Perception

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La perception est le phénomène psychologique qui nous relie au monde sensible par l'intermédiaire de nos sens.

Le mot perception a un double sens : à la fois perception par les sens, et perception par l'esprit En psychologie, la perception est le processus de recueil et de traitement de l'information sensorielle.

En psychologie expérimentale, chez l'être humain, on distingue la perception consciente de la perception inconsciente, dite aussi implicite ou subliminale. Cette distinction a été étendue aux animaux dans la mesure où ceux-ci peuvent être entraînés à indiquer s'ils ont perçu ou non un stimulus.

La perception d'une situation fait appel à la fois aux sens et à l'esprit.

Sommaire

[modifier] Perception sensorielle

La perception sensorielle est la perception "immédiate" que nos sens nous délivrent, comme des informations directes. Le terme de "sensation" est parfois utilisé dans un sens plus large (recouvrant aussi les émotions) ; on ne peut donc le retenir pour dénommer cette forme de perception. On distingue cinq sens délivrant cette information :

Les cinq sens

La vue

L'ouïe

L'odorat

Le toucher
Le goût

En psychologie cognitive, la perception est définie comme la réaction du sujet à une stimulation extérieure qui se manifeste par des phénomènes chimiques, neurologiques au niveau des organes des sens et au niveau du système nerveux central, ainsi que par divers mécanismes qui tendent à adapter cette réaction à son objet par des processus tels que la représentation de l'objet, la différenciation de cet objet par rapport à d'autres objets.

[modifier] Mesure de la perception

Les phénomènes perceptifs ne possèdent pas d'échelle de mesure continue. Ce sont avant tout des phénomènes temporels, c'est-à-dire que leur mesure n'est pas constante pour tous les instants (t). L'ouïe et la vue sont les deux sens qui nous transmettent des informations les plus importantes sur le temps et sur l'espace ; mais l'inégalité entre les rayonnements sonores et les rayonnements lumineux est pour beaucoup à l'origine d'une flagrante inégalité entre ces sens. Le seuil de perception d'un son par l'oreille est situé à 10-16 W, quand le seuil de perception d'une source lumineuse ponctuelle (à l'œil nu) est situé à 10-18 W. La vue est donc un sens réservé à l'immédiat. L'ouïe, en véhiculant des indications d'un autre ordre, nous renseigne beaucoup plus sur ce qui est du domaine de l'émotion, des sentiments : par exemple, outre qu'elle peut porter plus d'informations, la voix au téléphone nous en dit plus sur l'état «psychologique» de l'interlocuteur qu'une photo.

[modifier] Mesure de la sensation

Les quantités mesurables ne nous apprennent que peu de choses sur les phénomènes perçus, comme en attestent les illusions d'optique où, par exemple, un même objet peut nous apparaître plus clair ou plus foncé suivant la luminance des objets qui l'entourent. La psychologie de la perception cherche donc à établir le lien qui existe entre l'objet physique et la perception qu'on en a.

Les théories physicalistes du XIXe siècle ont tenté de relier, de façon bilatérale et univoque, sensations et grandeurs physiques. Le pragmatisme de ces recherches cherchait à exprimer des grandeurs affectives en fonction de données empiriques (degrés de hiérarchie des perceptions, comparaison de leur somme et de leur différence), des attributs sensibles en fonction de mesures physiques (définissables a priori). L'approche psychophysique a, par la suite, entrepris de mesurer précisément notre sensibilité à différents paramètres physiques (comme la couleur ou l'intensité sonore) afin de déterminer ce qui seraient les lois générales de la perception, comme la loi de Weber-Fechner. Selon une autre approche, les courants inspirés de la psychologie de la forme (Gestalt) ont cherché à comprendre comment se structurait la perception autour de principes généraux. Par exemple, selon le principe de clôture, une forme sera plus facilement perçue si elle est fermée que si elle est ouverte ; on retrouve une illustration de ce principe dans le triangle de Kanizsa où l'on perçoit spontanément un triangle blanc alors que seuls trois disques noirs sont dessinés. Les illusions visuelles fournissent une explication potentielle aux illusions de jugements ou illusions cognitives. À titre d'exemples, on peut citer les dessins bien connus de W.E. Hill (ma femme et ma belle-mère ainsi que le dessin de l'homme barbu). Les gestaltistes ont beaucoup travaillé sur ces équilibres visuels : premier plan et arrière plan, zones claires et zones sombres, contours convexes et concaves. Une fois que l'expérience a permis de comprendre la dualité de l'image, les limitations dans la perception ou dans le jugement peuvent être facilement vaincues. Comme l'affirmait Goethe, nous ne voyons que ce que nous savons. Et, "la découverte consiste à voir ce que tout le monde a déjà vu et à penser ce que personne n'a encore pensé".

