Ocre

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carrières d'ocres de Rustrel
carrières d'ocres de Rustrel

L’ocre, du grec ancien ὤχρα / ốkhra, est une roche ferrique utilisée depuis les temps préhistoriques comme pigment colorant, du jaune au brun en passant par le rouge.

C’est une argile pure (kaolinite) colorée par un pigment d'origine minérale (un hydroxyde de fer : l’hématite pour l'ocre rouge, la limonite pour la brune et goethite pour la jaune). Cette argile colorée est amalgamée aux grains de sable (quartz) qui composent la masse rocheuse à plus de 80 %.

On en trouve en France dans les Monts de Vaucluse [Colorado provençal, Roussillon, la dernière carrière encore en activité étant située à Gargas (Vaucluse)]. L'ocre naturelle est utilisée comme pigment depuis la préhistoire, comme à Lascaux. Elle est toujours appréciée pour sa non-toxicité et sa grande longévité en décoration, beaux-arts et maçonnerie.

Sommaire

[modifier] Genèse de l’ocre

Au Crétacé, des débris organiques (coquilles de lamellibranches, d’oursins et de foraminifères, ainsi que des grains de quartz et des paillettes de micas s’accumulent au-fond d’une mer épicontinentale (peu profonde). Un minéral très particuier, caractéristique du milieu marin, se forme sur le fond de la mer : la glauconie, variété d’argile verte qui contient dans son réseau cristallin des atomes de fer. Depuis les travaux du géologue Jean-Marie TRIAT (Thèse de Doctorat 1979) on sait qu'à la faveur de mouvements tectoniques (Tectonique des plaques) ces dépôts sédimentaires marins ont été émergés. Sur le nouveau continent régnait, au Crétacé, un climat tropical, qui a provoqué d’intenses altérations latéritiques, dissolvant entre autres la glauconie et libérant les atomes de fer. Les ocres sont alors apparues grace à la cristallisation d'un hydroxyde de fer : la goethite. L'altération a en même temps donné naissance à un silicate d’alumine : une nouvelle argile : la kaolinite. C’est ainsi que sont nées les ocres de Vaucluse et de Bourgogne, formations sableuses (grains de quartz) cimentées par une argile constituée de cristallites dont la taille est de l’ordre du micromètre : la kaolinite, support argileux essentiel et la goethite (pigment coloré). D'un point de vue chimique l’ocre est donc un silicate d’alumine ferrugineux et siliceux.

[modifier] Usages

Ce matériau a été retrouvé sur de nombreux sites depuis 80 000 ans. Des fragments d’ocres gravés datés de plus de 77 000 ans ont été trouvés à Blombos, en Afrique australe. Les peintures rupestres européennes datent de –40 000 à –10 000 ; celles de Lascaux ou d’Altamira ont environ 15 000 ans. Les ocres sont quasiment inaltérables par le temps. En France, elles proviennent de Bourgogne,du Vaucluse… Par ocre on entend des roches sableuses dont la phase colorée est constituée d’hydroxides ferriques, principalement la limonite (FeOOH nH2O) et la goethite (FeOOH). Souvent définies comme des argiles, les ocres se trouvent dans le sol sous forme de sables ocreux. L’ocre a eu de nombreux usages au cours du temps. Elle a été utilisée en médecine, notamment en Égypte, pour ses propriétés apaisantes et cicatrisantes. Elle a très longtemps été utilisée pour la conservation des peaux entre l’abattage et le tannage. De même, dès –30 000, les corps et les parois des tombes étaient enduits d’ocre, probablement pour protéger le cadavre de la putréfaction. Les embaumeurs égyptiens teignaient le corps des hommes avec de l’ocre rouge et celui des femmes avec de l’ocre jaune pour lutter contre le noircissement de la peau provoqué par le traitement. Dans le Pays d'Apt, dand le Vaucluse en France, l'ocre est exploitée depuis la fin du XVIIIe siècle après que Jean-Etienne Astier, le premier fabriquant d'ocre à Roussillon, ait inventé un traitement qui permet d'extraire le pigment du sable. Au début du XXe siècle, on produisait 36 000 tonnes d'ocre dans le Pays dApt, surtout dans les galeries de Gargas (voir archives locales), dont 98 % partaient à l'exportation. Elle a également été utilisée comme substance imperméabilisante mais son principal usage reste pictural, tant sur le corps que sur la pierre.

