Sociologie urbaine

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La sociologie urbaine est une branche de la sociologie qui tend à comprendre les rapports d'interaction et de transformation qui existent entre les formes d'organisation de la société et les formes d'aménagement des villes[1].

La première étude sociologique, celle des formes qu'une société prend dans l'espace, a été appelée morphologie sociale par Marcel Mauss, Maurice Halbwachs ou Jean Brunhes; La seconde, celle des formes de la ville avec son habitat, ses monuments, ses décors, et en général tous ses aménagements, s'appelle morphologie urbaine.

La connaissance de la réalité et des possibilités ouvertes par les interactions entre morphologie sociale et morphologie urbaine, permet d'une part de favoriser la vie sociale dans les villes existantes, d'autre part de mieux concevoir les nouveaux ensembles urbains ou architecturaux (programmation). Cette connaissance relève aussi de l'anthropologie sociale appliquée aux espaces habités et à leurs formes, ou anthropologie urbaine.

On appelle par ailleurs sociologie urbaine des enquêtes sociales empiriques[2] qui portent sur les populations établies sur des territoires urbanisés, et qui les abordent par les problèmes qu'elles posent pour l'administration afin d'éviter les conséquences de leur mécontentement.

La différence entre ces deux sortes de sociologie urbaine n'est pas une question de méthode ( toutes deux procèdent par comparaisons à partir de statistiques ou de monographies) mais une question de visée pratique de leurs destinataires: les unes permetttent d'intervenir par l'aménagement architectural et urbain à toutes les échelles (rénovation, transformations, construction, décoration, animation), les autres visent à intervenir par des mesures administratives individuelles (subventions, assistance, information, répression, éducation, éviction) ou collectives (lois, règlements). Les unes ont les visées heuristiques et noblement politiques des sciences sociales et de l'architecture; les autres, qui se présentent actuellement sous le nom de sociologies contemporaines, relèvent des activités bureaucratiques consistant à définir l'intervention de travailleurs sociaux, ou à donner des arguments à un programme éléctoral.

Sommaire

[modifier] Introduction : Qu'est ce que l'urbanisation ?

L'urbanisation est un mouvement historique de transformation des formes de la société que l'on peut définir comme l'augmentation de ceux qui habitent en ville par rapport à l'ensemble de la population. L'urbanisation a déclinée entre le IV et le X siècle, c'est seulement après qu'elle a repris sa croissance avec le mouvement des sauvetés et des bastides.

Le fait marquant de l'époque moderne est la nette accélération des migrations, depuis la première moitié du XIXe, en lien avec la suppression des communautés locales d'habitants et l'industrialisation. L'excédent des campagnes se déverse dans les villes; on parlera dès la fin du XIXe siècle d'exode rural. On assiste au passage d'une société traditionnelle rurale à une société urbaine.

Le fait marquant de l'époque contemporaine est depuis 1918, puis 1945 la concentration des populations dans la périphérie des villes appelées banlieues ou bidonvilles selon les pays. La forme d'établissement n'est plus à proprement parler celle d'une ville avec des maisons et des bâtiments publics alignés pour former des rues et des places, mais une forme intermédiaire entre le territoire rural et urbain que certains auteurs appellent "rurbanisme".

L'urbanisation est donc, depuis quelques décennies, un mouvement historique de désurbanisation de la vie sociale et des formes urbaines.

[modifier] Morphologies sociales

Les études urbaines (Urban Studies en anglais) concentrent leurs analyses principalement sur la distribution des classes sociales, groupes sociaux et des ethnies au sein des espaces urbains et met en évidence une spatialisation de la polysegmentation sociale qui peut être constitutive d'une société urbaine normale dans laquelle les différents quartiers regroupent un type particulier de population (quartier universitaire, quartier des théâtres, quartiers commerçant, quartier d'artisans, etc..), ou au contraire purement ségrégative et aboutir à des phénomène de ghetoïsation positives ou négatives (gated communauties). Le refus par l'urbanisme d'assumer une spécialisation des quartiers d'habitation avec des fonctions clairement définies, comme ce fut le cas avec les programme des villes nouvelles, aboutit à la reconstitution d'une discrimination beaucoup plus problématique. C'est par exemple le cas dans les études de Robert E. Park, de l'école sociologique de Chicago et de Richard Sennett. Pour l'école de Chicago, la ville est envisagée comme un organisme et l'organisation sociale est vue comme une écologie. La ville est donc un laboratoire social.

