Génocide

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Un génocide est l'extermination physique, intentionnelle, systématique et programmée d'un groupe ou d'une partie d'un groupe ethnique, national, religieux ou racial.

Sommaire

[modifier] Étymologie

Le terme génocide est un néologisme formé en 1944 par Raphael Lemkin, professeur de droit américain d'origine juive polonaise, à partir de la racine grecque genos, « naissance », « genre », « espèce », et du suffixe « cide », qui vient du terme latin caedere, « tuer », « massacrer ». Définissant ce mot hybride dans une étude publiée par la Fondation Carnegie pour la paix internationale (« Axis Rule in Occupied Europe ») comme le crime contre l'humanité perpétré par les nazis contre les peuples juif et tzigane durant la Seconde Guerre mondiale, il écrit : « De nouveaux concepts nécessitent de nouveaux mots. Par génocide, nous entendons la destruction d'une nation ou d'un groupe ethnique. » D'après Samantha Power, Lemkin a appuyé sa réflexion sur le procès de l'Arménien Soghomon Tehlirian, meurtrier du ministre de l'Intérieur turc Talaat Pacha, à Berlin en 1921[1].

Stricto sensu, la notion de race est dans l'espèce humaine une notion plutôt sociologique que génétique. Toutefois, fondée ou non, elle existe dans l'esprit des génocidaires. Leur crime est articulé autour de la notion d'une différenciation, d'une nature ou d'une autre, d'une population considérée par eux comme « indésirable » et de l'appartenance par la naissance à la population des personnes visées, à la différence des guerres idéologiques où les personnes ne sont visées que comme vecteurs supposés de leurs idées.

Selon le Dictionnaire historique de la langue française d'Alain Rey, le mot apparait en français en même temps que son apparition en anglais. D'abord employé à propos des nazis et de leur « solution finale » du problème juif, il se dit de la destruction méthodique d'un groupe ethnique, et par extension, vers 1970, de l'extermination d'un groupe en peu de temps.

[modifier] Définition

L'article 2 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide[2], adoptée par l'assemblée générale des Nations unies, le 9 décembre 1948, affirme :

«  Dans la présente Convention, le génocide s'entend de l'un quelconque des actes ci-après commis dans l'intention de détruire, ou tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel :
a) Meurtre de membres du groupe ;
b) Atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe ;
c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ;
d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;
e) Transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe.  »

Cette définition a été reprise dans l'article 6[3] du Statut de Rome (17 juillet 1998), l'acte fondateur de la Cour pénale internationale.

[modifier] Usage familier du mot génocide

La racine genos implique que l'on est tué pour ce que l'on est par la naissance. Le terme génocide passé dans le vocabulaire courant connaît une acception plus large représentant la gradation ultime dans l'échelle de gravité. Il est donc parfois utilisé pour qualifier des événements qui frappent par leur ampleur et leur horreur, sans considération de leur adéquation aux critères juridiques définissant le crime de génocide.

Cette définition plus large est utilisée par les médias et des historiens. Dans cette définition, un génocide est la volonté d'exterminer la totalité d'un groupe d'individus, sans préciser la qualification de ce groupe. Cette définition confond massacre de masse et génocide. Elle qualifie ainsi des massacres comme par exemple ceux perpétrés durant la Révolution cambodgienne du temps des Khmers Rouges.

On parle (à tort) de « génocide culturel » (i.e. ethnocide). Cette expression est un abus, ou une confusion, de langage. C'est le cas :

Bien des usages généralisés du mot génocide sont considérés comme une banalisation scandaleuse, parfois d'inspiration négationniste, de ce crime extrême par les associations de victimes de génocide, arméniens, juifs, ou rwandais.

Camp de concentration de Buchenwald, 24 avril 1945
Camp de concentration de Buchenwald, 24 avril 1945

[modifier] Le génocide politique ?

Une précédente définition du génocide, décidée lors de la première assemblée générale de l'ONU le 11 décembre 1946, intégrait la destruction d'un groupe politique, à côté des groupes raciaux, religieux et autres. Mais en 1948, le groupe politique disparait de la définition.

