région autonome.

Sommaire

Démographie

Chiffres de population

L'évolution démographique tibétaine entre 1953 et 2000,
L'évolution démographique tibétaine entre 1953 et 2000[4],[5]

En 2000, le nombre de Tibétains dans l'ensemble de ces régions était d'environ 5 400 000 selon Bureau d'État des Statistiques[6]. Le gouvernement tibétain en exil à Dharamsala en Inde donne une estimation proche de ce chiffre de 6 millions de Tibétains vivant actuellement au Tibet. Il faut ajouter qu'environ 200 000 Tibétains ont fui le Tibet ou vivent actuellement en exil, principalement en Inde mais aussi au Népal, au Bhoutan, en Europe et aux États-Unis.

La population tibétaine a subi une baisse importante entre les recensements de 1953 et 1964 (de 2,77 à 2,50 millions), comme l'indiquent les chiffres de source chinoise[4],[5]. Les causes de cette diminution restent toutefois à déterminer précisément[7],[8].

Conséquences de la présence chinoise

La prise de contrôle et la présence chinoises au Tibet depuis les années 1950 ont entraîné un nombre important de victimes parmi la population tibétaine, les causes principales en étant les combats, la répression et les famines liées au « Grand bond en avant ». Bien qu'il n'existe pas de consensus sur le chiffrage, leur nombre réel est très probablement de l'ordre de plusieurs centaines de milliers de personnes[9].

Le gouvernement tibétain en exil estime, à la suite d'enquêtes et du recueil de témoignages, que 1 200 000 Tibétains sont morts directement ou indirectement en conséquence de l'occupation du Tibet par l'armée chinoise entre 1949 et 1979[10],[11],[12],[13],[14][15]. Cependant, cette évaluation est remise en cause par certains qui estiment les chiffres exagérés[16].

La Commission internationale des juristes a qualifié dans un rapport de 1959 les massacres perpétrés au Tibet par les autorités chinoises de génocide[17]. Le 11 janvier 2006, la Cour suprême d'Espagne a annoncé qu'elle allait instruire une enquête concernant l'implication de sept anciens dirigeants chinois, entre autres l'ancien président Jiang Zemin et l'ancien Premier ministre Li Peng, dans un génocide au Tibet. Cette instruction est la conséquence d'un arrêté de la Cour constitutionnelle espagnole du 26 décembre 2005 qui autorise le traitement des plaintes pour génocide, même si elles n'impliquent pas de nationaux espagnols[18].

Réfugiés tibétains à Dharamsala, en Inde
Réfugiés tibétains à Dharamsala, en Inde

Selon le gouvernement tibétain en exil, il existerait une politique de transfert de population au Tibet, et un programme d’avortement et de stérilisation forcé des femmes tibétaines[19],[20]. Des dizaines de milliers de femmes tibétaines auraient été contraintes par la force à épouser des colons chinois[21].

Encore aujourd'hui, tous les ans, environ 2 500 Tibétains fuient, au péril de leur vie[22],[23], en traversant l'Himalaya vers le Népal et l'Inde. Environ un tiers de ces réfugiés sont des enfants qui viennent y chercher une éducation en langue tibétaine.

Politique de l'enfant unique au Tibet

Depuis 1970, la politique de planing familial chinoise contraint les Hans et les couples mixtes han et minorité à une limitation du nombre d'enfants. Les minorités tibétaine (Zang, Naxi, Bai, Mongole, Moso,...) comme les autres minorités nationales n'étant pas concernés par cette loi. C'est en 1983 qu'une politique de planning familial destinée aux Tibétains a été instituée pour la première fois, d'abord avec une limitation à deux enfants dans les zones urbaines, puis en 1984 avec une limitation à trois enfants dans les zones rurales, à l'exception des zones frontalières. Cependant, les mesures prévues ont été assez peu mises en pratique, ce qui a conduit, après le recensement de 1990, à une campagne destinée à en renforcer l'application, principalement dans les zones rurales. C'est de cette époque que date la mise en œuvre du système des amendes, chaque autorité locale étant officiellement maître de son application. Un système de quotas de naissances a également été institué ; ces quotas, définis par le gouvernement de Lhassa, étaient répartis entre les différentes entités administratives[24].

