Disque de Phaistos
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Technologies | ||
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Disque de Phaistos | 1850–1400 av. J.-C. | |
Xylographie | 200 ap. J.-C. | |
Typographie | 1450 | |
Taille-douce | années 1430 | |
Imprimerie | 1439 | |
Lithographe | 1796 | |
Impression offset | années 1800 | |
Chromolithographie | 1837 | |
Presse rotative | 1843 | |
Flexographie | années 1890 | |
Sérigraphie | 1907 | |
Sublimation | 1957 | |
Photocopieur | années 1960 | |
Tampographie | années 1960 | |
Imprimante laser | 1969 | |
Imprimante par matrice de points | 1970 | |
Imprimante thermique | ||
Jet d'encre | 1976 | |
Impression numérique | 1993 | |
Impression 3D | ||
Le disque de Phaistos est un disque d'argile couvert de hiéroglyphes imprimés à l'aide de tampons. Il date probablement du XVIIe siècle av. J.-C.. Son usage, sa signification et même son lieu de fabrication font l'objet d'âpres discussions, et il aurait été fabriqué dans une autre région que la Crète.
Le disque original est exposé au musée archéologique d'Héraklion en Crète, en Grèce.
Sommaire |
[modifier] Présentation
Le disque de Phaistos mesure 16 cm de diamètre et ne fait que 1,2 cm d'épaisseur. Il a été daté par la connaissance de la date de destruction du site où il a été retrouvé.
Les 242 signes, arrangés en 61 groupes, que comptent les 2 faces, sont des impressions de 45 signes différents. Arrangés en séquences de deux à sept symboles, ils présentent deux séquences identiques, probablement le nom d'un personnage, d'un lieu ou d'une titulature.
[modifier] Découverte
Le disque de Phaistos a été découvert dans le palais de Phaistos, en Crète, le 3 juillet 1908 par l'archéologue italien Luigi Pernier. Il a été trouvé dans une annexe du palais, sous 50 cm de gravas dans un sol quelque peu perturbé. Seule pièce intacte à cet endroit, on y a également trouvé une pièce d'argile gravée de caractères de type linéaire A.
[modifier] Authenticité
L'antiquité de cet objet est régulièrement mise en cause. Toutefois, la plupart des spécialistes considèrent ce document, découvert lors d'une fouille régulière par un archéologue professionnel, comme authentique.
[modifier] Unicité
La plupart des archéologues qui ne remettent pas en cause l'antiquité du disque estiment qu'il ne s'agit probablement pas d'une œuvre unique. Ils pensent que d'autres réalisations avec ces symboles ont existé ; en effet, les caractères ne sont pas dessinés mais ont été imprimés à l'aide de tampons, ce qui n'est pas un moyen économique de produire un seul disque.
Par deux fois, certains chercheurs ont pensé avoir découvert des objets avec des glyphes similaires :
- sur la hache d'Arkalochori, tout d'abord. Il s'avère que les signes qui y sont gravés ne présentent qu'une ressemblance superficielle avec ceux du disque ; de plus, il est aujourd'hui communément admis qu'ils ne s'agit que de symboles décoratifs et non d'une écriture.
- en 2002, en Ossétie un disque gravé de signes très proches de ceux de Phaistos, mais gravés à la main, aurait été découvert et a été décrit dans un article. Néanmoins, la disparition de l'objet, qui suivit de peu la publication de l'article, soulève de sérieux doutes sur son authenticité. Il est généralement admis, et ce jusqu'à son éventuelle réapparition, que l'on ne peut le considérer comme une preuve de la non-unicité du disque.
Ainsi, ce disque reste pour l'instant un hapax, ou unicum.
[modifier] Datation
Établir la datation d'un tel objet n'est pas simple. L'absence de matière organique interdit le recours à la datation au carbone 14. Deux techniques sont principalement utilisées. La première consiste à le mettre en relation avec des objets similaires datés de manière sûre ; c'est bien entendu impossible, puisque cet objet est unique. La seconde se base sur l'âge de la strate où a été découvert l'objet. Cela est ici difficile, car celle-ci a été partiellement bouleversée au cours des ans. À proximité du disque, cette strate, d'une couleur noirâtre, était toutefois intacte et les objets qu'elle contenait ont permis de la dater du XVIIe siècle av. J.-C. C'est cette date qui fut avancée par Luigi Pernier. Elle correspond donc à la date des objets qui se trouvaient à proximité du disque et dans la même couche noirâtre (tablette en Linéaire A et poteries datant du MMII au MMIIIb).
Cette hypothèse est toutefois contestée par certains à cause de l'absence de publication précise de la coupe stratigraphique et on avance parfois une autre date : le XIVe siècle av. J.-C. qui est la date de l'abandon du site de Phaistos.
