Large Hadron Collider

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Le LHC (Large Hadron Collider, « Grand Collisionneur Hadronique ») est le grand accélérateur de particules qui sera mis en opération en juillet 2008 au CERN à la frontière franco-suisse. Il sera le plus grand accélérateur du monde (actuellement c'est le Tevatron aux USA). Il est en construction dans le tunnel de 27 km de circonférence de son prédécesseur, le collisionneur LEP (Large Electron Positron). À la différence de ce dernier, des protons (une variété de hadrons) seront accélérés pour produire des collisions, au lieu des électrons ou des positrons. Ces protons seront accélérés jusqu'à une énergie de 7 TeV (pour une énergie de collision de 14 TeV). Six expériences seront installées sur cet accélérateur, à savoir ATLAS, CMS, TOTEM, LHCb, Alice et LHCf. Les deux premières étudieront la physique des particules, en particulier la recherche du boson de Higgs et des particules supersymétriques, TOTEM mesurera la section efficace totale du LHC, LHCb étudiera la violation de la symétrie CP, ALICE étudiera la physique nucléaire et LHCf étudiera les particules produites «vers l'avant». Le LHC sera également utilisé pour accélérer des ions lourds comme le plomb (Pb) (avec une énergie de collision de 1150 TeV).

Un diagramme de Feynman montrant une voie possible de génération d'un boson de Higgs au LHC. Ici 2 quarks émettent des bosons W ou Z qui se combinent pour former un boson de Higgs neutre.
Un diagramme de Feynman montrant une voie possible de génération d'un boson de Higgs au LHC. Ici 2 quarks émettent des bosons W ou Z qui se combinent pour former un boson de Higgs neutre.

Les physiciens espèrent répondre à plusieurs questions à l’aide de ces détecteurs :

  • Le boson de Higgs, chaînon manquant au Modèle standard (physique) existe-t-il ? En existe-t-il plusieurs (Modèle Supersymétrique)?
  • Quelle est l’origine de la masse des particules ?
  • Pourquoi les différentes particules élémentaires ont-elles des masses différentes ? (C’est-à-dire, est-ce que les particules interagissent avec le Higgs ?)
  • A combien de décimales peut-on mesurer l'énergie et la masse des particules et notamment celle des quarks top et bottom ?
  • Nous savons qu'une énorme partie de l'énergie (masse) contenue dans l'univers n'est pas constituée de la matière telle que nous la connaissons. Qu'est-ce donc ? (de la matière noire, de l’énergie noire, de l'antimatière ?)
  • Est-il possible de produire des singularités?
  • Est-ce que la supersymétrie (ou plus précisément, les superpartenaires) existe(nt) ? Et si oui quel est le modèle supersymétrique qui décrit la Nature ? (aujourd'hui plusieurs modèles s'affrontent).
  • Existe-t-il d’autres dimensions cachées, comme le prédisent de nombreux modèles inspirés de la théorie des cordes, et si oui, peut-on les « voir » ?

Sommaire

[modifier] Historique

Le projet de construire un grand collisionneur de Hadrons a été officiellement approuvé en 1994, pour succéder et déloger le LEP. Le début de son fonctionnement était initialement prévu pour 1999 mais des retards multiples, techniques et financiers, l'ont repoussé successivement à la fin de l'année 2007 puis à la fin de l'été 2008. Les travaux pour la construction de son concurrent américain, le SSC (Super Conducting Super Collider), ou Desertron ont été stoppés en 1993 (par Bill Clinton).

Le coût du projet est actuellement de 6,3 milliards d'euros[1]. Tous les éléments de l'accélérateur et de ses expériences (détecteurs) sont en place fin 2007. Le retard pris pour la mise en route est maintenant lié à toutes sortes de petits incidents techniques qui nécessitent des vérifications constantes.