On peut aussi mentionner les approches physiologiques qui cherchent à comprendre quels sont les mécanismes qui permettent la perception aussi bien au niveau des organes des sens que des neurones du système nerveux.

[modifier] Perception visuelle

Les gens d'une formation technique pensent que la vision est la perception des rayonnements lumineux par le système visuel. C'est à dire ils pensent que l'oeil fonctionne comme un appareil photographique. Ceci n'est pas possible, car l'oeil comprend deux systèmes complètement différents: Le système foveal donne la possibilité d'examiner des points d'environ 2 degrés d'angle 3 à 4 fois par seconde. C'est un système très lent à haute résolution. Le système peripherique rend jusqu'à 90 images comprimés par seconde - d'un angle d'environ 180 degrés, avec une résolution basse. Ces deux systèmes servent à relier le monde exterieur avec sa représentation intérieure. La perception visuelle est donc une sorte d'identification et pas une manière de projecter des images. Pour voir un objet il faut connaître deja des objet similaires.[1]

La seule exception est probablement la perception des visages, qui fonctionne depuis la naissance. C'est une capacité très spécialisée du système visuel de l'être humain (et d'autres primates) à reconnaître un visage.

Mécanisme de la vue : voir l'Oeil /rétine

[modifier] Notes et références

  1. référence, citation ou lien

Hans-Werner Hunziker, Im Auge des Lesers, Transmedia Stäubli AG, Zürich, Novembre 2006, 167 p. (ISBN 978-3-7266-0068-6)

[modifier] Perception auditive

La branche de la psychologie qui étudie la façon dont nous percevons les sons est la psychoacoustique.

[modifier] Mécanisme de l'audition

La chaîne de l'audition est complexe. Ses mécanismes sont développés dans l'article Ouïe. Les sons transmis par l'air sont captés et amplifiés par le pavillon qui les focalise vers le conduit auditif jusqu'au tympan, membrane qui entre alors en vibration. La chaîne des osselets transmet et amplifie ces vibrations (conduction mécanique) et elles sont transmises à l'oreille interne. Elles provoquent des ondes de pression correspondant aux ondes sonores. Ces ondes de pression permettent de communiquer les vibrations à la partie la plus délicate et la plus interne de l'oreille humaine, la cochlée. Les ondes mécaniques font bouger les cils de l’oreille interne, ce qui active la production d'influx nerveux chargés de transmettre l'information au nerf auditif, jusqu'au cortex auditif.

[modifier] Perception olfactive

La perception olfactive est la perception délaissée de l'être humain et utilisée parfaitement par les animaux. On l'utilise cependant sans s'en rendre compte.

Mécanisme de l'odorat : voir le Nez.

[modifier] Perception tactile

La perception tactile est le sens de la perception par rapport au touché que l'homme éprouve.

Mécanisme du toucher : voir la peau et les nerf

[modifier] Perception gustative

C'est la perception du goût.

Mécanisme du goût : voir la langue (anatomie) et le palais (anatomie)

[modifier] Perception temporelle

Si nous possédons des yeux pour voir, des oreilles pour entendre et un nez pour sentir, nous n'avons pas de récepteurs sensoriels dédiés à la perception du temps. Or nous sommes pourtant capables de percevoir l'écoulement du temps. L'étude de la perception du temps se confronte donc à un paradoxe qui renvoie à la nature même du temps où se rencontrent les expériences psychologiques, les réflexions philosophiques et notre compréhension du fonctionnement du cerveau.

La perception temporelle a fait l'objet de nombreux travaux depuis les premières études psychophysiques au XIXe siècle jusqu'aux explorations en imagerie cérébrale. Les expérimentateurs se sont attelés à distinguer différents types de phénomènes qui relèvent tous de la perception du temps :

  • la perception des durées
  • la perception et la production de rythmes
  • la perception de l'ordre temporel et de la simultanéité

La question reste posée de savoir si ces différents domaines de la perception temporelle procèdent des mêmes mécanismes ou non, en particulier d'autres distinctions ont été introduites sur la base de l'échelle de temps considérée. Ainsi selon le psychologue français Paul Fraisse, il convient de distinguer la perception (pour des durées relativement brèves jusqu'à quelques secondes), de l'estimation temporelle, qui, elle, désigne l'appréhension de durées longues (supérieures à plusieurs secondes jusqu'à des heures ou davantage).