Il existerait un moyen de trancher définitivement la question en datant le disque par thermoluminescence, mais ceci a été refusé jusqu'à présent par la direction du Musée d'Héraklion.
Si l'on accepte le caractère antique du disque, les deux dates mentionnées ci-dessus forment les bornes de la période où le disque a été enfoui dans la couche où il fut retrouvé.
[modifier] Inscriptions
[modifier] Sens de fabrication et sens de lecture
On a longtemps pensé que le disque se lisait de l'intérieur vers l'extérieur. En effet, il semblait difficile pour le scribe de tout faire rentrer de manière équilibrée sur la surface du disque s'il partait de l'extérieur : en commençant au centre, il pourrait rajouter de la glaise sur le pourtour s'il venait à manquer de place.
Néanmoins l'observation précise des symboles par John Chadwick a mis en évidence quelques chevauchements qui indiquent que le poinçonnage a eu lieu de l'extérieur vers l'intérieur. Cela réfute la justification de la thèse du sens de lecture précédemment acceptée. En outre, divers faits épigraphiques (corrections apportées au texte, orientation anormale de certains signes, irrégularités dans l'espacement, etc) démontrent que le scribe composait son texte au fur et à mesure qu'il l'imprimait, en alternant à chaque spire le tracé de la spirale et l'impression des signes.
[modifier] Signes
Le disque comporte 241 signes au total, dont 45 différents. Quantité de ces signes sont facilement identifiables comme objets courants. Pour 18 des groupes présents, un trait oblique a été écrit à la main sous son signe final (ou initial, selon le sens de la lecture). Leur signification n'est pas connue. Par ailleurs, le disque porte des marques de correction à plusieurs endroits.
Les signes ont été numérotés par Arthur Evans, de 01 à 45; cette numérotation étant une convention utilisée par la plupart des chercheurs. Certains signes rappellent des caractères du Linéaire A (Nahm, Timm). D'autres chercheurs (J. Best, S. Davis) trouvent des ressemblances avec les hiéroglyphes louvites, ou égyptiens (A. Cuny). De son côté, J. Faucounau a défendu dans ses livres sur le sujet la thèse d'une écriture particulière et éphémère, inspirée à un peuple proto-ionien établi dans une île du sud des Cyclades, par les hiéroglyphes d'Egypte.
Dans le tableau ci-dessous, les noms des signes sont en partie traduits depuis la version anglaise de cet article. Des différences peuvent donc exister avec les termes en usage dans la recherche francophone.
Numéro | Signe | Description | Fréquence | Remarques |
01 | «piéton» | 11 | ||
02 | « casque à crête » | 19 | symbole le plus fréquent, toujours en début/fin de mot | |
03 | « tête tatouée » (tête chauve de profil, avec un tatouage ou un bijou sur la joue) | 2 | ||
04 | « prisonnier » (personnage aux bras attachés) | 1 | ||
05 | « enfant » | 1 | ||
06 | « femme » (femme aux seins nus) | 4 | ||
07 | « casque » (ou sein) | 18 | ||
08 | « gant » (poing) | 5 | ||
09 | « tiare » | 2 | ||
10 | « flèche » | 4 | face A uniquement | |
11 | « arc » | 1 | ||
12 | « bouclier » | 17 | présent 12 fois dans le groupe 02-12; ressemble au qe du linéaire B et au TURPI louvite | |
13 | « bâton » | 6 | ||
14 | « seaux » | 2 | ||
15 | « pioche » | 1 | ||
16 | « scie » (couteau) | 2 | ||
17 | « couvercle » | 1 | ||
18 | « équerre » (de charpentier) | 12 | ressemble au 37 du linéaire A, au ti du linéaire B | |
19 | « raccord » | 3 | face A uniquement, ressemble au sa du linéaire B | |
20 | « triton » (ou dolium, amphore) | 2 | ||
21 | « peigne » | 2 | ||
22 | « fusion » | 5 | face B uniquement | |
23 | « colonne » (maillet à manche carré) | 11 | ressemble au 05 ou au 06 du linéaire A/B, au to ou au na du linéaire B | |