Les études de sociologie historique portant sur les villes, leurs révolutions et leurs fondations, permettent de rompre non seulement avec toutes les théories technocratiques apparues avec le mot urbanisme, mais aussi avec le bluff technologique de l'industrialisation du batiment et la rationalité financière de la spéculation immobilière, pour comprendre en quoi la principale question de morphologie urbaine est celle de la constitution politique des sociétés, c'est-à-dire ici l'institution préalable d'une polysegmentation sociale à la fois harmonieuse et légitime.

[modifier] Morphologies urbaines

L'étude de la morphologie urbaine, à toutes les échelles depuis les formes d'habitations et plus généralement d'immeubles (Maisons , grands ensembles d'habitation, édifices publics tels que mairies, postes, tribunaux, lycées, théâtes, gares , magasins et supermarchés, églises, etc..) jusqu'aux formes complètes des villes avec l'articulation des quartiers, des rues, des places, des promenades, des monuments, de la campagne environnante, des liaisons avec d'autres villes, est certainement le domaine le plus mal étudié de la sociologie urbaine: elle suppose de quitter l'ordre du discours pour aborder celui des formes, des échelles, des figures, des couleurs, des aspects, des proportions, des symétries, des rytmes, et plus généralement de tout ce qui fait la culture matérielle.

La situation paradoxale du mouvement contemporain de l'urbanisation, c'est-à-dire de populations de plus en plus nombreuses qui vivent en ville, et de la désurbanisation, c'est-à-dire de la disparition des caractéristiques morphologiques qui font la ville (par exemple la proximité, la diversité, la sécurité, l'interconnaissance) est une conséquence de l'évolution de la morphologie urbaine générale, comme la dématérialisation de la communication sociale ou la facilitation des transports.

Un des nombreux problèmes posés par l'idéologie du CIAM est le parti urbanistique du zoning consistant à dissocier les différents types de bâtiments et d'éléments urbains (habitations, ateliers, places, bureaux, jardins, commerces, édifices publics, etc..) et à les concentrer dans des zones urbaines gigantesques et spécialisées (zone commerciale avec tous les supermarchés, zone artisannale, zone agricole, zone administrative, zones industrielle, zone d'habitation, zones de bureaux, zone d'entrepots, cité scolaire, zones de loisirs, etc..) reliées entre elles par des rocades péri-urbaines que les habitants doivent obligatoirement emprunter chaque fois qu'ils doivent changer d'activité, et qu'il faut incessamment augmenter pour absorber un trafic de personnes et de fret qui ne cesse d'augmenter, au fur et à mesure que les zones se concentrent et que tout s'éloigne.

La surface des voies de communication, de dessertes, de transit et de stationnements devient si importante que les villes post-urbaines avec leurs habitations et leurs bureaux empilés sur des dizaines d'étages finissent par avoir une densité en habitants par hectare bien moindre que les villes anciennes ou les cités-jardin avec leurs constructions de deux ou trois étages.

Le « Sony Center » sur la Potsdamer Platz à Berlin en  Allemagne.

Le « Sony Center » sur la Potsdamer Platz à Berlin
en Allemagne Allemagne.

[modifier] Concepts & problématiques

Plusieurs concepts et problématiques intéressent les sociologues de l'urbain.

