Léon Bloy

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Léon Bloy, 1887
Léon Bloy, 1887

Léon Bloy (Périgueux, 11 juillet 1846 - Bourg-la-Reine, 3 novembre 1917) est un romancier et essayiste français.

Sommaire

[modifier] Biographie

Il est le deuxième des sept garçons de Jean-Baptiste Bloy, fonctionnaire franc-maçon des Ponts et Chaussées, et d'Anne-Marie Carreau, une ardente catholique.

Ses études au lycée de Périgueux sont médiocres : retiré de l'établissement en classe de 4e, il continue sa formation sous la direction de son père, qui l'oriente vers l'architecture. Bloy commence à rédiger un journal intime, s'essaie à la littérature en composant une tragédie, Lucrèce, et s'éloigne de la religion. En 1864, son père lui trouve un emploi à Paris. Il entre comme commis au bureau de l'architecte principal de la Compagnie ferroviaire d'Orléans. Médiocre employé, Bloy rêve de devenir peintre et s'inscrit à l'École des Beaux-Arts. Il écrit ses premiers articles, sans toutefois parvenir à les faire publier, et fréquente les milieux du socialisme révolutionnaire et de l'anticléricalisme.

En décembre 1868, il fait la rencontre de Jules Barbey d'Aurevilly, qui habite en face de chez lui, rue Rousselet. C'est l'occasion pour lui d'une profonde conversion intellectuelle, qui le ramène à la religion catholique et le rapproche des courants traditionalistes.

En 1870, il est incorporé dans le régiment des « Mobiles de la Dordogne », prend part aux opérations de l'Armée de la Loire et se fait remarquer par sa bravoure. Démobilisé, il rentre à Périgueux en avril 1871.

Il retourne à Paris en 1873 où, sur la recommandation de Barbey d'Aurevilly, il entre à « L'Univers », le grand quotidien catholique dirigé par Louis Veuillot. Très vite, en raison de son intransigeance religieuse et de sa violence, il se brouille avec Veuillot et quitte le journal dès juin 1874. Il est alors engagé comme copiste à la Direction de l'enregistrement, tout en étant le secrétaire bénévole de Barbey d'Aurevilly.

En 1875, il tente sans succès de faire publier son premier texte, La Méduse Astruc, en hommage à son protecteur, puis, sans plus de réussite, La Chevalière de la mort, étude poético-mystique sur Marie-Antoinette. Il se lie avec Paul Bourget et Jean Richepin, qu'il s'échinera à convertir sans succès, et obtient un emploi stable à la Compagnie des Chemins de Fer du Nord.

Sa vie bascule à nouveau en 1877. Il perd ses parents, effectue une retraite à la Grande Trappe de Soligny (première d'une série de vaines tentatives de vie monastique), et rencontre Anne-Marie Roulé, prostituée occasionnelle qu'il recueille et convertit en 1878. Rapidement, la passion que vivent Bloy et la jeune femme se meut en une aventure mystique, accompagnée de visions, de pressentiments apocalyptiques - et d'une misère absolue puisque Bloy a démissionné de son poste à la Compagnie des Chemins de Fer du Nord.

C'est dans ce contexte passablement exalté que Bloy rencontre l'abbé Tardif de Moidrey, qui l'initie à l'exégèse symbolique durant un séjour à La Salette, avant de mourir brusquement. L'écrivain dira plus tard de ce prêtre qu'il tenait de lui « le meilleur » de ce qu'il possédait intellectuellement, c'est-à-dire l'idée d'un « symbolisme universel » que Bloy allait appliquer à l'histoire, aux événements contemporains et à sa propre vie. Dès cette époque, il écrit Le Symbolisme de l'Apparition (posthume, 1925).

Début 1882, Anne-Marie commence à donner des signes de folie ; elle est finalement internée en juin à l'hôpital de Sainte-Anne. Bloy est atteint au plus profond de lui-même : « Je suis entré dans la vie littéraire (…) à la suite d'une catastrophe indicible qui m'avait précipité d'une existence purement contemplative », écrira-t-il plus tard.