Selon Bernard Bruneteau, professeur d'histoire contemporaine, c'est l'URSS qui a fait retirer la référence au politique en raison de ce qu'elle pouvait se reprocher. Ce faisant le génocide quitte la catégorie des crimes contre l'humanité[4].

[modifier] Histoire

Le terme est apparu pour la première fois dans Axis Rule in Occupied Europe en 1944 (le mot est introduit au chapitre IX intitulé "Génocide") du juriste américain d'origine polonaise Raphaël Lemkin pour tenter de définir les crimes perpétrés par les nazis à l'encontre des peuples juif, slaves et tzigane durant la Seconde Guerre mondiale, ainsi que ceux commis par le gouvernement des Jeunes-Turcs de l'Empire ottoman à l'encontre des Arméniens pendant la Première Guerre mondiale, et les massacres d'Assyriens en Irak en 1933[5]. Il témoigne d'une double volonté de la part de la communauté internationale :

  • celle de punir un crime jusque-là inconnu dans le vocabulaire juridique pénal ;
  • celle de qualifier la destruction systématique du peuple juif par l'État hitlérien allemand.

[modifier] Reconnaissance juridique

Le génocide a été juridiquement redéfini dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, adoptée par l'assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1948. Ce document définit un génocide comme un ensemble d'actes « commis dans l'intention de détruire, tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux comme tel ».

La Charte de l'ONU et l'article 8 de la convention de Genève obligent la communauté internationale à intervenir pour « prévenir ou arrêter des actes de génocide ».

Aujourd'hui l'article 6 du statut de la Cour pénale internationale définit le crime de génocide.

Elle précise qu'il s'agit d'un crime se distinguant par :

  • l'intention d'extermination totale d'une population ;
  • la mise en œuvre systématique (donc planifiée) de cette volonté.

C'est souvent la contestation de l'un de ces éléments qui fait débat pour la reconnaissance officielle d'un crime en tant que génocide.

Il ressort de cette définition que, contrairement aux idées reçues, un génocide n'implique pas nécessairement un critère quantitatif. Ainsi on évalue à environ soixante million le nombre de morts pendant la seconde guerre mondiale. Parmi ceux-ci seuls les six millions de juifs, les Tziganes et d'autres minorités sont considérés comme victimes d'un génocide perpétrés par les nazis. À l'inverse, des massacres de masse ne constituent pas forcément un génocide. En pratique cependant, il apparaît que le critère quantitatif est un élément déterminant pour confirmer la volonté d'extermination, « tout ou en partie ».

[modifier] Les génocides internationalement reconnus

Rwanda Murambi victimes momifiées du génocide de 1994
Rwanda Murambi victimes momifiées du génocide de 1994

Seuls trois génocides ont été reconnus au plan juridique par des instances internationales dépendant de l'ONU :

  • le génocide arménien commis par l'Empire ottoman. Le caractère génocidaire des massacres du peuple arménien en 1915-1916 a été reconnu dans un rapport de l'ONU sur la question de la prévention et de la répression du crime de génocide établi par la Commission des Droits de l'Homme - Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités - lors de la 38e session du Conseil Economique et Social de l'ONU[6]. Ce rapport, connu du nom de son rapporteur Benjamin Whitaker, a été approuvé par la Commission des Droits de l'Homme de l'ONU le 29 août 1985 [7]
  • le génocide des Juifs et des Tsiganes commis par les nazis en Allemagne, en Pologne et en France (en Alsace à Struthof) a été reconnu par la cour de Nuremberg créée par le Royaume-Uni, la France, l'URSS et les États-Unis en 1945, en même temps que l'on créait l'ONU. On peut dire que ce génocide a servi de référence pour définir ce qu'est un crime de génocide.
  • le génocide des Tutsis au Rwanda, commis par les milices hutues extrémistes créées par le régime Habyarimana, a été reconnu par l'ONU, dans le rapport de sa Commission des Droits de l'Homme le 28 juin 1994, puis lors de la création du Tribunal pénal international pour le Rwanda (résolution 955 adoptée par le Conseil de sécurité le 8 novembre 1994 [8]. Cette résolution confirme la résolution 935 [9] de la même année).
Victimes du génocide au Rwanda
Victimes du génocide au Rwanda

Cela ne signifie pas pour autant que d'autres massacres de l'Histoire ne seront pas un jour qualifiés officiellement de génocide.