Les modalités réelles d'application de cette politique font l'objet de diverses analyses :

  • Selon l'analyse de Kate Saunders, journaliste spécialiste du Tibet et de la Chine, analyste à Tibet Information Network,[25] les fonctionnaires tibétaines n'auraient droit qu'à un seul enfant ; les familles ayant trois enfants ou plus seraient soumises à diverses sanctions : une amende de 1 800 yuans par an (montant équivalent au revenu annuel d'un fonctionnaire bien payé), la perte d'allocations ou d'avantages liés à l'emploi, et même l'avortement forcé ou la stérilisation. En outre, les enfants surnuméraires ne pourraient pas obtenir de permis de travail, et seraient exclus des systèmes d'éducation et de soins de santé[26],[27]. Un document de Campaign Free Tibet intitulé Children of Despair[28] datant de 1992 et présenté en 1996 à la commission des Nations Unies sur le droits des enfants, affirme que la Chine aurait pratiqué une véritable campagne de génocide au Tibet, notamment par le biais d'un contrôle forcé des naissances[29]. Pourtant, d'après un rapport de 1994 du Tibet Information Network, si des cas de stérilisations forcés ont bien été rapportés, ils resteraient peu nombreux et pourraient n'être que des actes isolés, sans rapport avec le pouvoir central[30].
  • En revanche, selon Gu Baochang, un officiel du gouvernement chinois, au Tibet, si les fonctionnaires Han n'ont droit qu'à un seul enfant, les fonctionnaires tibétaines pourraient en avoir deux[31]. Une étude du «The Center For Research on Tibet » de l'Université américaine Case Western Reserve[32], et reprise par différents sites chinois[33], précise que l'application de la politique de planning familial resterait assez souple au Tibet, et qu'aucun avortement forcé n'y serait pratiqué[34]. Cette étude a été commentée par les organisations pro-tibétaines[35].