«Nous sommes toujours déterminés à commencer l’exploitation du LHC pour la physique à l’été 2008. Un projet aussi complexe a forcément des débuts difficiles, et le LHC n’échappe pas à la règle. Nous avons dû surmonter des difficultés causées par les triplets internes, les modules enfichables et de nombreuses fuites de vide. Les conséquences de ces incidents ont été beaucoup moins dramatiques en réalité que dans la perception qu’on en a parfois eue. Dans tous les cas, nous avons simplement réglé le problème et nous avons poursuivi le travail. Au point où en sont les choses aujourd’hui, nous comptons sur un démarrage au début de l’été [2008], mais il faut rester prudent. Jusqu’à ce que le LHC ait été refroidi dans sa totalité et que tous les circuits électriques aient été testés, le risque demeure d’un retard de deux ou trois mois au cas où un secteur devrait être remonté en température». [2] Le 29 février 2008, le dernier élément du détecteur Atlas était descendu dans sa caverne. La date officielle de l'inauguration est fixée au 21 octobre 2008.

[modifier] Caractéristiques techniques

Géométrie du tube accélérateur
Diamètre interne du tube, ouverture (300 K) 56 mm
Distance entre les axes d'ouverture (1.9 K) 194 mm
Faisceau à faisceau 3.6e
Normalized transverse emittance (r.m.s.) 3.75 μm
Total crossing angle 300 μrad
Séparation des faisceaux en arcs (1.9 K) 194 mm

Construit dans le tunnel de 3 mètres de diamètre et de 27 km de circonférence qui avait abrité le LEP (1989-2000), foré sous la plaine lémanique entre Genève et le Jura, passant sous le pays de Gex, à une profondeur moyenne de 100 mètres (entre 50 et 175 mètres), le LHC est d'abord un accélérateur-collisionneur circulaire de protons (protons contre protons : pp). Le dispositif utilise la technologie du synchrotron. Les 2 faisceaux de particules sont accélérés en sens inverse par le champ électrique à très haute fréquence des cavités accélératrices et des klystrons. Ils tournent dans 2 tubes jumelés où règne un ultravide, insérés dans un même système magnétique supraconducteur refroidi par de l'hélium liquide. Des aimants additionnels sont utilisés pour diriger les faisceaux aux 4 points d'intersection où des collisions permettront des interactions entre les particules.

[modifier] Les aimants supraconducteurs

1 746 électroaimants supraconducteurs, dont 1 232 aimants dipolaires de courbure sont répartis autour des deux anneaux accélérateurs lovés l'un dans l'autre. Des électroaimants quadripolaires assurent la focalisation des faisceaux de particules.

Les électroaimants de courbure mesurent 15 mètres de long, sont légèrement courbes, pèsent 34 tonnes chacun, engendrent un champ magnétique de 8,3 Tesla (83 000 Gauss) et permettent une déviation du faisceau de 0,6mm par mètre. Ils sont bobinés avec un câble métallique complexe fait de filaments de niobium-titane inséré dans du cuivre. Plusieurs milliers de filaments de 7 µm composent le câble. 7 000 km de câbles (1 200 tonnes) ont été fabriqués pour ces bobinages. La supraconductivité permet de maintenir un courant électrique de 12 000 ampères dans le câble (courant nominal). Le refroidissement cryogénique à 1,9K (-271,3°C) est réalisé par 94 tonnes d'hélium. Il faut 6 semaines de refroidissement pour amener les 40 000 tonnes du dispositif à 1,9K[3].

[modifier] Les injecteurs du LHC

Le système des préaccélérateurs, le collisionneur et les expériences au LHC. Les préaccélérateurs sont le PS (Proton Synchrotron) et le SPS (Super Protron Synchrotron). Le Proton Synchrotron Booster n'est pas représenté. Les accélérateurs linéaires permettent de choisir entre les protons et les ions lourds de plomb. Les 4 expériences principales sont représentées en jaune sur le collisionneur.
Le système des préaccélérateurs, le collisionneur et les expériences au LHC.
Les préaccélérateurs sont le PS (Proton Synchrotron) et le SPS (Super Protron Synchrotron). Le Proton Synchrotron Booster n'est pas représenté. Les accélérateurs linéaires permettent de choisir entre les protons et les ions lourds de plomb. Les 4 expériences principales sont représentées en jaune sur le collisionneur.

