Nation

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D'une manière générale, une nation est une communauté humaine identifiée dans des limites géographiques souvent fluctuantes au cours de l'histoire, et dont le trait commun supposé est la conscience d'une appartenance à un même groupe.

La notion est assez proche de celle de peuple, mais ajoute souvent l'idée de gouvernement (souhaité, autonome ou indépendant). La notion de nation est ainsi plus politique que celle de peuple. Sont ainsi une nation « L’ensemble des personnes nées ou naturalisées dans un pays et vivant sous un même gouvernement[1] ». « Se dit aussi de l’ensemble des citoyens considérés comme constituant un corps social distinct du gouvernement qui les régit[2] ». Il est cependant parfois utilisé sans aucune connotation politique (existante ou souhaitée), en total synonyme de peuple : on parle ainsi de nations indiennes, par exemple, ou de saint Paul comme « apôtre des nations ».

Afin de dissiper l’ambigüité entourant la notion de nation, certains préféreront faire la distinction entre nation civique et nation ethnique[3].

Sommaire

[modifier] Définition

[modifier] Dans les dictionnaires

Dans le Nouveau dictionnaire universel des synonymes de la langue française de Guizot (François) - 1822, page 19, il est indiqué « un peuple est une multitude d'hommes, vivant dans le même pays et sous les mêmes lois. Une nation est une multitude d'hommes, ayant la même origine, vivant dans le même État et sous les mêmes lois[4] ». Deux notions différencient ainsi pour l'auteur la nation du peuple : l'État et l'origine.

Pour le Petit Robert, une nation est « un groupe humain constituant une communauté politique, établie sur un territoire défini (…) et personnifiée par une autorité souveraine ».

Pour le dictionnaire de la langue française, la nation est un « Ensemble de personnes vivant sur un territoire commun, conscient de son unité (historique, culturelle, etc.) et constituant une entité politique[5] ».

[modifier] Politique

Au sens moderne du terme, « nation » a une signification à dominante politique. Une nation est d'une part un état (comme dans l'expression « Organisation des Nations unies »), et d'autre part un peuple ayant l'objectif politique de maintenir ou de créer un état. Dans cette seconde signification, une nation est en pratique un peuple dont une partie au moins des membres a des objectifs nationalistes.

On note que des groupes ne bénéficiant pas d'une organisation en état se définissent cependant comme une Nation, avec l'objectif de constituer un État, ou au moins une structure politique autonome. Les nationalistes juifs, corses, basques, écossais, algériens ou québécois ont ainsi revendiqué un État pour leur population de référence, certains finissant par l'obtenir.

Pour justifier leur volonté d'obtenir un état spécifique, les groupes se définissant comme nation ont souvent tenté de définir celle-ci par des critères historiques pré-existant à l'entité politique qu'ils souhaitaient créer, et la justifiant.

Il existe deux démarches principales : une approche « objective », défendue par exemple par le philosophe Johann Gottlieb Fichte une nation doit avoir des caractéristiques objectives : langue, religion, culture, histoire, la différenciant des autres nations. Une autre approche, dite « subjective », insiste par contre sur la volonté de « vivre ensemble », la nation étant dès lors le résultat un acte subjectif d'autodéfinition. C'est ainsi la vision de Ernest Renan.

Pour l'approche fondée sur les critères objectifs, ceux-ci sont :

  • La culture, encore qu'elle ne définit pas toujours à elle seule une communauté nationale quand les mœurs diffèrent ;
  • La langue, ne peut toujours à elle seule définir une nation : la Suisse reconnaît quatre langues officielles, et, en France, l'Alsace et la Moselle, malgré leur langue d'origine alémanique et francique, sont intégrées à la France, de même que les Pyrénées-Orientales dont la langue véhiculaire était le catalan. Les États-Unis se sont politiquement séparés comme État indépendant de la métropole britannique en dépit de leur langue commune ;
  • la religion, foi ou culte est insuffisant car il est aussi fréquent de voir s'opposer des nations se réclamant de la même religion que de voir des guerres de religion dans une même nation. On peut aussi relever le cas de l'Alsace-Moselle rattachée à un régime concordataire, alors que la France est une nation laïque.
  • l'histoire politique, culturelle et sociale pose également une difficulté dans la mesure où la majorité de la nation en question s'organisant en partis politiques et-ou en grandes organisations sociales, culturelles qui l'identifient par rapport à d'autres, composant un même État les articulant entre elles.