[modifier] Perception de l'espace

De même que la durée, les distances entre les objets peuvent faire l'objet d'une perception. Ainsi, il est possible de dire si tel objet est plus proche de nous que tel autre ou encore qu'untel est plus grand qu'un autre. L'argument pour isoler une perception de l'espace à côté des sens physiologiques (tels la vision ou l'audition) repose sur l'observation que l'information spatiale que l'on extrait de l'environnement semble être supra-modale, c'est-à-dire partagée entre les différentes modalités sensorielles. Ainsi il est possible de dire si un son provient d'un objet visuel. Le lobe pariétal du cerveau joue un rôle important dans la perception de l'espace.

Voir aussi : Localisation auditive

[modifier] Perception et audiovisuel

La perception par l'oeil ou par l'oreille des phénomènes qui nous entourent sont limités par les récepteurs mis en jeux. L'oreille humaine ne capte les signaux sonores que dans une gamme de 20 à 20000 hertz en moyenne. L'oeil; pour sa part est limité pour une personne aux longueurs dondes comprises entre 400nm et 700nm, c'est la lumière visible.

De plus, il semblerais que l'interprétation par le cerveau des images transmises par l'oeil ne puisse être considérée comme copie conforme à la réalité, mais plutôt comme des références à des images (ou à des portions d'images) déjà imprègnées dans la mémoire de l'individu. C'est grâce à cela que lon reconnais un petit morceau d'assiette cassée alors qu'un ordinateur lui sera completement perdu.

Sans parler des phénomènes de persistences rétiniennes, on utilise en audiovisuel les carences de nos perceptions pour manipuler les sons et les images pour qu'elles deviennent plus petites en terme d'espace occupé sans pour autant qu'elles ne perdent leur qualité intrinsèques de transport d'informations. On parle alors de codage, de compression du média.

Les codec les plus évolués prennent en compte de manière très fine les inperfections de nos Perceptions pour atteindre des compressions inconnues avant les travaux des scientifiques sur la perception de nos cinq sens et l'interprétation qui est faite par notre cerveau des données reçues.


[modifier] Loi de Weber-Fechner

Pierre Bouguer (1760), puis Ernst Weber (1831) ont cherché à déterminer la plus petite variation physique perceptible d'un stimulus. La loi de Bouguer-Weber stipulait que le seuil différentiel (plus petite différence perceptible entre deux valeurs de stimuli) augmentait linéairement avec la valeur du stimulus étalon. Le médecin Gustav Fechner (inventeur du terme psychophysique) a modifié cette loi, pour la rendre valide aux valeurs extrêmes de stimuli : «la sensation varie comme le logarithme de l'excitation». Cette distanciation de la somme des causes et des transformations linéaires et affines procurant le résultat, l'effet, n'a été rendue possible que lorsque Fechner eut introduit vers 1860 la notion de seuil de perception et précisé certaines méthodes d'investigation et d'observation qui permettaient de les repérer.

[modifier] Intensif - extensif

Rappelons que l'on doit à Bergson d'avoir dénoncé dans son «Essai sur les données immédiates de la conscience» ce qu'il appelle l' «illusion» consistant à confondre «l'intensif et l'extensif». Des valeurs intensives, terme un peu désuet aujourd'hui, sont des valeurs qui augmentent par degrés, mais que l'on ne peut ni rattacher à un nombre, ni rattacher à une étendue ; par opposition, l'extensif se rapporte, lui, à une étendue. Pour Bergson, nous associons inconsciemment ce que nous ressentons à la cause de notre impression ; nous ressentons une certaine quantité, définie par le contraste, la nuance, et nous cherchons un peu abusivement à la définir par une grandeur en objectivant une donnée qui appartient en propre à la conscience subjective. Or, «la sensation est un fait psychologique qui échappe à toute mesure.» Bergson ne nie pas la mesure des seuils différentiels de Weber qui juge de l'excitation, donc de la cause. Mais il critique l'amalgame de Fechner qui met la cause dans l'effet. Il prône donc une radicalisation de la pensée qui mette plus en valeur les états subjectifs. Il faut, nous apprend-il, rétablir la vérité des «données immédiates de la conscience». On le sait aujourd'hui, la pseudo-loi de Weber-Fechner reste très approximative : elle n'est à peu près exacte que dans la zone des valeurs moyennes. Ces théories physicalistes opéraient en fait une appréciation psychophysique trop radicale du lien qui unit le monde subjectif du perçu et une ou plusieurs grandeurs mesurables.

