Humus

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

L'humus est caractérisé par une couleur foncée qui traduit sa richesse en carbone organique.
L'humus est caractérisé par une couleur foncée qui traduit sa richesse en carbone organique.

L’humus, parfois nommé terre végétale, désigne la couche supérieure du sol créée et entretenue par la décomposition de la matière organique, essentiellement par l'action combinée des animaux, des bactéries et des champignons du sol. L’humus est une matière souple et aérée, qui absorbe et retient bien l'eau, de pH légèrement acide, d'aspect foncé (brunâtre à noir), à odeur caractéristique variant selon qu'il s'agisse d'un humus forestier, de prairie, ou de sol cultivé. L'humus est différent du compost. Dans le compartiment de la biosphère qu'est le sol, l'humus en est la partie biologiquement la plus active. Il est le plus présent en zone tempérée, mais on a récemment redécouvert et étudié une sorte d'humus ancien et d'origine humaine en Amazonie ; la terra preta. L'humus est absent des déserts.

La décomposition lente et naturelle d'un humus libère directement aux racines des plantes de l'azote, du phosphore et tous les éléments nutritifs indispensables à la croissance des végétaux. Si l'humus est enfoui par labour ou asphyxié (inondation durable, compression, bâchage étanche), il se dégrade ou meurt et libère rapidement dans l'eau interstitielle du sol son azote et une partie de ses éléments chimiques en se minéralisant et en perdant ses propriétés.

Avant que le microscope ne mette en évidence le fait que ce sont des micro-organismes et des invertébrés qui produisent l'humus, il était considéré comme une substance chimique inerte; le Dictionnaire Littré, de la langue française (1872-1877) le définit comme « terre végétale » et en donne la sous-définition suivante : « Terme de chimie. Matière brune peu soluble dans l'eau, soluble dans les alcalis, provenant de la décomposition et de la combustion lente des substances organiques dans le sol ou à sa surface ».

Des agronomes comme Claude Bourguignon ont alerté dès les années 1970 sur la perte et la dégradation des humus des zones agricoles labourées, dans le monde entier, avec comme conséquence une diminution progressive des rendements, même (et parfois surtout) en compensant ces pertes par des engrais chimiques, et une augmentation de l'érosion des sols.

Sommaire

[modifier] Étymologie

Le mot latin humus désignant la "terre" est cité par Curtius (Ier siècle ap. J.-C.) comme provenant d'un mot grec signifiant « à terre », locatif d'un substantif hors d'usage.

En réalité, le mot latin humus, comme d'ailleurs le mot homo "homme", provient de la racine indo-européenne *ghyom- qui signifiait terre (cf. J. Picoche 1994, p. 287).

[modifier] Formation des humus

La mise à nu des sols et le labour répété causent en quelques années une disparition de l'humus. Les sols noirs deviennent ocre, perdent leur capacité à retenir et infiltrer l'eau, et deviennent plus sensibles à l'érosion.
La mise à nu des sols et le labour répété causent en quelques années une disparition de l'humus. Les sols noirs deviennent ocre, perdent leur capacité à retenir et infiltrer l'eau, et deviennent plus sensibles à l'érosion.
Le labour et les engrais chimiques ne sont pas la seule cause de destruction de l'humus qui fixe les sols ; la déforestation et le surpâturage sur sols fragiles en sont d'autres. Sans protection végétale du sol, et sans apport de matière organique, l'érosion et l'appauvrissement de ce type de sol sont alors inévitables
Le labour et les engrais chimiques ne sont pas la seule cause de destruction de l'humus qui fixe les sols ; la déforestation et le surpâturage sur sols fragiles en sont d'autres. Sans protection végétale du sol, et sans apport de matière organique, l'érosion et l'appauvrissement de ce type de sol sont alors inévitables

Elle est dite « biogénique », c’est-à-dire que l'humus ne peut se former par simple oxydation de la nécromasse en l'absence d'organismes vivants.

La matière organique qui est à la base de l'humus est d'origine essentiellement végétale, puis fongique et animale lors du processus de transformation, alors que les composants du sol profond sont en grande partie d'origine minérale. La matière première de l'humus est la litière, à laquelle s'ajoutent des composants d'origine animale déposés sur l'horizon superficiel (nom donné à la surface du sol par les pédologues) ou remontés par les animaux fouisseurs, dont les vers de terre. Cette matière subit une évolution plus ou moins rapide (selon les conditions de température, d'humidité, d'acidité ou la présence d'inhibiteurs tels que certains métaux lourds ou toxiques) qui aboutit à sa transformation en matière minérale sous forme de colloïdes complexes électronégatifs, stables et insolubles.

La matière organique qui en se décomposant produit l'humus est constituée ;

  • de végétaux et pollens en décomposition,
  • d'excréments et exsudats (mucus, mucilages) de vers de terre et d'autres organismes animaux et/ou fongiques,
  • des cadavres animaux et de nombreux micro-organismes, champignons microscopiques et microbes,

Tous ces éléments sont sans cesse digérés, déplacés (bioturbation) et mobilisés par une communauté d'organismes dits détritivores ou saprophytes, dont bactéries, champignons, invertébrés et arthropodes. En zone froide ou continentale, la formation de l'humus est accélérée au printemps quand la température monte et que l'humidité est importante.