[modifier] Histoire de la nation

[modifier] Avant la Révolution française

Avant la Révolution française, le terme « nation » est essentiellement utilisé dans le sens actuel de peuple, sans connotation politique développée.

On parle ainsi de saint Paul comme « apôtre des nations ». Nation désigne en effet dans la Bible, les peuples infidèles et idolâtres, par opposition aux chrétiens ou aux Juifs.

Dans l’ancienne Université de Paris, le terme était utilisé pour classer, suivant leur origine, les membres qui la composaient. On distinguait quatre nations : celle de France, celle de Picardie, celle de Normandie et celle d’Allemagne.

Plus tard, le « Collège des Quatre-Nations », qui correspond à l’actuel palais de l’Institut, avait été nommé en hommage aux « nations » rattachées au royaume lors des traités de Westphalie (1648) et des Pyrénées (1659) : Alsace, Artois, Pignerol, Roussillon (et Cerdagne).

[modifier] A partir de la Révolution française

Avec la Révolution française, le terme prend une connotation politique dominante. La Nation devient alors l'expression politique du peuple français.

A la suite de la révolution, le nationalisme va se répandre à travers l'Europe, puis à travers le monde, en tant qu'idéologie visant à établir des états spécifiques pour des peuples spécifiques, qui en était généralement privés. Les premiers nationalismes actifs dans la première moitié du XIXe siècle ont été :

  • des nationalisme visant à regrouper une même population éclaté sous divers pouvoirs, définie alors comme « nation », dans un seul état : le nationalisme italien et le nationalisme allemand ;
  • des nationalismes visant à l'indépendance d'une population soumise à un pouvoir considéré comme extérieur à la nation : les nationalisme polonais ou belge.

A compter du XXe siècle, sous l'influence des idées européennes sur la nation, et en réaction au colonialisme, les populations colonisées des empires coloniaux s'organisent en mouvements nationalistes, revendiquant le statut de nation pour leur peuple, et des structures politiques autonomes ou indépendante.

Après la fin de la décolonisation, les succès des nationalistes du tiers monde encouragent le développement de l'idée nationale dans le monde occidental. Des organisations politiques et culturelles promeuvent alors une nouvelle vague de nationalisme, définissant la population à laquelle ils appartiennent comme nation et réclament l'indépendance. Plus ou moins influents, ces nationalisme (parfois remontant au XIXe siècle, comme le nationalisme basque, mais qui développent une nouvelle vigueur) touchent des régions bénéficiant d'un certain particularisme religieux, historique ou linguistique. Ce sont les nationalismes corse, québécois, breton, occitan, basque...

[modifier] Nation, État et citoyenneté

Au sens moderne du terme, « nation » a une signification à dominant politique. Une nation est d'une part un Etat (comme dans l'expression « Organisation des Nations unies »), et d'autre part un peuple ayant l'objectif politique de maintenir ou de créer un Etat (ou au moins une représentation politique autonome[6]).

[modifier] État et nation

La nation au sens d'Etat a une définition légale relativement simple. L'Etat est une personne juridique de droit international qui dispose des attribut de la souveraineté : possibilité d'avoir une armée, un gouvernement, une monnaie, de signer des traités internationaux,.... Ces possibilités ne sont pas des obligations, l'État français ayant par exemple volontairement renoncé à une monnaie nationale au bénéfice de l'euro. L'Etat a souvent (mais pas toujours) une constitution et un corpus de texte législatif écrits.

La nation entendue au sens de « peuple ayant des objectifs politiques » est moins simple à définir. Une nation relève en effet de la tradition orale ou écrite, du sentiment d'appartenance, de l'accord (ou non) de la communauté sur des objectifs politiques.
Dans cette seconde acception, une nation peut prendre ses racines dans :