L'ocre est une pierre lourde, ce qui en fait un bon indicateur de présence d'or au fond des cours d'eau.

[modifier] Usages picturaux et symboliques

[modifier] Extraction

L’ocre est un matériau naturellement présent dans les argiles et le sol sous forme de sédiments, les « sables ocreux ». Les roches du Crétacé à nouveau recouvertes par des sédiments continentaux et marins après la formation des ocres sont revenues à l’affleurement grâce aux grands décapages quaternaires. L’usage de mines d’ocre est avéré depuis très longtemps, néanmoins il est nécessaire de séparer l’ocre, très fin, des impuretés et du sable majoritaires lors de l’extraction (80 à 90%). On utilise pour cela de l’eau courante : c’est le procédé de lévitation. Les particules colorantes plus légères sont ensuite filtrés et séchées.

[modifier] Techniques

La non-toxicité des ocres permet toutes sortes de techniques, de plus elles sont compatibles avec tous les liants (graisses animales, huiles végétales, eau, fluides corporels…) et les autres pigments. Les qualités les plus claires sont aussi les plus transparentes. Les ocres jaunes après calcination à 400°C se transforment en ocres rouges. Les Hommes préhistoriques disposaient de nombreux pigments d’origine métallique : hématite (oxyde de fer, rouge), dioxyde de manganèse (brun), limonite (oxyde de fer, jaune à brun)… ainsi que des charbons de bois ou d’os et de l’argile. Tous ces pigments peuvent se mélanger. Le chauffage des pigments permet également d’obtenir une grande variété de nuances. Ils pouvaient utiliser comme outils, leurs doigts et leurs mains, soit en étalant soit comme pochoir en pulvérisant avec la bouche directement ou à l’aide d’un tube d’os ou de végétal (Figure 4), des tampons de feuilles ou de mouches, des crayons de matière colorante, des bâtonnets ou des pinceaux (bambou écrasé, plumes ou crin). De nombreux sites, comme celui du Mas d’Azil (magdalénien) ont également livré un outillage pouvant servir aux peintures corporelles (et scarifications) : morceaux d’ocres plus ou moins façonnés, aiguilles effilées ou spatulées, pointes effilées, galettes perforées de pigment…

[modifier] Rites, peintures corporelles

Certaines statuettes féminines (comme celle de Laugerie-Basse, Dordogne) montrent des dépôts de peinture. On peut voir des bandes rouges sur les seins ou le sexe. D’autres présentent des gravures pouvant être interprétées comme des peintures : ponctuations sur la poitrine et le ventre, dessins de colliers ou de bracelets aux pieds ou aux chevilles… Aujourd’hui dans les cultures traditionnelles l’ocre se rattache à la « Terre Mère », elle est utilisée lors de rituels liés à la mort (retour du corps à la terre) ou à la chasse. En Afrique les couleurs rouge et ocre sont les couleurs de l’initiation, chez les amérindiens le rouge est la couleur de la maturité et l’ocre celle de l’origine de l’Homme. Le tatouage participe souvent à un rite d’accès au surnaturel où l’Homme tente de dépasser sa propre nature. C’est peut-être pour cela que les représentations anthropomorphes sont si rares dans l’art pariétal. Les sépultures paléolithiques apportent de nombreux témoignage de l’utilisation de produits colorés dans les rites funéraires. Les représentations pariétales ne trouvent toujours pas de « justification » mais certains sites semblent indiquer à côté des représentations figuratives des taches de couleur comme si les hommes se contentaient de tremper les mains dans l’argile de la grotte pour en enduire les aspérités. Ocre est aussi une couleur qui est d'une teinte orangé mélangé avec brun.

[modifier] Conservation

Le ruissellement d’une eau calcaire dans les grottes a favorisé la conservation des peintures en les fixant sous un voile fin, sans compter la grande résistance des ocres à la dégradation mais un trop grand nombre de visiteurs peut aujourd’hui mettre ces œuvres en péril.

[modifier] Voir aussi