Gouvernance

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La gouvernance est une notion controversée. Le terme de gouvernance est en effet défini et entendu aujourd’hui de manière très diverse et parfois contradictoire. Cependant et malgré la multiplicité des applications du mot, il existe une dynamique commune dans l’usage de ce terme. Chez la plupart de ceux qui, au sein du secteur public comme au sein du secteur privé, emploient le terme de gouvernance, celui-ci désigne avant tout un mouvement de « décentrement » de la prise de décision, avec une multiplication des lieux et des acteurs impliqués dans cette décision. Il renvoie à la mise en place de nouveaux modes de régulation plus souples, fondés sur le partenariat entre différents acteurs.

On distingue deux grands types de gouvernance : la gouvernance d'entreprise pour le secteur privé et la gouvernance politique pour la pensée politique et administrative. En gouvernance politique, on parle de Gouvernance mondiale ou globale, de Gouvernance locale ou Gouvernance régionale en fonction des échelles de gouvernance abordées.

La gouvernance concerne en particulier :

  • les sociétés par actions, où les actionnaires ne doivent pas être simplement des pompes à apporter de l’argent.
  • les institutions publiques, telles que l'État, l'Union européenne, les collectivités locales, pour le respect des droits des citoyens,
  • les organismes sociaux pour le respect des cotisants et bénéficiaires,
  • et les associations pour le respect des membres.

Sommaire

[modifier] Origine du terme

[modifier] Étymologie

Ce terme a une origine grecque (kubernân). Il est passé en latin (gubernare). Il était employé en ancien français (art ou manière de gouverner) comme synonyme de gouvernement. Il est passé dans la langue anglaise au XIVe siècle (governance).

Le terme est tombé en désuétude en France, en partie parce qu’il était associé à l’Ancien Régime. Il est resté dans la langue anglaise. Il est revenu dans la langue française à partir des années 1990 par le biais du mot anglais « governance ».

[modifier] Généalogie

La notion de gouvernance n’est pas nouvelle. Né de la langue française et renvoyant, dans le langage politique du Moyen-âge, au terme de gouvernement qui le remplace progressivement, le mot disparait pendant des siècles avant de réapparaître dans un contexte très différent à partir des années 1970 : celui de l’entreprise, à travers l'expression de corporate governance (Gouvernance d'entreprise). C’est donc à partir du secteur privé que resurgit la notion, qui désigne un mode de gestion des firmes fondé sur une articulation entre le pouvoir des actionnaires et celui de la direction. Il s’agit alors de poser la question du type d’acteurs impliqués dans la prise de décision au sein de l’entreprise, et de leur mode d’interaction.

La pensée politique et administrative emprunte ensuite au management d’entreprise la notion de gouvernance en deux étapes.

La première étape correspond à la révolution libérale des années 1980, entraînant une nouvelle façon de penser le politique. Avec la remise en cause du rôle de l’état notamment dans les pays anglo-saxons, émerge une conception fonctionnelle de la gouvernance liée à la logique dite du New Public Management (management public). Cette logique repose sur une vision minimaliste de l’État selon laquelle celui ci-doit revenir à son "coeur de métier" en décentralisant sur d’autres acteurs les fonctions considérées comme non stratégiques, comme le font d’ailleurs à la même époque les grands groupes industriels confrontés à la mondialisation.

La deuxième étape est celle des années 1990, où émerge une réflexion plus profonde sur le rôle de l’État régulateur, en réaction à la vision, jugée techniciste, du New Public Management. Des auteurs comme Guy B.Peter, Donald j.Savoie, Pierre Calame ou encore Bernard Jouve insistent alors sur le fait que la crise de l’État ne connaît pas seulement une crise interne touchant à ses fonctions et à sa structure. Cette crise concerne davantage la capacité de l’État à asseoir sa légitimité ainsi qu’à formuler des politiques publiques en phase avec les besoins socio-économiques.

[modifier] Gouvernance politique

Dans les sociétés occidentales régies par la démocratie libérale, la gouvernance renvoie aux interactions entre l’État et la société, c’est-à-dire aux systèmes de coalition d’acteurs publics et privés. Ces démarches de coordination d’acteurs différenciés ont pour but de rendre l’action publique plus efficace et les sociétés plus facilement gouvernables. C’est pourquoi, la gouvernance a été abondamment utilisée par les théoriciens de l’action publique, les politologues et les sociologues.