On peut en résumer le cadre général avec deux principes énoncés par Henri Lefebvre:

  • La ville est une projection au sol des rapports sociaux;
  • Il existe deux catégories de rapports à l'espace, les rapports d'appropriation (tout ce que les gens font pour exprimer leur possession plus ou moins exclusive d'un territoire: construction, décoration, occupation, propreté, barrières réelles ou symboliques, etc..) et les rapports de domination (tous les dispositifs collectifs d'aménagement: règlements d'urbanisme, d'hygiène, de sécurité, projets d'aménagement, normes d'administration, de gestion, de promotion immobilière, police, etc..). La formes de la ville est un compromis permanent entre la multitude des appropriations et la permanence du pouvoir politique.

Comme études descriptives, on peut citer les territorialités et leurs échelles, les formes de sociabilités, de civilités et d'échanges[3], les trajectoires résidentielles, la formation des prix de l'immobilier, les représentations populaires et savantes de la ville, les monumentalités, etc.

Comme problématiques, on peut citer les dynamiques d'intégration ou de ségrégation socio-spatiale (phénomènes de ghettoïsation), de gentrification, ) les violences urbaines, les pratiques de mobilité, les représentations sociales de la ville, les instances citadines de socialisation, le contrôle social sur l'espace public, les mégapoles, etc.

[modifier] Sociologies contemporaines

Plusieurs chercheurs contemporains en sociologie urbaine travaillent actuellement sur le rapport entre ville, culture, violence, genders, mobilité, territoire, et économie. Certains chercheurs montrent comment l'urbanité (les spécificités organisationnelles) de la ville affecte le fonctionnement de l'économie et du marché du travail ainsi que la culture et la création artistique. Saskia Sassen effectue ses recherches sur le lien entre mondialisation et villes. En ce qui concerne la sociologie des quartiers populaires, on peut citer notamment deux chercheurs par ordre d'apparition : William Foote Whyte et Laurent Mucchielli.

Pages sur ce thème sur les projets Wikimedia :

[modifier] Notes et références

    • Prolégomènes à une histoire des concepts de morphologie sociale et de morphologie urbaine, Jean-Pierre Frey, 2003, in Les Identités, echos de Montréal, dir Lucie K. Morisset, ed. Nota Bene, Montréal.
    • Les débuts de la sociologie empirique, Antoine Savoye, 1994, ed. Kliksiek, Paris.
  1. En particulier les études sur les Systèmes d'échanges locaux comme ceux de Frithjof Bergmann

[modifier] Sources

[modifier] Éléments de bibliographie

  • Morphologie sociale, Maurice Halbwachs, 1938, Armand Colin.
  • La Production de l'espace, Henri Lefebvre, 1974, Anthropos.
  • La Ville médiévale. Système social, système urbain, Yves Barel, 1977, Grenoble, PUG.
  • Sociologie urbaine, Yves Grafmeyer, 1994, 128 p.
  • Villes bonnes à vivre, villes invivabes, in Revue du MAUSS, avec Jacques Dewitte, Jean-Claude Michéa, Marc Wiel, Karl Gruber, Léon Krier, Louis Maitrier, Christian Norberg-Schulz, Ernst Kallai, Anne-Marie Fixot, Nicolas Soulier, 1999, Paris, La Découverte.
  • La Production du beau. trois études de sociologie sur l'habitation populaire, Louis Maitrier, 2001, in Revue du MAUSS, n°18, Paris, La Découverte.
  • La Chair et la Pierre : le corps et la ville dans la civilisation occidentale, Richard Sennett, Verdier, 2002
  • Aimons la ville, in Cahiers théoriques pour l’écologie politique, n°7, avec Nathalie Blanc, Jacques Lolive, Dominique Chouquer, Dominique Boullier, 2004, La Tour d’Aigues, Éditions de l’Aube.
  • Quand la ville se défait. Quelle politique face à la crise des banlieues?, Jacques Donzelot, 2006, Paris, Seuil
  • Sociologie des villes, Yankel Fijalkow, La Découverte, 2007 (Éléments de morphologie sociale des classes les plus pauvres à Tokyo, Lo Angeles, Johanesbourg, Parsis, Jérusalem, Montréal, dans la tradition de l'École de Chicago)
  • Bibliographie en sociologie urbaine

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes