Fluor
Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Le fluor est un élément chimique de la famille des halogènes de symbole F et de numéro atomique 9.
Aux conditions normales de température et de pression le fluor est présent sous forme de difluor F2 gaz diatomique jaune pâle et très toxique.
C’est l’élément chimique le plus réactif. Il possède la plus forte électronégativité.
Il provoque des brûlures au contact de la peau.
Sommaire |
[modifier] Histoire
Le fluor (du latin fluere'' signifiant flux ou fondant) est décrit par Georgius Agricola en 1530 sous sa forme de fluorine comme une substance utilisée pour promouvoir la fusion des métaux ou des minéraux[1].
En 1670, Georges Gore avait observé que la fluorine (CaF2, fluorure de calcium connu autrefois sous le nom d’émeraude de bohème), traitée par un acide, pouvait graver le verre ; Schwandhard utilisa cette propriété. Carl Scheele ainsi que d’autres chercheurs plus tardifs tel que Humphry Davy, Gay-Lussac, Antoine Lavoisier, et le baron Louis Jacques Thénard firent tous des expériences avec de l’acide fluorhydrique (solution de fluorure d’hydrogène HF dans l’eau). Certaines de ces expériences se terminèrent en tragédie en raison de la dangerosité de ce produit.
Cet élément ne put être isolé pendant de nombreuses années, car, à peine séparé, il attaque immédiatement les restes de son composé. Mendeleïev l’a placé dans son tableau en 1869, mais ce n’est qu’en 1886 qu’Henri Moissan, après 74 ans d’efforts continus, parvint à le préparer par électrolyse du fluorure de potassium dans du fluorure d’hydrogène, avec des électrodes en platine iridié, sous une tension de 50 volts. Le difluor pur apparaissait au pôle positif et le dihydrogène à la cathode. Henri Moissan dut mener cette expérience à basse température, car le fluorure d’hydrogène (HF) bout à 19 °C. Cette découverte lui valu le prix Nobel de Chimie en 1906.
La première production industrielle de difluor eut lieu lors de la fabrication de la bombe atomique, dans le cadre du projet Manhattan lors de la Seconde Guerre mondiale, où l’hexafluorure d'uranium UF6, qui est un composé moléculaire volatil, était utilisé pour séparer les différents isotopes de l’uranium par diffusion gazeuse. Ce procédé est d’ailleurs toujours mis en œuvre lors de la fabrication du combustible nucléaire utilisé dans les centrales nucléaires actuelles.
[modifier] Propriétés
Le difluor pur est un gaz jaune pâle corrosif : c’est un oxydant puissant. C’est le plus réactif et le plus électronégatif de tous les éléments et forme des composés avec la plupart des autres éléments, y compris les gaz nobles xénon et radon.
Même dans des conditions de basse température et sans lumière, le difluor réagit explosivement avec le dihydrogène, même en dessous de -250 °C lorsque le fluor est solide et l’hydrogène liquide ! Dans un jet de gaz difluor, le verre, les métaux, l’eau et d’autres substances brûlent avec une flamme lumineuse. Le fluor a une telle affinité pour la plupart des éléments, en particulier pour le silicium (Si), qu’il ne peut ni être préparé ni être conservé dans des récipients de verre (constitués principalement de silice SiO2).
En solution, le fluor forme des ions fluorure F−.
[modifier] Préparation
Le difluor, F2, est aujourd’hui encore produit industriellement grâce au procédé d’électrolyse introduit par Henri Moissan en 1886. Le bain électrolytique est constitué d’un mélange KF-2HF fondu à 90-100 °C environ. Le HF anhydre n’est pas conducteur car peu dissocié et c’est l’ajout de KHF2 qui permet la conduction ionique par un mécanisme complexe.
Lors de la réaction d’électrolyse, le difluor est produit sur une anode en carbone selon :
2 HF2- → F2(g) + 2 HF + 2 e-
A la cathode (en métal), du dihydrogène est produit :
4 HF + 2 e- → H2(g) + 2 HF2-
Dans la cellule d’électrolyse, le potentiel appliqué est compris entre 8 et 10 V, et la densité de courant est de l’ordre de 12 A∙dm-2. Le rendement en courant est bon (95 %), mais le rendement énergétique global n’est que de 30 %.
En 1986, à l’occasion du centième anniversaire de la découverte de la préparation électrochimique du fluor, Karl Christe a découvert une méthode originale et purement chimique de préparation en faisant réagir à 150 °C de l’acide fluorhydrique anhydre HF avec K2MnF6 et SbF5. La réaction est :
K2MnF6 + 2 SbF5 → 2 KSbF6 + MnF3 + 1/2 F2
Ce procédé est anecdotique car inexploitable industriellement.