Notes et références

  1. Environ 200 000 Tibétains vivent en exil : 125 000 Tibétains en exil en Inde, 60 000 au Népal, 4 000 au Bhoutan, et plusieurs milliers en Europes et aux États-Unis en:Tibetans, en:Tibetan American
  2. Une petite partie de l'Amdo est rattachée à la province du Gansu
  3. Une petite partie du Kham est rattachée à la province du Yunnan
  4. ab (zh) 1950—1990年藏族人口规模变动及其地区差异研究 (les chiffres de la RAT en 1953 et 1964 présentés dans cette étude correspondent à des évaluations, tous les autres chiffres proviennent de recensements)
  5. ab Department of Population, Social, Science and Technology Statistics of the National Bureau of Statistics of China (国家统计局人口和社会科技统计司) and Department of Economic Development of the State Ethnic Affairs Commission of China (国家民族事务委员会经济发展司), eds. Tabulation on Nationalities of 2000 Population Census of China (《2000年人口普查中国民族人口资料》). 2 vols. Beijing: Nationalities Publishing House (民族出版社), 2003 (ISBN 7-105-05425-5).
  6. 5 416 021 lors du recensement de 2000 : (en)(zh) China Statistical Yearbook 2003, p. 48
  7. « In the official doctrinaire explanation the sharp decline in population, which ran contrary to the national trend, is attributed to the prevalence of feudal serfdom. 'Cruel persecution and oppression of the labouring people by the ruling classes was the root cause for the decline in population. The serfs and slaves had to do corvée labour like beasts of burden. Many of them were prohibited from getting married or having children. The heavy work for women after birth, and epidemic deseases were among the reasons for the shrinking population.' No mention is made, however, of the state of intermittent civil war which has existed since the Chinese entered Tibet in 1951, and the flight of refugees which occured especially after the 1959 uprising. », Changing Population Characteristics in Tibet, 1959 to 1965, Michael Freeberne, Population Studies, Vol. 19, No. 3 (Mar., 1966), p. 317. Extrait en ligne
  8. « The decline in population between 1953 and 1964 can be explained by several factors, including the deaths following the various revolts of the 1950s and that of 1959; the famines of the late 1950s and early 1960s (mainly in the Tibetan areas outside Tibet itself); and continuing decline due to factors similar to those already attributed to the period before 1950 [(the high proportion of males in the monastic order, together with the custom of polyandry; widespread venereal diseases; high infant mortality rates as well as frequent smallpox epidemics and in some places endemic goitre; a declining ecological base; and a violent lifestyle in Kham, then part of the Chinese province of Xikang, at least in the 1930s and 1940s)]. Another major factor is emigration, which accounted for many thousands of people through the 1950s and after and formed the basis of the Dharamsala community [...] », People’s Republic of China: Background paper on the situation of the Tibetan population, A Writenet Report by Professor Colin P. Mackerras, p. 19-20. Consulté le 16 novembre 2007.
  9. (en) Source List and Detailed Death Tolls for the Twentieth Century Hemoclysm, Tibet (1950 et seq.)
  10. Le document chinois Tibetan Population in China: Myths and Facts Re-examined, Yan Hao (Institute of Economic Research, State Department of Planning Commission, Beijing) présente un tableau détaillé avancant le chiffre de 1,278,387 de morts tibétains, page 19 (Table 4 : Distribution of Tibetan deaths directly resulting from China’ s invasion, by causes of death and regions (1949–79)) dont la source indiquée est "l'Office du Tibet, Human Rights, 1984".
  11. La page Human rights sur http://www.tibet.com, le site basé à Londres du gouvernement tibétain en exil, au chapitre "1949-1979: Killings and destructions" on peut lire: « Over 1.2 million Tibetans have died as a direct result of the Chinese invasion and occupation of Tibet. Today, it is hard to come across a Tibetan family that has not had at least one member imprisoned or killed by the Chinese regime. According to Jigme Ngabo, "after the suppressions of 1959 and 1969, almost every family in Tibet has been affected in some way". » et « According to information compiled by the Tibetan Administration in exile, over 1.2 million Tibetans died between 1949 and 1979. » avec un tableau détaillé donnant le chiffre total de 1,207,387 de morts tibétains.
  12. Tendzin Choegyal, le conseiller du Dalai Lama, dans un discours fait en 1999 au Hillsdale’s Center pour un seminaire sur les alternatives constructives, intitulé "Faith and Freedom Around the World" : « More than 1.2 million Tibetans are dead as a result of the Chinese occupation ». Tendzin Choegyal, "The Truth about Tibet" Imprimis (publication of Hillsdale College, Michigan), April 1999. [1]
  13. Compte rendu de l'audition du mardi 17 octobre 2000, Audition du professeur Samdhong Rinpoche, Président du Parlement tibétain en exil