  • l'usage commun d'une langue : ainsi les Allemands firent partie jusque récemment de deux États mais ne forment qu'une nation)
  • un sentiment d'identité historique : ainsi les Pays-Bas bourguignons puis espagnols puis autrichiens, unis par le catholicisme, ont-ils formés une nation souhaitée, affirmée par la révolution belge de 1830, distincte de l'État (respectivement espagnol, autrichien puis propre, la Belgique) et distincte de son voisin protestant et flamand (les Pays-Bas). Ce sentiment national, au début unitaire, a progressivement évolué vers deux sentiments distincts, Wallon et Flamand, fondés sur l'appartenance linguistique. Ce nationalisme grandissant (surtout du coté flamand), remet en cause l'ancien sentiment d'appartenance national, au profit de nouvelles identités « nationales » revendiquées.
  • un mythe fondateur, qui peut être plus ou moins artificiellement ressuscité. Ainsi, quand il s'agit de proclamer leur indépendance de l'empire austro-hongrois, alors en pleine déliquescence, les Tchèques et les Slovaques évoquent leur passé commun dans la Grande Moravie et forment la Tchécoslovaquie en 1918. Moins d'un siècle plus tard, ils ont repris des chemins séparés
  • la religion peut-être un ciment très fort pour articuler le sentiment national

[modifier] Citoyenneté et nationalité

La nationalité ne se confond avec la citoyenneté qu'en français (au moins en France) où l'emploi du terme « nationalité » au sens de « ressortissant » juridique est impropre et va à l'encontre de la notion de droit international (voir la section Droit ci-dessous pour d'autres aspects juridiques).

Cette confusion linguistique est rendue possible par la négation des différentes nations qui forment le peuple français. Elle commence avec la Révolution française qui, dans la célèbre formule de Stanislas de Clermont-Tonnerre, en 1789, demande qu’on donne « tout aux Juifs comme individus et rien aux Juifs en tant que Nation. »

Il existe différentes conceptions philosophiques de la citoyenneté. On sépare traditionnellement :

  • Une définition « subjective » de la nation, qui insiste sur le sentiment d'appartenance. Cette vision est particulièrement présente dans conception française. Cette vision a été particulièrement formalisée par Ernest Renan dans son discours à la Sorbonne Qu'est-ce qu'une nation ?, en 1882 : « Une nation est donc une grande solidarité[...]. Elle suppose un passé ; elle se résume pourtant dans le présent par un fait tangible : le consentement, le désir clairement exprimé de continuer la vie commune [...] un plébiscite de tous les jours[...]. Oh ! je le sais, cela est moins métaphysique que le droit divin, moins brutal que le droit prétendu historique. [...]. Une nation n'a jamais un véritable intérêt à s'annexer ou à retenir un pays malgré lui. Le vœu des nations est, en définitive, le seul critérium légitime, celui auquel il faut toujours en revenir ». Cette vision mène assez logiquement au droit du sol, ou une personne devient facilement membre d'une nation au nom du lieu ou elle est née, ou elle vit et dont elle partage le destin.
  • Une définition « objective » de la nation, qui insiste sur une ascendance commune, un territoire commun et une langue commune. Cette vision est particulièrement présente dans conception Allemande. La citoyenneté est donc une réalité objective indépendante de la volonté des individus. Un des auteurs les plus anciens à avoir formalisé cette approche est Johann Gottlieb Fichte, dans son Discours à la nation allemande, en 1807-1808. Pour Fichte, la Nation se détermine de façon objective par la culture, l'histoire et la langue. Certaines nations ont su conserver au cours des âges la langue originelle de leurs ancêtres, ce sont les « nations-mères ». Le peuple allemand, supposé avoir conservé sa langue depuis l'antiquité est ainsi une de ces nations-mères, par opposition aux nations de langues latines, puisque celles-ci on oubliées le latin antique au bénéfice de nouvelles langues dérivées. Le peuple allemand doit s'unifier. Fichte est ainsi un des premiers penseurs pangermaniste. Cette vision mène plutôt à une conception de la nationalité basée sur le "droit du sang", ou il est difficile voir impossible à un allogène de devenir membre du corps national. Depuis peu, le "droit du sol" a été introduit en Allemagne, notamment pour permettre une meilleure intégration des descendants d'immigrés.