L'accélération se produit par étages (pré accélérateurs) comme au Tevatron. Le LHC recevra les particules d'une chaine existante comprenant un Linac (accélérateur linéaire à protons de 50 MeV) qui alimente un Booster (Proton Synchrotron Booster / PSB). Les protons sont ensuite injectés à 1,4 GeV dans le PS (Proton Synchrotron 26 GeV) puis dans le SPS (Super Synchrotron à Protons de 2 km de diamètre) pour une montée en énergie jusqu'à 450 GeV. Deux dispositifs, le LEIR (Low-Energy Injector Ring), anneau de stockage et de refroidissement des ions et l'AD (Antiproton Decelerator), générateur d'antiprotons à 2 GeV permettent d'obtenir des particules refroidies et décélérées.

[modifier] Les faisceaux de protons

Les faisceaux parcourent les 27 km (26658 mètres) de circonférence 10000 fois par seconde (chaque proton parcourt l'anneau en 90 µs). Ils sont formés chacun de 2835 paquets très denses de particules se suivant tous les 7,5 mètres (intervalle de 25 ns). Chaque paquet contient 1011 protons.

La puissance perdue par les particules est proportionnelle à la puissance quatrième du rapport entre l'énergie du faisceau et la masse des particules accélérées et inversement proportionnelle au rayon de l'accélérateur. Les protons étant 2000 fois plus lourds que les électrons, ils perdent 1013 fois moins d'énergie par tour que les électrons pour une énergie de faisceau donnée. Mais les protons sont des objets composites (partons), constitués de quarks et de gluons. Chaque collision proton-proton sera en fait une collision entre deux constituants appartenant à l'un et à l'autre proton. Les détecteurs observeront des collisions quark-quark, quark-gluon ou gluon-gluon.

Paramètres généraux du LHC
Energie de collision 7 TeV
Energie de l'injection 450 GeV
Dipole Champ magnétique à 7 TeV 8.33 T
Luminosité 1e cm-2s-1
Courant (proton) 0.56 A
Espace entre les bouffées 7.48 m

[modifier] Expériences

Le détecteur ATLAS en cours d'assemblage
Le détecteur ATLAS en cours d'assemblage
Expériences sur les faisceaux du LHC
Nom Point Description
ATLAS Point 1 Détecteur de particules par plusieurs couches concentriques de calorimètres.
ALICE Point 2 Détecteur d'interactions entre ions lourds
CMS Point 5 Spectromètre compact de muons
LHCb Point 8 Mesures des asymétries entre matière et antimatière
TOTEM Point 5 «Télescope» mesurant la section efficace entre 2 protons à 14 TeV
LHCf Point 1 Etude des particules produites «vers l'avant»

[modifier] La physique étudiée par le LHC

La physique Terascale décrit les collisions des particules à hautes énergies à partir du TeV (1012 eV). Le LHC et le Tevatron sont des accélérateurs Terascale.

Les physiciens vont pousser le Modèle Standard : une des priorités est la recherche du Boson de Higgs dont la masse sera recherchée entre 115 GeV/c2 et 1 TeV/c2.

Des études tenteront d'aller au-delà du Modèle Standard : mettre en évidence des phénomènes physiques et des nouvelles particules, ainsi que la supersymétrie, si elle existe.

Des dimensions supplémentaires d'espace pourraient être mises en évidence.

Des mesures plus précises de la masse du boson W et du quark top permettraient de mieux circonscrire la masse théorique du boson de Higgs.

[modifier] Notes et références

  1. Actualité > Le collisionneur LHC dans la tourmente : retard important en perspective
  2. Robert Aymar, directeur général du CERN , Le Bulletin du CERN, n°51-52/2007 du 17-12-2007
  3. François Vannucci, ATLAS - Le nouveau défi des particules élémentaires, Ellipses Ed., 2007

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes

[modifier] Bibliographie récente

  • Patrick Janot , Des géants pour traquer l'infiniment petit , Pour La Science , n°361, novembre 2007, pp 98-104
  • La nouvelle conquête de l'infiniment petit , suites d'articles , Sciences et Avenir , n° 735 , mai 2008