Le terme de génocide ne s'applique qu'à des crimes ordonnés par un gouvernement ou un pouvoir de fait. Ce pouvoir dispose en général des moyens nécessaires pour légaliser ses actes après coup, ce qui justifie le recours à une législation internationale d'exception. Les massacres commis par des bandes ou organisations illégales relèvent de la justice nationale ordinaire, sauf s'il est prouvé que ces bandes ont été organisées et soutenues par le pouvoir en place.

Par ailleurs un problème de principe est soulevé en matière juridique : en principe, nulle loi ne doit avoir de portée rétroactive (car ce serait un précédent ouvrant la porte à des arbitraires futurs) : on ne saurait classifier un crime dans une catégorie qui au moment où il a été perpétré n'existait pas. Cela n'implique pas que ces crimes doivent rester impunis, mais c'est en principe dans le cadre existant à leur époque (donc homicide) qu'il conviendrait de juger ceux antérieurs à la création du terme. Afin de contourner ce problème théorique, le Tribunal de Nuremberg a considéré que l'interdiction du crime de génocide revêtait un caractère coutumier, et qu'elle était donc préexistante à la définition juridique du crime de génocide.

  • Aux génocides reconnus par l'ONU s'ajoute celui de la déportation du peuple Tchétchènes en 1944 ordonné par Joseph Staline et reconnu comme tel par le Parlement européen le 26 février 2004 [11]. Il existe également des génocides juridiquement reconnus par des gouvernements (par exemple depuis 2004 la Roumanie reconnaît le génocide de deux millions de personnes par son propre gouvernement dans la période 1946-1989[12], et depuis 2006 l'Ukraine reconnaît le Holodomor), mais de tels génocides ne peuvent pas être reconnus par la communauté internationale car leur critère de discrimination n'était ni ethnique, ni national, ni religieux ni racial, mais professionnel et social, or ce critère n'entre pas dans la définition initiée par le procès de Nuremberg.

[modifier] Les tribunaux compétents

Depuis la Seconde Guerre mondiale, plusieurs tribunaux furent créés afin de juger les génocides. Certains ont été créés de toutes pièces (comme le Tribunal de Nuremberg et le Tribunal de Tokyo), alors que d'autres ont compétence pour tous les génocides pouvant être perpétrés dans le monde.

[modifier] Les tribunaux ad hoc

C'est à la fin de la Seconde guerre mondiale, époque à laquelle le concept légal de génocide a été défini que des tribunaux ont commencé à juger les crimes de génocide et les autres crimes graves commis durant des conflits armés.

Il a existé plusieurs tribunaux qui ont été créés de toutes pièces pour juger certains crimes de génocides :

[modifier] Les tribunaux nationaux et la notion de « compétence universelle »

Les pouvoirs législatifs nationaux adaptent dans leurs législations propres les dispositions du droit international.

Des procès, relevant de cette compétence dite « universelle » ont eu lieu en Belgique, en Suisse et au Canada pour des crimes relevant du génocide au Rwanda.

En France ces dispositions concernant le génocide sont traitées dans l'article Génocide en droit pénal français. Des lois, appelées « dispositions non codifiées relatives aux violations graves du droit international humanitaire », donnent compétence aux tribunaux français de juger aussi des crimes de génocide commis dans d'autres pays dans certaines circonstances. Des instructions sont en cours contre des ressortissants rwandais accueillis en France, et des plaintes déposées contre X (des militaires français) par des Rwandais vivants au Rwanda sont à l'étude au tribunal aux armées à Paris à la suite de deux décisions de la cour d'appel de Paris en mai et juillet 2006 [13].

[modifier] La Cour pénale internationale

Icône de détail Article détaillé : Cour pénale internationale.

Les génocides qui ont été commis durant le XXe siècle ont petit à petit poussé les gouvernements et surtout les organisations non gouvernementales à réfléchir sur la mise en place d'une structure judiciaire permanente chargée de juger de tels crimes. C'est ainsi qu'est née la Cour pénale internationale (CPI).

L'une des particularités de cette Cour est qu'elle ne se substitue en aucune manière aux tribunaux nationaux, ce qui n'est pas le cas des tribunaux ad hoc. La CPI n'intervient que lorsque les tribunaux nationaux ne sont pas en mesure de juger les crimes pour lesquels elle est compétente, à partir du 1er juillet 2002, date d'entrée en vigueur du statut de la CPI.

[modifier] Les massacres dont le caractère génocidaire est discuté

Plusieurs massacres ou/et déportations sont actuellement considérés par certains comme des génocides :

  • La Colonisation des Amériques par les populations européennes a entraîné la destruction quasi-totale de plusieurs peuples d'Amérique du Sud et réduit d'environ 35 millions à moins de 2 millions de personnes la population amérindienne d'Amérique du Nord entre 1500 et aujourd'hui[14].
  • Conquête de l'Algérie: Selon Olivier Le Cour Grandmaison [15], la Conquête de l'Algérie s'est traduite par l'extermination du tiers de la population, soit près d' 1 million de morts, dont les causes sont multiples, massacres, déportations, famines ou encore épidémies, mais étroitement liées entre elles. Ce qui interdit de tenir les deux dernières pour des phénomènes naturels sans rapport avec la pacification meurtrière de ce territoire et témoigne de la dimension exterminatrice de l'entreprise.
  • Sous la Terreur, les massacres commis par les républicains, en particulier les colonnes infernales, pendant la guerre de Vendée en France, en 1793 et 1794, ont amené Gracchus Babeuf à parler de populicide. Dans les années 1980, ce terme a été assimilé par l'historien Reynald Secher à celui de génocide. En février 2007, une proposition de loi visant à la « reconnaissance du génocide vendéen » a été déposée à l'Assemblée nationale par neuf députés de droite[16] ; elle s'appuie sur les travaux de cet historien et ceux de l'écrivain Michel Ragon. Cependant, le caractère "génocidaire" de ces massacres demeure discuté et n'a pas remporté l'adhésion des parlementaires français.
  • La "Holodomor" (grande famine de la collectivisation) : plusieurs millions de Soviétiques, en particulier Ukrainiens, morts lors de la collectivisation et de ses réquisitions dans la région des Terres Noires (à cheval sur l'Ukraine et la Russie actuelles). Le 28 novembre 2006[18] le parlement ukrainien a voté la qualification de génocide pour cette grande famine.
  • Les massacres du Kampuchéa démocratique (Cambodge)appelé également génocide khmer et reconnu par la majorité des historiens universitaires : entre 1975 et 1979 Pol Pot et les Khmers rouges ordonnent le massacre de leur propre peuple dans un but avoué « d'uniformisation » ethnique, religieux et idéologique. 1,7 million de Cambodgiens sont tués. Bien que ces massacres aient tous les aspects d'un génocide, l'ONU ne l'a pas officiellement reconnu comme tel. Des chambres extraordinaires actuellement en exercice, qui sont dirigées par la justice cambodgienne et auxquelles participent des experts internationaux, pourront établir le caractère génocidaire de ces massacres.
  • Les massacres des Kurdes par le dictateur Saddam Hussein entre 1988 et 1989 au cours de l'opération « Anfal ». 182 000 personnes ont péri durant cette opération[24]. En décembre 2005, une cour de La Haye a qualifié cette campagne de « génocide ». Le 24 juin 2007, le Tribunal pénal irakien a condamné Ali Hassan al Madjid, surnommé « Ali le chimique », et deux autres anciens hauts dignitaires du régime de Saddam Hussein, à la peine de mort par pendaison pour le génocide commis contre les Kurdes au cours de cette opération Anfal.
  • Le massacre de Khodjaly, perpétré par l'armée arménienne. En 1993, quatre résolutions (822, 853, 874 et 884) ont été prises par le Conseil de sécurité des Nations unies. Une seule, la résolution 874 dans son point 9, fait allusion à des violations du droit humanitaire internationale avec mise en garde « à toutes les parties », sans aucune autre précision. L'existence d'un génocide n'est donc pas envisagée.
  • Le massacre du Darfour au Soudan. Où en juillet 2004, le Congrès des États-Unis a voté à l'unanimité une résolution qualifiant les massacres des populations noires du Darfour (Soudan) de génocide. En septembre 2004, le secrétaire d'État américain a repris ce mot. Dans un communiqué de presse du 23 février 2005 le Conseil de sécurité des Nations unies déclare : « “Le gouvernement soudanais n'a pas été à même de mettre fin aux attaques des milices contre les civils ni de les désarmer”. La sentence tombe le 2 septembre de la bouche du Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan qui, nommé un mois plus tôt, revient d'une mission au Darfour. Le Conseil réagit. Il adopte, par 11 voix pour et 4 abstentions, la résolution 1564 dans laquelle il menace de prendre des mesures, telles que celles contenues dans l'article 41 de la Charte de l'ONU, à l'encontre notamment du secteur pétrolier, du Gouvernement du Soudan ou de certains de ses membres. Dans cette résolution, le Conseil charge aussi le Secrétaire général de créer une commission internationale pour déterminer si des actes de génocide ont eu lieu et pour en identifier les auteurs. » [25].

[modifier] Les massacres de masse dans l'histoire

Icône de détail Article détaillé : Liste des massacres.

Les massacres de peuples entiers non seulement ont déjà eu lieu dans le passé mais étaient choses courantes lors des guerres ou simplement des razzias.

On peut citer des exemples :

  • Le massacre des Cimbres par les Romains, vers -100
  • Le massacre des Helvètes par les Romains, à la bataille de Bibracte, en -58, lors de leur tentative de migration vers la Saintonge.
  • La conquête de la Dacie (Roumanie actuelle) par les Romains
  • Campagnes d'exterminations de Muhammad de Ghor en Inde à la fin du XIIe siècle.
  • Les guerres punitives des mongols de Gengis Khan et de ces descendants au XIIIe siècle (politique de la terreur).
  • Le massacre de millions de Chinois par les Mongols au XIIIe siècle, qui représente la plus grande extermination d'êtres humains de toute l'Histoire, en valeur relative, les estimations variant entre dix et quarante millions (dix-huit selon Kubilai Khan).
  • Le génocide des Tainos[26],[27] commis par les Européens durant la conquête de la région. Bartolomé de las Casas dans son livre Historia General de las Indias raconte qu'en 1508 il restait environ 60 000 Tainos sur l'île d'Hispaniola. En 1531, l'exploitation dans les mines d'or, les suicides et les maladies[26] avaient réduit ce nombre à 600, soit une diminution de 80 à 90 %[26].
  • La déportation des Acadiens par les Britanniques sous les ordres du gouverneur Charles Lawrence en 1755 ainsi que, parallèlement, le massacre de leurs alliés Hurons. Dépossédées de leurs terres, des familles ont été déportées dans des colonies britanniques, réduit au travail non rémunéré et, pour certains d'entre eux déportés, au Royaume-Uni.
  • Extermination des nomades Dzoungars de Dzoungarie par les Chinois (1756-1757) : 600 000 hommes égorgés
  • Le massacre des Tasmaniens, qui a été qualifiée de « génocide le plus parfait de l'histoire » par les Britanniques.
  • L'extermination des Beotuks à Terre-Neuve par les Britanniques (Terre-Neuve est devenu depuis une province du Canada).
  • En Australie, les Aborigènes, dont la population est estimée à 350 000 avant l'installation des britanniques, ont été décimés par les maladies infectieuses, les migrations forcées, à l'instar des Amérindiens. Certains historiens soutiennent qu'il s'agit d'un génocide. .
  • Au Canada, les enfants des indiens ont été envoyés, entre 1922 et 1984, dans des pensionnats (Écoles résidentielles) fondées par le gouvernement canadien, dirigées par des églises (catholiques ou protestantes) où étaient entretenues des conditions d'insalubrité, de violences de tout ordre comme la pédophilie ou encore d'expérimentations médicales (dans les dernières années, à partir de la Guerre froide), ce qui conduisit à une mortalité de presque 50 %, soit donc environ 50 000 décès d'enfants en ces quelques décennies (sur les 120 000 pensionnaires y ayant séjourné).
  • Le gouverneur anglais Jeffrey Amherst a fait distribuer aux Indiens Delaware en 1763 des couvertures infectées de petite vérole (Variole).
  • La disparition en quelques décennies des populations autochtones d'Amérique : on estime qu'avant l'arrivée des Européens, le Mexique central comptait 25 millions d'habitants. Il n'en restait plus qu'un million vers 1650[28].
  • Les premiers camps de concentration ont été expérimentés au cours de la guerre des Boers en Afrique du Sud par les Britanniques assistés des canadiens. Sur environ 120 000 internés, plus de 27 000 civils Afrikaners (10% de la population afrikaner des républiques boers) essentiellement des femmes, des vieillards et des enfants, près de 20 000 Noirs alliés à ces derniers, meurent dans ces camps, victimes des conditions de vie (alimentation insuffisante, absence d'hygiène et de soins) dénoncés à l'opinion internationale par Emily Hobhouse.
  • De 1942 à 1945, 10 millions de civils chinois ont été enrôlés de force par l'armée impériale japonaise pour effectuer des travaux forcés au Mandchoukouo sous la supervision de la Kôa-in. De ce nombre, 2,7 millions ont trouvé la mort lors de l'opération sankô sakusen menée par le général Yasuji Okamura [29].