La gouvernance est à la fois un moyen de signifier la légitimité du fonctionnement politique, les relations de l’administration avec le corps politique, et les rapports entre eux, la société et le monde économique.

C’est une théorie de la régulation sociale qui peut être déclinée à toutes les échelles de gouvernement. Ainsi on parle de gouvernance locale, de gouvernance urbaine, de gouvernance territoriale, de gouvernance européenne, et de gouvernance mondiale : c’est l’idée qu’il n’y a pas qu’un seul modèle de gouvernance mais des systèmes de gouvernance.

La science administrative anglo-saxonne l’assimile au management public (New Public Management), doctrine de gouvernement qui préconise le recours aux agences (c’est aussi le cas dans les pays scandinaves comme la Suède) ou à des autorités administratives indépendantes (AAI).

Les détracteurs de la « bonne gouvernance » dénoncent une idéologie du désengagement de l’État-Providence depuis le tournant néolibéral des années 1980. C’est pourquoi, certains chercheurs engagés voient en la gouvernance une théorie de la recomposition de l’État.

[modifier] Le système onusien

Il porte le concept de gouvernance de quatre manières au moins :

  • par sa conception de la paix comme construction permanente et non plus simple trêve ;
  • par une conception multilatérale de la démocratie, associant à égalité trois pôles :
    • « le monde dans sa totalité, les États et les individus, chacun des trois se trouvant sous le contrôle des deux autres » (69) ;
  • par sa situation à mi-chemin entre la démocratie et la puissance, entre un idéal égalitaire et universaliste et « un monde fait d’États souverains et inégaux, dont la légitimité repose sur un territoire et une population bien délimités » (82) ;
  • en faisant de la survie de l’humanité une question politique globale, notamment à travers trois considérations alarmantes: les nouvelles capacités de destruction massive, la perturbation des équilibres naturels par l’homme et, du fait de l’augmentation vertigineuse des circulations, la tendance à la pandémisation de toute épidémie.

[modifier] L’approche de la Banque mondiale

À partir de 1986, la Banque mondiale cherche à comprendre les causes de la plus ou moins grande réussite des plans d’ajustement structurel qu’elle met en œuvre.

  • Pour la Banque mondiale, la gouvernance recouvre les normes, traditions et institutions à travers lesquelles un pays exerce son autorité sur le bien commun. Le niveau de capital social d’un pays peut aider à la réussite des plans de développement économique comme au développement de la démocratie [1]
  • La bonne gouvernance recouvre aussi bien la capacité du gouvernement à gérer efficacement ses ressources, à mettre en œuvre des politiques pertinentes, que le respect des citoyens et de l’État pour les institutions, ainsi que l’existence d’un contrôle démocratique sur les agents chargés de l’autorité (Banque mondiale, 1999).

[modifier] L’approche de la commission européenne

La Commission européenne a fait inscrire sa propre notion de gouvernance dans le Livre blanc de la gouvernance européenne [2]. Ainsi, l’expression gouvernance européenne désigne les règles, les processus et les comportements qui influent sur l’exercice des pouvoirs au niveau européen, particulièrement du point de vue de l’ouverture, de la participation, de la responsabilité, de l’efficacité et de la cohérence. Ces cinq « principes de la bonne gouvernance » renforcent ceux de subsidiarité et de proportionnalité.

[modifier] Gouvernance de l’entreprise

Icône de détail Article détaillé : Gouvernance_d'entreprise.

Autre système de gouvernance, la gouvernance d'entreprise (ou de toute autre institution) est l’ensemble des organes et règles de décision, d’information (transparence) et de surveillance permettant aux ayants droit et partenaires d’une institution, de voir leurs intérêts respectés et leurs voix entendues dans le fonctionnement de celle-ci.

Directement décliné des principes de gouvernance d’entreprise, la gouvernance des technologies de l’information (IT Governance) est un dispositif visant à réguler et optimiser le management des systèmes d’information d’une organisation. Il s’inscrit dans la logique des gouvernances appliquées.