[modifier] Utilisation
Le difluor est trop réactif pour une utilisation directe à l’état pur. Ses nombreux composés chimiques ont par contre une multitude d’applications. Quelques exemples :
- Le fluor entre dans la composition de matières plastiques à faible coefficient de friction tel le Teflon (ou polytétrafluoroéthylène (PTFE)) ;
- De nombreux gaz fluorés, comme par exemple le fréon, sont utilisés en tant que fluide frigorigène dans les systèmes de réfrigération et d’air conditionné. Les chlorofluorocarbones (CFC) ont cependant été bannis de ces applications à cause de leur contribution probable au trou de la couche d’ozone et à l’effet de serre ;
- L’acide fluorhydrique (HF) a la propriété unique de pouvoir dissoudre presque tous les oxydes inorganiques. Il est de fait utilisé pour attaquer le verre, pour éliminer les oxydes de surface du silicium dans l’industrie des semi-conducteurs, comme catalyseur des réactions d’alkylation de l’isobutane et du butène dans le raffinage du pétrole et pour éliminer des impuretés oxydées de l’acier inoxydable ;
- Dans le cycle du combustible nucléaire, l’hexafluorure d’uranium UF6 est utilisé pour séparer les différents isotopes de l’uranium par diffusion gazeuse. Il est produit dans un four à flamme par réaction chimique du difluor avec le tétrafluorure d’uranium UF4. Dans ce cadre, le difluor a été utilisé lors de l'élaboration de la bombe atomique, à l'occasion du Projet Manhattan ;
- La cryolithe, un minéral composé de fluorure de sodium et d’aluminium (Na3AlF6), est utilisée comme électrolyte dans la production d’aluminium par électrolyse ;
- Le fluor monoatomique est utilisé pour le « plasma ashing » dans la fabrication des semi-conducteurs ;
- Avec d’autres composés, le fluor est utilisé dans la fabrication de plus d’une centaine de composés fluorés commerciaux, tel que le plastique haute température ;
- L’isotope radioactif 18F du fluor, émetteur de positrons, est le noyau le plus utilisé dans la technique de tomographie à émission de positon (TEP – une nouvelle technique de visualisation médicale non invasive) de par sa demi-vie de 110 minutes, relativement longue ;
- Le fluorure de sodium a été utilisé comme insecticide, particulièrement contre les cafards ou comme dératiseur ;
- Des fluorures sont ajoutés au sel (42 % du sel vendu aux ménages français est iodé et fluoré[2]) et aux dentifrices, ou parfois dans certaines sources d’eau ou dans certains aliments pour lutter contre les caries dentaires. Cette utilisation est contestée par différentes associations et groupes de pressions de consommateurs dans le monde[3].
[modifier] Toxicité
Le fluor peut être toxique pour l’Homme :
- < 1 mg/jour : protège de la carie
- 2 mg/jour : risque de fluorose dentaire
- 10 à 40 mg/jour : fluorose du squelette
- 20 à 80 mg/jour : fluorose ankylosante
- 100 mg/jour : retard de croissance
- 125 mg/jour : altération rénale
- 200 à 500 mg/jour : dose létale
De jeunes enfants ayant avalé leur dentifrice en se brossant les dents sur une longue période, ou qui ont mangé du dentifrice présentent parfois des intoxications au fluor ; d’où l’intérêt de bien expliquer aux enfants qu’ils doivent recracher le dentifrice et pourquoi ils doivent le faire.
[modifier] Règlementation
Diverses normes et règlements existent, selon les pays et les usages de certains produits.
En France : La fluoration de l’eau est interdite, mais celle du sel est autorisée et encouragée. Celui-ci doit alors être étiqueté sel fluoré ou sel iodé et fluoré, ce qui signifie qu’il est supplémenté en fluor à raison de 250 mg/kg sous la forme de fluorure de potassium (par voie humide). Cette fluoration a été encouragée en 1985 par la Direction Générale de la Santé pour la prévention en masse des caries dans la population. Les emballages doivent alors aussi alerter le consommateur par la mention : « ne pas consommer si l’eau de boisson contient plus de 0,5 mg/litre de fluor ». Une réglementation impose depuis 1993 l’usage de sel fluoré dans les cantines scolaires.
[modifier] Voir aussi
[modifier] Liens externes
- (en) History of fluorine, fluoride, and fluoridation
- (en)/(fr) Environmental Health Criteria for Fluorides (EHC 227) publié en 2002 par l’OMS (Résumé et conclusions en français)
- (fr) Effets sur la santé des fluorures - un résumé pour non-spécialistes du rapport de l’OMS par GreenFacts
[modifier] Notes et références
- ↑ (en)The discovery of fluoride and fluorine
- ↑ Page sur le Fluor (par le Comité des Salines de France)
- ↑ Un front citoyen contre la fluoration de l’eau