De fait, c'est en février 1884 qu'il publie son premier ouvrage, Le Révélateur du Globe. L'ouvrage est consacré à Christophe Colomb, et Barbey d'Aurevilly signe sa préface. Suit en mai un recueil d'articles : Propos d'un entrepreneur de démolitions. Aucun des deux livres n'a le moindre succès. Parallèlement, Bloy se lie avec Huysmans puis avec Villiers de l'Isle-Adam, se brouille avec l'équipe de la revue Le Chat noir, à laquelle il collaborait depuis 1882, et entreprend la publication d'un pamphlet hebdomadaire, Le Pal, qui aura cinq numéros.

C'est à cette époque également qu'il entame la rédaction d'un premier roman largement autobiographique, Le Désespéré. Le drame vécu par les deux principaux protagonistes, Caïn Marchenoir et Véronique Cheminot, est en fait la transposition de celui de Bloy avec Anne-Marie, une relation où la sensualité est peu à peu effacée par le mysticisme. L'œuvre est achevée en 1886, mais l'éditeur craignant d'éventuels procès, sa publication n'a lieu qu'en janvier 1887, et sans grand écho.

Bloy commence néanmoins un nouveau roman, La Désespérée, première ébauche de La Femme Pauvre. Mais il doit s'interrompre et se consacrer, pour vivre, à une série d'articles pour les revues Gil Blas (décembre 1888-février 1889) et La Plume.

La mort de Barbey d'Aurevilly en avril 1889 puis celle de Villiers de l'Isle-Adam en août l'affectent profondément, tandis que son amitié avec Huysmans se fissure. Elle ne survivra pas à la publication de Là-Bas (1891) où Bloy se retrouve caricaturé. Les circonstances de la mort de Barbey d'Aurevilly lui vaudront de violentes attaques, en mai 1891, du journal La France sous la plume du Sâr Josephin Péladan et un procès de ce dernier à son encontre et à celle de Léon Deschamps rédacteur en chef de la revue La Plume. La quasi-totalité de la presse d'alors salue la condamnation du Sâr en octobre 1891[1].

Fin 1889, il rencontre Jeanne Molbech, fille d'un poète danois. La jeune femme se convertit au catholicisme en mars de l'année suivante, et Bloy l'épouse en mai. Le couple part pour le Danemark au début de 1891. Bloy se fait alors conférencier. Sa fille, Véronique naît en avril à Copenhague (suivront André en 1894, Pierre en 1895 et Madeleine en 1897). En septembre, la famille Bloy est de retour à Paris.

Bloy s'y fâche alors avec la plupart de ses anciens amis, et commence à tenir son journal intime. En 1892, il publie Le Salut par les Juifs, écrit en riposte à La France Juive de l'antisémite Édouard Drumont ; mais sa situation matérielle demeure précaire, et il doit déménager en banlieue, à Antony. Il reprend alors sa collaboration avec Gil Blas, d'abord pour une série de tableaux, anecdotes et récits militaires inspirés par son expérience de la guerre de 1870, puis pour une série de contes cruels. Les premiers formeront Sueur de Sang (1893) ; les seconds deviendront les Histoires désobligeantes (1894).

L'année 1895 est particulièrement douloureuse pour Bloy. Chassé de la rédaction du « Gil Blas » suite à une énième polémique et ainsi réduit à la misère, il perd ses deux fils André et Pierre tandis que sa femme tombe malade. Il reprend alors la rédaction de La Femme Pauvre. Le roman est finalement publié en 1897 : comme Le Désespéré, c'est une transposition autobiographique, et un échec commercial.

En 1898, il édite une la première partie de son Journal, sous le titre du Mendiant Ingrat, mais c'est encore un échec. Bloy quitte à nouveau la France pour le Danemark, où il réside de 1899 à 1900.

À son retour, il s'installe dans l'est parisien, à Lagny-sur-Marne, qu'il rebaptise « Cochons-sur-Marne ». Dès lors, sa vie se confond avec son œuvre, ponctuée par de nouveaux déménagements : à Montmartre en 1904, où il fait la connaissance du peintre Georges Rouault, se lie avec le couple Maritain et le compositeur Georges Auric, puis à Bourg-la-Reine en 1911.

Bloy continue la publication de son Journal : Mon Journal (1904) ; Quatre ans de captivité à Cochons-sur-Marne (1905) ; L'Invendable (1909) ; Le Vieux de la Montagne (1911) ; Le Pèlerin de l'Absolu (1914).