[modifier] Gouvernance stratégique

Imaginé et développé par Roméo Malenfant, Ph.D., le modèle de fonctionnement de la gouvernance stratégique propose des prémisses, des principes et des pratiques qui aideront les administrateurs à créer une saine culture d'entreprise. Il représente une voie solide et rassurante pour qui est à la recherche d’une forme de fonctionnement adéquat au sein d’une organisation. La gouvernance stratégique permet de bien limiter ce que doit faire un conseil d'administration et son directeur général. Quand on pense au mot stratégie de guerre, c’est un plan, une méthode, pour faire la guerre. Pour la gouvernance, ce modèle de fonctionnement permet d’élaborer un plan d’action dans lequel l’organisation va évoluer.

[modifier] Cadre analytique de la gouvernance

Icône de détail Article détaillé : Cadre_analytique_de_la_gouvernance.

Le cadre analytique de la gouvernance est une méthodologie destinée à comprendre des situations de "gouvernance", lorsque les processus collectifs déterminent des solutions à des problèmes de nature publique et produisent des normes ou des institution sociales.

[modifier] Gouvernance de l’internet

Icône de détail Article détaillé : Gouvernance d'internet.

Il faut entendre par « gouvernance de l’Internet » l’élaboration et l’application par les États, le secteur privé et la société civile, dans le cadre de leurs rôles respectifs, de principes, normes, règles, procédures de prise de décision et programmes communs propres à modeler l’évolution et l’utilisation de l’Internet.

Définition du Rapport du Groupe de travail sur la gouvernance de l’Internet

[modifier] Citations

« Le premier objectif de la gouvernance est d’apprendre à vivre ensemble et à gérer pacifiquement la maison commune ; d’y assurer les conditions de la survie, de la paix, de l'épanouissement et de l'équilibre entre l'humanité et la biosphère »
    — Pierre Calame

« La bonne gouvernance est le chemin le plus sûr pour en finir avec la pauvreté et soutenir le développement ((en) Good governance is the single most important way to end poverty and support development) »
    — Kofi Annan

[modifier] Notes et références de l'article

  1. (en) The Social Capital Foundation, Patrick Hunout.
  2. Le livre blanc sur le site de la commission Européenne

[modifier] Sources

[modifier] Sites web

[modifier] Ouvrages

  • CALAME Pierre, La Démocratie en miettes, éditions Charles Léopold mayer/ Éd. Descartes et Cie, 2003;
  • GAUDIN Jean-Pierre, Pourquoi la gouvernance ?, Paris : Presses de Sciences Po, « La bibliothèque du citoyen », 2002, 137 p.
  • HERMET Guy, KAZANCIGIL Ali, PRUD’HOMME Jean-François, La gouvernance : un concept et ses applications, Paris : Karthala, 2005, 228 p.
  • MOREAU DEFARGES Philippe, La Gouvernance, PUF collection Que sais-je?, 2003 ( réédition 2006);

[modifier] Ouvrages en anglais

  • BEVIR Mark (Ed), Encyclopedia of Governance, Thousand Oaks, CA: Sage, 2007, 2 vol., xxxviii-1028 p.
  • CAMPBELL Colin & PETERS B. Guy (Ed), Organizing Governance, Governing Organizations, Pittsburgh, Pa.: University of Pittsburgh Press, 1988, vii-388 p.
  • CORSON John J., Governance of Colleges and Universities, New York: McGraw-Hill, 1960, 209 p.
  • KJAER Anne Mette, Governance: Key Concepts, Cambridge, Polity Press, 2004, x-248 p.
  • KOOIMAN Jan, Governing as Governance, London: SAGE Publications, 2003, xi-249 p.
  • PIERRE Jon and PETERS B. Guy, Governance, Politics and the State, Basingstoke : Macmillan, 2000, viii-231 p.
  • PRENTICE Daniel D. and HOLLAND Peter R. (Ed), Contemporary Issues in Corporate Governance, Oxford: Oxford University Press, 1993, xx-226 p.
  • ROSENAU James N. and CZEMPIEL Ernst-Otto (Ed), Governance without Government: Order and Change in World Politics, Cambridge: Cambridge University Press, 1992, xii-311 p.
  • WILLIAMSON Oliver E., The Mechanisms of Governance, Oxford University Press, 1996, x-448 p.


[modifier] Articles


[modifier] Rapports institutionnels

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens internes

[modifier] Aspects liés aux institutions publiques

[modifier] Aspects sociologiques et économiques

[modifier] Formation

[modifier] Liens externes

wikt:

Voir « gouvernance » sur le Wiktionnaire.