Historiquement, en Europe, peu d'États se sont organisés complètement sur le "modèle" français, politiquement, géographiquement et institutionnellement suivant l'idéal d'États-nations. Dans cette optique, chaque nation doit correspondre à un État, et réciproquement un État n'est constitué que d'une nation, le tout dans un territoire précisément défini. Cela a, par exemple, induit le glissement de sens du terme nationalité, désignant maintenant en français le ressortissant d'un État et non plus seulement le membre d'une nation en tant que groupe culturel, religieux ou linguistique. Par abus de langage, on a parfois parlé de nation pour désigner l'ensemble constitué d'un groupe humain, d'un territoire et d'un État, quelle que soit par ailleurs la fragilité de celui-ci, comme on l'a vu avec l'ex-Yougoslavie.

Dans le reste du monde, ce modèle, dans lequel la nation et l'État coïncident, a été largement copié, mais il reste des exemples de nations à cheval sur plusieurs États : par exemple la nation kurde, dont l'aire géographique s'étend sur le territoire de la Turquie, de l'Irak et de la Syrie. C'est même une nation sans État constitué.

Cette identification entre l'État et la nation se heurte en plus sur l'exemple de plusieurs nations constituées ou revendiquées comme les Alsaciens, les Basques, les Écossais, les Québécois, les Acadiens, les Bretons, les Flamands, les Wallons et les Catalans, où une part éventuellement importante de la population se considère comme constituant des nations bien distinctes, mais qui n'ont pas d'États indépendants. L'évolution démocratique a fait que beaucoup de ces nations, dans les pays démocratiques en tout cas, ont obtenu une grande autonomie, voire ont été constitués en États fédérés. Un critère essentiel à retenir est la volonté de la population. Mais comment s'assurer de la réalité de cette volonté? Les études menées en Belgique montrent qu'il y a souvent ambivalence sur les sentiments d'appartenance. On peut s'instruire de ces ambivalences réelles au Québec, en Flandre, en Catalogne, en Écosse... par les recherches menées sur les sentiments d'appartenance en Belgique et en Wallonie. Ces nationalismes de contestation ne peuvent aboutir qu'à travers le débat démocratique, ce qui fait à la fois leur force et leur fragilité car, sur un sujet essentiel, engageant pour le long et même très long terme, il est, par définition, difficile en démocratie d'entraîner une conviction large, résultat souvent obtenu dans les nationalismes plus classiques à la faveur de situation d'affrontements violents (guerres, révolutions).

La dernière définition — une nation qui se définit par l'existence des partis politiques et de grandes organisations sociales et/ou culturelles propres (comme des médias, des universités, des organisations scientifiques, etc.) permet d'expliquer la presque totalité des nations en Europe. On voit effectivement que les Basques, les Écossais, les Québécois, les Flamands et les Catalans votent par exemple en grande majorité pour des partis politiques qui leurs sont propres et qui ne se présentent pas dans d'autres zones géographiques du pays ou ils vivent, tandis que les Suisses de toutes les langues votent pour des partis unitaires, c'est-à-dire qu'on ne parle pas (ou très peu) d'une nation suisse romande, et, en accord avec cette définition, il n'existe pas de partis politiques propres à la Suisse romande.

[modifier] Droit

Partant de la considération qui précède, selon laquelle « historiquement, en Europe, peu de nations se sont organisées complètement sur le “modèle” français », le traitement de la question juridique relative à la nation suivra ici la logique de ce modèle, et ainsi également la chronologie qui a vu ce modèle être mis en œuvre en France ; des développements parallèles avec illustrations autres qu'appropriées au droit français seraient nécessaires.

En considération du “modèle” français, une confusion doit d'abord être écartée : contrairement à ce qui est souvent cru en France, en droit, la nation n'est pas une personne juridique. La personne morale de droit public international est l'"État". En droit international le nombre de nations dont un État peut être composé est indifférent, ou plutôt il s'agit d'une question purement politique. On le voit bien dans la dénomination de l'ancienne Société des Nations à laquelle a succédé l'Organisation des Nations unies : si les membres juridiques de plein exercice en étaient et sont les États adhérents, ces organisations internationales ont pour objet les nations ; la distinction de notion ne fait de doute pour personne, et l'ONU n'a nullement pour objectif, ni officiel, ni officieux, que les nations constituent chacune des États distincts.

Parmi les États européens, seuls quelques-uns ont adopté au cours de l'histoire le "modèle" politique français de superposition plus ou moins forcée de peuple, nation, État, en tout cas de manière aussi poussée dans les termes de leurs lois fondamentales dites le cas échéant lois constitutionnelles.