[modifier] Perception au sens philosophique

Dans un environnement complexe, l'intelligence d'une situation fait appel à une perception plus globale. La perception de situations complexes peut être entravée par des biais cognitifs. Le phénomène qui peut entraver la bonne perception d'une situation est en particulier l'illusion, mais ce peut être aussi bien d'autres formes de biais cognitifs (dissonances cognitives) ou des sophismes, de la part des personnes qui échangent leur point de vue sur une situation.

Pour se prémunir contre tous ces risques, il est important de croiser les sources d'information, et de croiser les interprétations de ces sources. Ainsi, les situations complexes du monde réel demandent une qualification plus coordonnée des informations, dans laquelle interviennent différents types de perception.

Le partage des informations et leur qualification, dans une collectivité ou une entreprise, font appel à des méthodes et à des sciences cognitives.

Plusieurs philosophes se sont penchés sur le phénomène de la perception.

Baruch Spinoza, dans le traité de la réforme de l'entendement (1661-1677), distingue quatre modes de perception :

La perception par l'expérience est un processus empirique, qui fait aujourd'hui appel à des méthodes expérimentales sophistiquées.

Autant les deux premiers types de perception (perception par les sens et par l'expérience) sont individuels, autant le raisonnement, et surtout l'intuition ont des implications collectives : c'est à ce stade qu'une bonne intelligence (inter-ligere, en latin, signifie lier entre) d'une situation nécessite des communautés, où les perceptions des uns et des autres interagissent pour aboutir à une vision structurée de l'ensemble. En gestion des connaissances, on parle de communautés de pratique.

Pour donner un point de vue sur une situation globalement, l'intuition peut nous amener à faire des généralisations de cas singuliers, c'est-à-dire procéder par induction. La généralisation peut être dangereuse, car les cas singuliers choisis ne sont pas nécessairement représentatifs, et même ils peuvent être choisis intentionnellement pour arriver à une conclusion prédéterminée, ce qui est une logique fallacieuse. À cette réserve près, l'induction est un complément indispensable du raisonnement déductif pour percevoir une situation complexe.

Henri Bergson (données immédiates de la conscience) s'est inspiré de Spinoza sur la question de l'intuition.

Maurice Merleau-Ponty a également étudié le phénomène de la perception. La perception a, selon lui, une dimension active en tant qu’ouverture primordiale au monde vécu (au Lebenswelt) [1]. Contrairement à la conception cartésienne de la pensée, Merleau-Ponty estime que le corps n'est pas qu'un objet potentiel d'étude pour la science. Il souligne qu’il y a une inhérence de la conscience et du corps dont l’analyse de la perception doit tenir compte. Le primat de la perception signifie un primat de l’expérience, dans la mesure où la perception revêt une dimension active et constitutive[2].

[modifier] Référence

  1. Maurice Merleau-Ponty, La structure du comportement, Paris, Presses Universitaires de France, collection « Quadrige », 1990, pages 235-236 ; et Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception, Paris, Éditions Gallimard, collection «Tel», 1976, pages II-III et p. 240, et p. 348 ; et Maurice Merleau-Ponty, Le primat de la perception et ses conséquences philosophiques, Éditions Verdier, 1996, page 67.
  2. Principalement dans Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception, Paris, Éditions Gallimard, collection «Tel», 1976, aux chapitres IV, V et VI

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Bibliographie

  • Baruch Spinoza, Traité de la réforme de l'entendement humain, 1661-1677
  • Platon, Théétète
  • Aristote, De l'âme,
  • Long et sedley, Les philosophes hellénistiques, Tome II, les Stoïciens,
  • Kant, Critique de la raison pure,
  • Bonnet C. (1986). Manuel pratique de psychophysique, Armand Collin.
  • Fechner G.T. (1860). Element der Psychophysik, Leipzig, Breitskopf and Härtel.
  • Maurice Merleau-Ponty (1945). Phénoménologie de la perception,
  • Maurice Merleau-Ponty, Le primat de la perception et ses conséquences philosophiques, Éditions Verdier, 1996
  • Hans-Werner Hunziker,Im Auge des Lesers, foveale und periphere Wahrnehmung: vom Buchstabieren zur Lesefreude. ISBN 978-3-7266-0068-6