Il édite en recueil les articles qu'il a écrits depuis 1888, sous le titre Belluaires et Porchers (1905).

Il compose des essais qui sont à mi-chemin entre la méditation et le pamphlet, tels que Le Fils de Louis XVI (1900), Je m'accuse (1900) où la critique de Zola se mêle à des réflexions sur l'Affaire Dreyfus et la politique française, la première série de L'Exégèse des Lieux Communs (1902), inventaire où sont analysées une à une les expressions toutes faites par lesquelles s'exprime la bêtise bourgeoise, ou Les Dernières Colonnes de l'Eglise (1903), étude consacrée aux écrivains catholiques « installés » comme Coppée, Bourget ou Huysmans.

Il poursuit dans cette veine avec L'épopée byzantine (1906), Celle qui pleure (1908), sur l'apparition de la Vierge aux deux bergers de La Salette, Le Sang du Pauvre (1909), L'Âme de Napoléon (1912), et la deuxième série de L'Exégèse des Lieux Communs (1912).

Profondément marqué par l'éclatement de la Première Guerre mondiale, il écrit encore Jeanne d'Arc et l'Allemagne (1915), Au seuil de l'Apocalypse (1916), Les méditations d'un solitaire en 1916 et Dans les Ténèbres (posthume, 1918). Le 3 novembre 1917, il s'éteint à Bourg-la-Reine entouré des siens.

De son œuvre, on retient surtout la violence polémique, qui explique en grande partie son insuccès, mais qui donne à son style un éclat, une force et une drôlerie uniques. Pour autant, l'inspiration de Bloy est avant tout religieuse, marquée par la recherche d'un absolu caché au-delà des apparences historiques. Tout, selon Bloy, est symbole : reprenant le mot de Saint Paul, il ne cesse d'affirmer que « nous voyons toutes choses dans un miroir », et que c'est précisément la mission de l'écrivain que d'interroger ce « grand miroir aux énigmes ».

[modifier] Œuvres

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Voir sur Wikisource : Léon Bloy.

Romans :

Contes :

  • Sueur de sang (1893)
  • Histoires désobligeantes (1894)

Essais :

  • La Meduse-Astruc 1875, 17p. réédition Mercure de France, octobre 1902
  • Le Révélateur du globe, préface de Barbey d'Aurevilly, Paris, A.Sauton, 1884
  • Propos d'un entrepreneur de démolitions (1884)
  • Un brelan d'excommunié, éd. Savine (1889)
  • Christophe Colomb devant les taureaux (1890)
  • Le Salut par les Juifs, Paris A. Demay (1892)
  • La Chevalière de la mort (1896)
  • Je m'accuse (1899)
  • Le Fils de Louis XVI, Mercure de France (1900)
  • Exégèse des lieux communs (1902) réédition Rivages Poche
  • Belluaires et porchers (1905)
  • Celle qui pleure, Mercure de France (1908)
  • Les Funérailles du naturalisme, 1891, éd. Moderne Aux Belles lettres
  • L'Épopée byzantine et Gustave Schlumberger, (1906), éd. de la Nouvelle revue
  • Vie de Mélanie écrite par elle même (1912)
  • Le Sang du pauvre, Paris, Juvent (1909)
  • Sur la tombe de Huysmans, 1912, coll. des "Curiosités littéraires"
  • Le Symbolisme de l'apparition, Le mercier, (1925) (posthume)
  • Léon Bloy devant les cochons (1894)
  • Les dernière colonnes de l'Eglise (1903)
  • Celle qui pleure (1908)
  • L'Âme de Napoléon (1912)
  • Méditations dans les ténébres (1918)

Périodique :

  • Le Pal (5 numéros, ainsi qu'un sixième jamais publié, l'éditeur s'étant résigné devant le fiasco financier)

Journal :

  • Version remaniée par l'auteur à la publication :
    • Le Mendiant ingrat
    • Mon Journal
    • Quatre ans de captivité à Cochons-sur-Marne
    • L'Invendable
    • Le Vieux de la Montagne
    • Le Pèlerin de l'Absolu
    • Au seuil de l'Apocalypse
    • La Porte des Humbles

La plupart des œuvres de Bloy sont aujourd'hui rééditées.

[modifier] Liens externes

[modifier] Notes et références

  1. "La Plume", pp.390-391, n°62, 15 novembre 1891.