  14. Un dossier du groupe interparlementaire d'amitié liant le Sénat français au Tibet, intitulé "Un tibet pour le XXIe Siècle" , chapitre "2.3. Bilan de l'occupation du Tibet par la Chine" avance : « Massacres et déni des droits individuels : si l'on doit donner une comptabilité des pertes en vies humaines depuis 1949, on estime à plus de 1,3 million le nombre de Tibétains (un cinquième de la population) morts directement ou indirectement du fait de l'occupation ».
  15. MOURIR POUR LHASSA - Un épisode méconnu de la guerre froide
  16. « [...] the death Žfigures provided by the TGIE are exaggerations not sustained by the evidence. », Tibetan Population in China: Myths and Facts Re-examined, Yan Hao (Institute of Economic Research, State Department of Planning Commission, Beijing)
  17. (en)Communiqué de presse de la CIJ de 1959
  18. La justice espagnole se déclare compétente pour statuer sur une plainte pour "génocide contre le peuple tibétain"
  19. Population transfer and control
  20. Women and Forced Birth Control
  21. Tibet: The Killing of a Culture and Its People article de Nano Riley, automne 1996, citant le documentaire SATYA: A Prayer for the Enemy, réalisé par le réalisateur californien Ellen Bruno  : « Using personal testimonies, the film explores the plight of Tibetan nuns, who tell of rape and forced marriage to Chinese immigrants. Once a nun has been raped, she cannot return to the nunnery because she is no longer pure. »
  22. En 2006, la police chinoise de la frontière a tiré sur des Tibétains passant la frontière tibéto-népalaise. Au moins 2 des réfugiés sont morts, dont une jeune nonne de 17 ans : Des Tibétains tués à la frontière du Népal et du Tibet - le camp de base envahi par l'armée chinoise
  23. Blog de Pierre Haski
  24. Fertility and Family Planning in Rural Tibet, Family-planning programs
  25. Biography of Kate Saunders
  26. « Il existe pour chaque région un plan de natalité, c'est-à-dire un quota; une fois celui-ci dépassé, diverses sanctions peuvent être imposées : des pressions psychologiques, de lourdes amendes et d'autres peines, l'obligation d'utiliser des stérilets après la naissance du premier enfant, des sanctions au travail, la perte d'avantages liés à l'emploi ou d'allocations de logement ou de santé, l'avortement forcé ou la stérilisation » Politique de l'Enfant Unique
  27. Birth Control Policies In Tibet
  28. Children of Despair
  29. Page 13 : « 'Children of Despair' leaves no room for doubt that the Chinese governments is implementing a planned policy of cultural genocide in Tibet, despite official Chinese government utterances to the contrary. », Page 7 : « Hopefully the above makes it clear that the Tibetan people are prisoners in their own country as the result of a military occupation which violates the terms of the UN Charter, and that Chinese coercive birth control policies in Tibet spell cultural genocide for the Tibetan people, and objective assisted by an enormous influx of Chinese settlers ».
  30. Tibet Facts 9 : The Quality Baby: Birth Control Policies in Tibet: Discussion of population policies an allegations of forced & abortion. « The 1994 TIN survey argues, however, that the evidence available is not conclusive and does not support the "very serious claim" of coercion. There are few first-hand accounts of forced abortions and sterilisations from women, and so far the extent to which violence, if any, was used in these birth control "blitzes" remains unknown. While the Chinese Government does appear to pressure both Tibetan and Chinese women to have abortions and sterilisations it is not clear to what extent local authorities act on directives from Beijing, or whether certain authorities create their own population policies ».
  31. Politique de l'Enfant Unique
  32. Melvyn C. Goldstein, Ben Jiao, Cynthia M. Beall, et Phuntsog Tsering. Publiée dans The China Journal, No. 47 (Jan., 2002), pp. 19-39. Fertility and Family Planning in Rural Tibet.
  33. Sur www.tibet.cn, www.humanrights-china.org et zt.tibet.cn
  34. Au chapitre Family-planning programs : « Even in areas where births were calculated down to the level of individual women, all who were pregnant were able to give birth regardless of how many children they already had. No formal or informal discussions with villagers about family planning, birth limits or local problems revealed even a hint of forced abortions, despite open complaints about many other aspects of rural life and government rules. »
  35. New Report Disputes Charges of Forced Family Planning in Tibet, 25 décembre, 2001, sur http://www.savetibet.org. « Why such a disparity between the information from activist groups and Goldstein's study? One reason may be that they looked in different places. The Goldstein study focused on rural areas in the TAR. "But," says John Ackerly, of the Washington-based International Campaign for Tibet, "abuses occur mainly in the cities where there are Chinese populations and work units are trying to enforce family-planning policies." Some of the worst incidents are in the large Tibetan areas outside the TAR. The greatest abuses, such as forced sterilization and abortions, are in Qinghai province, especially in counties where Tibetans are a minority ».

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes


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