[modifier] Débat sur la définition

Les massacres de masse et déportations dont les critères de discrimination ne sont ni ethniques, ni nationaux, ni religieux ni raciaux, ne peuvent pas être reconnus comme Génocides tant qu'une instance internationale ne décidera pas d'élargir cette définition. La majorité des historiens d'ailleurs, ne souhaitent pas un tel élargissement, afin de ne pas banaliser le terme de Génocide. Mais il est vrai que cela en exclut des massacres de masse comme, par exemple, la traite des noirs à motivation économique, ou les crimes des régimes de Staline, de Mao, de Pol Pot ou de Mengistu, commis sur des critères professionnels et sociaux, dont le nombre additionnel de victimes dépasse celui des victimes des génocides reconnus. Et de nombreux autres historiens pensent que cette discrimination négative banalise encore davantage les massacres de masse, que ne le ferait un élargissement officiel de la définition. Le débat en cours entre historiens a débordé dans le champ médiatique et politique, avec parfois des excès et des dérives.

[modifier] Notes et références

  1. Claire Mouradian, entretien avec Michèle Champenois et Simon Roger : « Un prototype des génocides du XXe siècle », dans Le Monde 2 no 61 du 16 avril 2005 (Demain, avoir un enfant sans grossesse), p 63
  2. Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, approuvée et soumise à la signature et à la ratification ou à l'adhésion par l'Assemblée générale dans sa résolution 260 A (III) du 9 décembre 1948, entrée en vigueur le 12 janvier 1951, conformément aux dispositions de l'article XIII
  3. Statut de Rome sur le site de l'ONU
  4. Bernard Bruneteau, Le Siècle des génocides, rapporté par herodote.net : [1]
  5. (en) source : [2]
  6. (en) ' ou sur le site des Nations Unies : http://documents.un.org/welcome.asp?language=F avec la cote E/CN.4/SUB.2/1985/6)
  7. (fr) Rapport du Sénat français sur la loi n° 2001-70 du 29 janvier 2001 relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915
  8. (fr) Résolution 955 du Conseil de sécurité de l'ONU du 8 novembre 1994
  9. (fr) Résolution 935 du Conseil de sécurité de l'ONU du 1er juillet 1994
  10. (en) Jugement de Radislav Krstić
  11. (en)Chechnya: European Parliament recognises the genocide of the Chechen People in 1944
  12. Gheorghe Boldur-Latescu, The communist genocid in Romania, ISBN-13: 978-1594542510
  13. Voir le suivi des plaintes des rwandais en France sur le site de la CEC.
  14. La population du continent latino-américain était évaluée à 50 millions en 1492 (25 millions dans l'empire aztèque, 12 millions dans l'empire inca), contre 8 millions en 1650. La diminution de la population amérindienne apparaît de manière sensible vers 1545 et s'accentue vers 1570, à cause, avant tout, des microbes véhiculés par les Européens. Le bétail, importé d'Europe, souillait l'eau consommée par les populations autochtones. La chute de la population suit le retrait, en 1572, des privilèges apostoliques aux Franciscains, qui avaient bâti des aqueducs et des fontaines publiques pour assurer l'accès à une eau saine. Voir Christian Duverger, « Espagnols-Indiens : le choc des civilisations », L'Histoire, n°322, juillet-août 2007.