L'humus peut s'accumuler et évoluer très lentement sous climat froid, jusqu'à constituer un des éléments du puits de carbone, mais en climat chaud, il peut évoluer très rapidement, voire se minéraliser et disparaître quand il est exposé au soleil et que l'eau manque. Il est généralement absent des forêts tropicales pluvieuses, mais l'homme y a localement produit un équivalent de l'humus dit Terra preta.

L'humus constitue une réserve d'environ 2 à 12 cm de matière organique dans le sol, parfois plus. Il est utile pour l'agriculteur, le jardinier ou le forestier de connaître la quantité totale d'humus et sa qualité. Un des indices est le rapport C/N du sol. L'odeur et l'aspect visuel, ainsi que l'observation au microscope des organismes le composant renseignent sur sa qualité, ainsi, le cas échéant que des analyses de sa composition chimique.

On distingue de nombreuses composantes des humus et en particulier des colloïdes, les acides fulviques et les acides humiques, qui défavorisent de nombreux micro-organismes pathogènes des animaux et des plantes. Ce sont eux qui teintent l'eau d'une couleur "thé" dans certaines zones tropicales ou tempérées.

[modifier] Types d’humus

Sur les pentes, et dans de bonnes conditions, la couche d'humus dépasse rarement 30-40 cm. Elle est plus épaisse dans les vallées et les creux.
Sur les pentes, et dans de bonnes conditions, la couche d'humus dépasse rarement 30-40 cm. Elle est plus épaisse dans les vallées et les creux.

Selon que l'humus a été formé dans un sol aéré ou plutôt asphyxié (en raison par exemple d'une saturation totale en eau ou d'une compaction répétée), on peut classer les humus entre deux extrêmes.

Humus formés en aérobiose :

  • Le mull, avec une bonne incorporation de la matière organique et de la matière minérale réalisée principalement par les vers de terre, présent dans les forêts à activité biologique intense et les prairies. On ne trouve alors que des débris (feuilles mortes) de l'année précédente, et une fine couche de matière organo-minérale, l'épaisseur d'un humus de type mull varie de 2 à 4 cm, le sol est riche en élément nutritif, l'horizon organo-minéral est brun. La minéralisation s'effectue rapidement sur une dizaine de cm (sol riche=vers de terre bon à savoir pour nos jardiniers) ;
  • Le moder, avec une couche superficielle de matière organique humifiée, non incorporée, présent dans les forêts et les landes à activité biologique moyenne. On y voit (à l'automne) les feuilles de l'année qui subissent une décomposition bactériennes, mais aussi les feuilles de l'année précédente partiellement décomposées, méconaissables, présence de champignons sous ses dernières ( de 4 à 8 cm) ;
  • Le mor, avec une couche superficielle de matière organique non ou peu humifié, présent dans les forêts et les landes à activité biologique faible, ce qui ralentit la vitesse de décomposition des éléments entraînant une acidification du sol dans son ensemble dus à la fermentation de la matière organique morte.

Pseudo-humus formés en anaérobiose :

[modifier] Complexe argilo-humique

Icône de détail Article détaillé : Complexe argilo-humique.

Les complexes argilo-humiques (ou CAH) sont constitué par l'association d'argile et d'humus, tous deux à l'état floculé suite au travail des micro-organismes du sol, et en particulier des vers de terre, qui grâce à un organe spécial de leur tube digestif peuvent lier ces molécules qui sont négativement polarisées par un ion à bipolarisation positive ; le calcium (Ca++). Il semble que les mucus de certains organismes puissent aussi jouer un rôle dans la constitution de ces complexes qui sont stables et insolubles et qui expliquent la résistance de l'humus à l'eau et à l'érosion et le maintien de sa structure et de son exceptionnelle capillarité.

Ces complexes peuvent de plus fixer des métaux lourds, éventuellement radioactifs, en limitant leur transfert aux plantes et à l'eau, à la chaîne alimentaire.

[modifier] Destruction de l’humus

Effets de l'érosion des sols.
Effets de l'érosion des sols.
Glacis.
Glacis.

Les apports de biocides, pesticides et engrais peuvent dégrader ou tuer les humus.

Le labour tue l'humus en l'enfouissant, causant une minéralisation trop rapide de la matière organique et des pertes de sol qui atteignent couramment 10 tonnes/an/hectare en zone tempérée et jusqu'à plusieurs centaines de tonnes en zone tropicale.

La disparition de l'humus se traduit aussi par un phénomène de glacis des sols labourés qui diminue fortement leur capacité à absorber l'eau. Celle-ci, polluée par les pesticides et des excès de nitrates (responsables du pullulement d'algues vertes visibles sur le sol) ruisselle en emportant les particules fines qui augmentent la turbidité des fleuves et rivières.

De nos jours, il existe de nombreuses méthodes permettant de produire des cultures sans détruire l'humus : Technique culturale simplifiée, utilisation du Bois raméal fragmenté, Agriculture naturelle, etc.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

  • Bernard Jabiol, Alain Brêthes, Jean-François Ponge, François Toutain, Jean-Jacques Brun, 2007. L'humus sous toutes ses formes. ENGREF, Nancy, 60 photographies, 64 p.
  • Barbié Olivier. Abrégé d'agriculture natruelle. (fr) Institut Technique d'Agriculture Naturelle, Houilles, 120 pp.
  • Sébastien Fontaine, Pascal Carrère, « Pourquoi le stockage du carbone est plus stable dans les couches profondes du sol », Biofutur (Mars 2008, p 54 à 56)

[modifier] Liens externes

Conférences filmées :