Justice sociale

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Sommaire

[modifier] Concept

La justice sociale est un concept socio-économique qui, partant du principe que la société a des aspects injustes (ce qui laisse une certaine place a la subjectivité) demande que ces injustices soient corrigées.

La justice sociale peut se définir de manière négative : est injuste ce qui n'est pas acceptable socialement. Par exemple, les inégalités de salaires entre métiers de qualifications différentes sont le plus souvent considérées comme justes, parce qu'elles sont socialement acceptées par la majorité : il est très rare que soit revendiqué pour un ouvrier le salaire d'un cadre supérieur[1]. Il ne faut donc pas confondre justice sociale (ou équité) et égalité. La justice sociale est aussi une notion qui évolue dans le temps, ce qui est juste socialement peut devenir injuste si le contexte change.

C'est essentiellement une projection vers une société plus juste, ce n'est pas réellement une fin en soi, il y a toujours des injustices. On peut le voir soit comme une utopie, soit comme une démarche progressive. Les actions ayant pour objectif la justice sociale visent à donner à chacun les mêmes chances de réussite, on parle alors parfois d' « égalité des chances ». Les corrections nécessaires peuvent être sociales, financières ou culturelles.

Une partie de la dynamique altermondialiste utilise ce concept plutôt présent dans les discours de gauche.

L’ouvrage qui continue à faire référence aujourd’hui en matière de justice sociale est la Théorie de la justice (1971) de John Rawls (professeur de philosophie à Harvard, mort en 2002). Selon lui, la société est juste si elle respecte trois principes, dans l’ordre : 1) garantie des libertés de base pour tous ; 2) égalité « équitable » des chances ; 3) maintien des seules inégalités qui profitent aux plus défavorisés.

[modifier] Equité horizontale

Le concept d'équité horizontale stipule que deux personnes dans la même situation devraient avoir les mêmes droits et obligations. Il est donc proche du principe d'égalité : «à situation égale, prestations égales» et il s'oppose aux discriminations.

[modifier] Équité verticale

L'équité verticale cherche à réduire les écarts de niveau de vie entre les individus. Elle vise donc à ce que les plus riches contribuent d'avantage que les plus modestes.

En considérant l'utilité, c'est à dire le bien-être qu'auraient apporté les biens achetés grâce à l'argent tiré des revenus, Richard Musgrave distingue trois conceptions de de l'équité verticale[2]

  • sacrifice absolu égal (SAE). : même sacrifice d'utilité pour chacun.
  • le sacrifice proportionnel égal (SPE) : chacun doit sacrifier la même fraction de l'utilité totale qu'il aurait pu tirer de son revenu initial.
  • le sacrifice marginal égal (SME) : les impôts et prestations doivent êtres telles que l'utilité marginale des tous les revenus devienne égale après ces transferts.

[modifier] Religion

Le concept de justice sociale fait partie de la doctrine sociale de l'Église et a été abordé dans le cadre de plusieurs encycliques, dont Rerum Novarum, Quadragesimo Anno, Mater et Magistra et Centesimus Annus. Le mouvement de l'évangile social de Dorothy Day a œuvré en faveur des pauvres et des exclus.

[modifier] Critiques

Pour certains libéraux rien n'est plus équivoque que le terme de justice sociale. Hayek y voyait même un « mirage » (c'est le titre du tome II de son livre Droit, législation et liberté). Pour lui, parler de justice ici c'est considérer que des individus ont commis des torts au détriment d'autres individus et donc qu'il faut les réparer. Parler d'une répartition juste ou de justice sociale, c'est faire rentrer une notion qui n'a pas sa place. La justice consisterait pour lui à dire « à chacun selon ses efforts ». Donc une répartition a minima par l'Etat. Il oppose l'égalité en droit à la justice sociale, préférant la première à la seconde : « Il y a toute les différences du monde entre traiter les gens de manière égale et tenter de les rendre égaux. La première est une condition pour une société libre alors que la seconde n'est qu'une nouvelle forme de servitude. »

Hayek va plus loin, en considérant que la « justice sociale », en donnant à l'Etat les moyens de tout contrôler pour tout égaliser, débouche sur des conséquences extrêmement néfastes pour les individus. Ainsi, Hayek de déclarer dans Droit, législation et liberté (1976) : « C'est réellement le concept de justice sociale qui a servi de cheval de Troie à la pénétration du totalitarisme. »

Même si Hayek est aujourd’hui considéré comme la figure de proue du libéralisme, on peut noter que ses conclusions ne sont guère originales par rapport à celles que défendait l’économiste franco-suisse Léon Walras, un siècle plus tôt, de manière plus systématique. Pour cet auteur, en effet, l’autorité, exorbitante, de l'État ne saurait être justifiée que s’il traite tous les citoyens d’une manière absolument égale. D’où l’interdiction d’une assistance publique en faveur des pauvres, handicapés, etc. et le choix d’un impôt identique pour tous, la « capitation » qui fut instaurée en France à certaines époques sous l'Ancien Régime. Mais Walras n’était pas vraiment favorable à l’impôt, quel qu’il soit, car il affirmait que tout individu était seul propriétaire de ses facultés personnelles et de ce qu’il pouvait en tirer. L’impôt apparaissait donc à Walras comme une forme de spoliation et il préconisait que l'État se finance à partir de la rente foncière après que les terres aient été nationalisées. Il considérait en effet que les ressources naturelles, dont la terre, n’étant pas, par définition, produites par l’effort des hommes, elles appartiennent au patrimoine commun de l’humanité.

Plus récemment, l'intellectuel noir américain Thomas Sowell s'y est opposé, y voyant la marque de l'envie, camouflée par de la rhétorique, ce qu'il résume en : « Envie + rhétorique = justice sociale ».

[modifier] Citations sur la justice sociale

  • « Je n'ai jamais séparé la République des idées de justice sociale, sans laquelle elle n'est qu'un mot. » Jean Jaurès, 1887
  • « La justice sociale, c'est mettre tous les coureurs sur la même ligne de départ. Il ne faut pas la confondre avec l'égalitarisme, qui consiste à déclarer que tous sont arrivés premier. » Louis Pauwels

[modifier] Notes et références

  1. Le mot d’ordre « à travail inégal, salaire égal » existe cependant depuis les années 1970, et l’idée d’un salaire égal pour tous a émergé au XIXe siècle.
  2. Introduction aux finances publiques, chapitre 6 Université de Fribourg, année 2007/2008

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

[modifier] Articles connexes