  15. Coloniser Exterminer, de Olivier Le Cour Grandmaison aux éditions Fayard, 2005
  16. Proposition de loi n° 3754 déposée le 21 février 2007 à l'Assemblée nationale française. Voir également La proposition de loi sur "le génocide vendéen", une atteinte à la liberté du citoyen sur Révolution Française.net
  17. Le mot génocide est employé par François-Xavier Fauvelle-Aymar, Histoire de l'Afrique du Sud, Paris, Seuil, 2006, (ISBN 2020480034), p.343
  18. Hélène Despic-Popovic, « Kiev reconnaît la grande famine comme génocide »dans Libération du 29/11/2006, [lire en ligne]
  19. (en)Communiqué de presse de la CIJ de 1959
  20. Compte rendu de l'audition du mardi 17 octobre 2000, Audition du professeur Samdhong Rinpoche, Président du Parlement tibétain en exil
  21. La justice espagnole se déclare compétente pour statuer sur une plainte pour "génocide contre le peuple tibétain"
  22. Source List and Detailed Death Tolls for the Twentieth Century Hemoclysm, Historical Atlas of the Twentieth Century. Consulté le 2007-02-27
  23. en:Cultural Revolution
  24. « La justice irakienne rend son verdict sur le massacre des Kurdes en 1988 », dans Le Monde du 24-06-2007, Modèle:Lirene ligne
  25. (en) [3] [pdf]
  26. abc Christian Duverger, « Espagnols-indiens : le choc des civilisations », dans L'Histoire, n°322, juillet-août 2007, p.16
  27. Christian Duverger, « Espagnols-indiens : le choc des civilisations », dans L'Histoire, n°322, juillet-août 2007, p.21
  28. Fernand Braudel, Civilisation matérielle, économie et capitalisme, tome 3 : Le temps du monde, Paris, Armand Colin, LGF-Le Livre de Poche, (ISBN 2253064572), 1993, p.489
  29. (fr) L'opération "tue tout, vole tout, brûle tout"

[modifier] Bibliographie

  • Bernard Bruneteau, Le Siècle des génocides Armand Colin, 2004
  • Alisonn Des Forges, Aucun témoin ne doit survivre. Le génocide au Rwanda, Human Rights Watch/FIDH, Karthala, 1999.
  • Benjamin Sehene, Le Piège ethnique, Éditions Dagorno, Paris, 1999 ISBN 2910019543
  • Jacques Sémelin, Purifier et détruire. Usages politiques des massacres et génocides, Seuil, Paris, 2005
  • Yves Ternon, Les Arméniens, Histoire d'un génocide (Seuil, 1977, 1996)
  • Yves Ternon, Du négationnisme. Mémoire et tabou (Desclée de Brouwer, 1998)
  • Yves Ternon, L'État criminel (Seuil, 1995)
  • Yves Ternon, L'Innocence des victimes. Regard sur les génocides du XXe siècle (Desclée de Brouwer, 2001)
  • Louise-Marie Diop-Maes, Afrique Noire, démographie, sol et histoire : une analyse pluridisciplinaire et critique (Présence Africaine, 1997)
  • Joseph Ki-Zerbo Unesco (Comité scientifique international pour la rédaction d'une histoire générale de l'Afrique), Histoire générale de l'Afrique (Edicef / Hachette Livres, 1989)
  • Bibliographie sur le génocide au Rwanda

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens externes