S'agissant de la France, la dénomination de la personne morale de droit public est « l’État français » — expression à ne pas confondre avec l'utilisation juridiquement confusionnelle qui en a été faite à la période dite « Régime de Vichy » (voir État français (Régime de Vichy)) — : lorsqu'il s'agit par exemple de condamner « la France » à verser des indemnités, que ce soit en droit international ou en droit interne par exemple à un particulier, c'est l'expression « l'État français » que l'on trouve dans les décisions juridictionnelles.

La république (par exemple) est le régime de gouvernement : toujours en prenant la France en illustration pour le motif historique précité, la "République française" est le régime de gouvernement de "l'État français".

Quant au "peuple", dans l'organisation des pouvoirs c'est (en France) la notion qui désigne au nom de quoi la justice est rendue ("Au nom du peuple français") ; le pouvoir juridictionnel ne s'exerce pas au nom de l'État personne morale, mais directement au nom de la collectivité de fait des individus qui en sont ressortissants.

Et quant à la nation, c'est au sens constitutionnel en France la notion juridique désignant au nom de quoi est exercé le pouvoir législatif — d'où la dénomination actuelle de l'Assemblée nationale, anciennement Chambre des députés. Car selon la perspective politique à la française, en tant que mise en œuvre à titre juridique notamment par la Constitution actuelle de la République française, la nation est un ensemble de citoyens détenant la puissance politique.

Mais en France même, le sens du mot "nation" sera différent dans d'autres législations que celle constitutionnelle : par exemple, au sens de la législation relative à la "diffamation raciale", la notion de diffamation de "nation" ne repose strictement en rien sur le sens que présente ce terme dans la Constitution, et même entre en contradiction complète avec celui-ci.

Au Canada, la Chambre de communes a voté, le 27 novembre 2006, à une majorité écrasante, en faveur d'une motion qui reconnaît que « les Québécois forment une nation au sein d'un Canada uni », une démarche surtout symbolique mais qui constitue un grand pas en avant pour la consolidation du sentiment du statut particulier de la province francophone. Au Canada anglais, les critiques ont fusé, beaucoup craignant qu'on ne donne de nouvelles armes aux indépendantistes québécois.

[modifier] La nation, chez Benedict Anderson

Dans son livre L’imaginaire national: Réflexions sur l’origine et l’essor du nationalisme, Benedict Anderson propose que l’État nation soit quelque chose qui s’actualise à partir d’une « illusion durable », d’une « communauté imaginée ». L’auteur se demande d’abord : qu’est-ce qui rend possible que « des gens peuvent se croiser dans la rue, sans faire jamais connaissance, et être tout de même liés les uns aux autres » (37)? Réponse: ces gens s’incluent eux-mêmes, les uns les autres, dans une même forme imaginée. Ce processus d’inclusion implique qu’ils se lient et sont liés les uns aux autres par des forces de cohérence affectives. Quelles sont ces forces ? Avant tout, elles sont portées par les mécanismes du capitalisme, de l’horloge, de l’imprimerie et du calendrier. Le mécanisme qui met en forme l’État-nation, selon l’auteur, fonctionnerait à peu près ainsi : l’horloge et le calendrier composent des rapports stratégiques entre les forces affectives véhiculées par l’imprimerie et le capitalisme. L’horloge et le calendrier rendront possible la synchronisation des activités littéraires et commerciales d’une multitude de familles et d’individus hétérogènes. (Source)

[modifier] La nation selon Linteau-Durocher-Robert

« Il en découle que la nation peut recevoir des significations très diverses selon ceux qui la définissent et selon les circonstances et le milieu où s'élabore cette définition. Pour démontrer qu'un groupe constitue une nation, on invoque l'existence d'un ou plusieurs des facteurs suivants : le groupe a une histoire commune, il a une identité propre qui le distingue des groupes voisins, il est concentré sur un territoire, il possède une langue, une religion ou des traditions communes, etc.

Il n'est pas nécessaire cependant qu'une société ait toutes ces caractéristiques pour se voir attribuer le titre de nation. Chaque cas en est un d'espèce. Certains sociologues vont même jusqu'à soutenir que le seul critère déterminant est subjectif : il y aurait nation lorsque les membres d'une société sont convaincus qu'ils participent d'une même appartenance nationale. Il ne faut pas confondre la nation et l'État, car ce sont deux réalités distinctes, l'une relevant du domaine sociologique, l'autre du politique. Il arrive que des groupes aient avantage à associer les deux termes, soit pour dominer un groupe plus faible, soit pour donner plus de prestige à l'État. Si la nation n'est pas imaginaire, il importe de se rappeler que le nationalisme est une idéologie, donc une doctrine formulée par des individus et des groupes. C'est pourquoi il n'y a pas un nationalisme, mais des nationalismes qui évoluent avec le temps. » Linteau-Durocher-Robert, Histoire du Québec contemporain tome I, Boréal Compact, 1989.

[modifier] La nation selon Staline

Dans son ouvrage "Le Marxisme et la question nationale" publié en 1913, Staline définit la nation comme étant "une communauté stable, historiquement constituée, née sur la base d'une communauté de langue, de territoire, de vie économique et de formation psychique qui se traduit par une communauté de culture". Autrement dit, la nation est un groupement d'hommes parlant une même langue, vivant sur un même territoire, ayant la même vie économique et ayant un sentiment d'appartenance à ce groupe, bref, un groupe d'hommes partageant une même culture.

[modifier] Synonymes

Les définitions des termes tribu, ethnie et nation se recouvrent largement. La différence principale étant leur champ d'application ; ces termes étant utilisés pour faire référence à des peuples ayant des modes de vie non européens ; le terme tribu pouvant cependant désigner une formation sociale existant avant la formation d'un État. Il semble que les connotations très différentes de ces termes fait qu'ils sont rarement interchangés. Le terme de nation était cependant utilisé pour qualifier les différents peuples amérindiens avant le XXe siècle et de nos jours en référence à cette époque. On peut aussi considérer que le terme de nation s'applique a des groupes numériquement plus importants que ceux désignés sous les termes tribu ou ethnie. Doit-il être rapproché du néologisme méta-ethnie ?

[modifier] Dichotomie ethnique/civique

Le mot nation en soit peut amener une certaine ambiguïté car dans certains pays, cette distinction n’est pas nécessaire, en particulier dans ceux étant de type État-nation. Par exemple, au Japon, il n’existe qu’une identité ethnique, ce qui fait que cette distinction est inutile quant on parle de la nation japonaise. Cependant, le terme nation en soit peut amener une ambiguïté lorsqu’il s’agit de pays tel que le Canada. Comment peut-on définir une nation canadienne coexistant avec d’autres nations telles que la nation québécoise[7], acadienne, algonquine, etc. En prenant compte la dichotomie ethnique/civique (nation civique versus nation ethnique), on peut alors donner sens à ce que d’une part il s’agit de citoyenneté, et d’autre part d’ethnicité.

[modifier] Citations

La nation pour quelques-uns, sans doute, association transitoire ou permanente d'intérêts matériels est surtout, pour nous, une personnalité morale qui s'est constituée à travers les siècles grâce au travail et à la solidarité de générations successives, liées par des affinités de sang et l'esprit, et à laquelle, nous n'hésitons pas à le croire, est attribuée, sur le plan providentiel, une action spécifique dans l'ensemble de l'humanité. Seul le poids de ces sacrifices sans nombre, de cette coopération d'efforts, de cette identité d'origine, seul ce patrimoine collectif, seule cette communion spirituelle peuvent moralement fonder le devoir de la servir et de donner notre vie pour elle. Oliveira Salazar - Discursos e Notas polticas

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes

[modifier] Notes et références

  1. nation, sur le Wiktionnaire.
  2. nation, sur le Wiktionnaire
  3. Rethinking nationalism, édité par Jocelyne COUTURE, Kai NIELSEN et Michel SEYMOUR, Calgary, Alta., Canada: University of Calgary Press, 1998. p.2
  4. Nouveau dictionnaire universel des synonymes de la langue française » de Guizot (François) - 1822, page 19, [1]
  5. Dictionnaire de la langue française , [2].
  6. Le Parti de la nation corse est ainsi une organisation autonomiste, et non indépendantiste.
  7. 15/11/2007 - http://www2.parl.gc.ca/HousePublications/Publication.aspx?DocId=2544166&Language=F&Mode=1&Parl=39&Ses=1