24 | « ruche » | 6 | ressemble au wa du linéaire B | |
25 | « barque » (rotation d'un quart de tour) | 7 | ||
26 | « corne » (de bœuf) | 6 | ||
27 | « peau » (d'un animal) | 15 | ||
28 | « patte de taureau » | 2 | ||
29 | « chat » (tête d'un félin) | 11 | ||
30 | « bélier » (tête d'un mouton à cornes) | 1 | ||
31 | « aigle » (oiseau en vol) | 5 | face A uniquement | |
32 | « colombe » (posée) | 3 | ||
33 | « poisson » | 6 | ||
34 | « abeille » (insecte) | 3 | ||
35 | « arbre » (ou plante) | 11 | ressemble au te en linéaire B | |
36 | « vigne » (ou rameau d'olivier) | 4 | face B uniquement; ressemble au ni du linéaire B (figuier) | |
37 | « papyrus » (plante à fleur en éventail) | 4 | ||
38 | « rosette » (fleur à huit pétales) | 4 | ||
39 | « lys » | 4 | ||
40 | « dos de bœuf » | 6 | ||
41 | « flûte » | 2 | ||
42 | « râpe » | 1 | ||
43 | « passoire » (triangle à trous) | 1 | ressemble au ta2 du linéaire B | |
44 | « petite hache » | 1 | ||
45 | « vague » (eau) | 6 | ressemble au ra2 du linéaire B |
Les fréquences ci-dessus sont, par ordre décroissant:
- 19-18-17-15-12-11-11-11-11-7-6-6-6-6-6-6-5-5-5-4-4-4-4-4-4-3-3-3-2-2-2-2-2-2-2-2-1-1-1-1-1-1-1-1-1
Les neuf hapax sont 04 (A5), 05 (B3), 11 (A13), 15 (B8), 17 (A24), 30 (B27), 42 (B9), 43 (B4), 44 (A7). Parmi les huit signes apparaissant en double, quatre (03, 21, 28, 41) n'apparaissent que sur la face A, trois (09, 16, 20) n'apparaissent que sur la face B, tandis qu'un seul (14) est présent des deux côtés.
[modifier] Texte
Les 61 groupes (« mots ») se répartissent comme suit : 31 sur la face A et 30 sur la face B (numérotés de A1 à A31 et de B1 à B30, de l'extérieur vers l'intérieur), ici écrits de la même manière : le « casque à crête » se trouvant en début de mot. Les mots les plus courts sont composés de deux symboles, le plus long en contient sept. Treize des mots se terminent par un trait oblique, ici représenté par une barre oblique (/). La transcription commence avec la ligne verticale de cinq points, fait un tour du disque dans le sens des aiguilles d'une montre (13 mots face A, 12 mots face B) avant de continuer en spirale vers le centre (18 mots sur chaque face).
Les symboles apparaissent ci-dessous dans une orientation gauche-droite. Les visages humains et animaux regardent ainsi dans le sens opposé à la lecture (comme pour les hiéroglyphes égyptiens ou louvites) :
Transcription numérique :
Face A :
- 02-12-13-01-18/ 24-40-12 29-45-07/ 29-29-34 02-12-04-40-33 27-45-07-12 27-44-08 02-12-06-18-? 31-26-35 02-12-41-19-35 01-41-40-07 02-12-32-23-38/ 39-11
- 02-27-25-10-23-18 28-01/ 02-12-31-26/ 02-12-27-27-35-37-21 33-23 02-12-31-26/ 02-27-25-10-23-18 28-01/ 02-12-31-26/ 02-12-27-14-32-18-27 06-18-17-19 31-26-12 02-12-13-01 23-19-35/ 10-03-38 02-12-27-27-35-37-21 13-01 10-03-38
Face B :
- 02-12-22-40-07 27-45-07-35 02-37-23-05/ 22-25-27 33-24-20-12 16-23-18-43/ 13-01-39-33 15-07-13-01-18 22-37-42-25 07-24-40-35 02-26-36-40 27-25-38-01
- 29-24-24-20-35 16-14-18 29-33-01 06-35-32-39-33 02-09-27-01 29-36-07-08/ 29-08-13 29-45-07/ 22-29-36-07-08/ 27-34-23-25 07-18-35 07-45-07/ 07-23-18-24 22-29-36-07-08/ 09-30-39-18-07 02-06-35-23-07 29-34-23-25 45-07/
Le « casque à crête » (02) n'apparaît qu'en début de mot, et dans 13 cas est suivi du « bouclier » (12). La séquence de trois mots 02-27-25-10-23-18 28-01/ 02-12-31-26/ apparaît deux fois (A14-16 et A20-22). 02-12-31-26/ apparaît également une troisième fois (A19). De plus, quatre mots apparaissent deux fois chacun: 02-12-27-27-35-37-21 (A17, A29), 10-03-38 (A28, A31), 22-29-36-07-08/ (B21, B26) et 29-45-07/ (A3, B20).
[modifier] Déchiffrement
Le nombre de signes et la taille des mots font penser à une écriture syllabique. Le texte ne semble pas contenir de nombres. Une suite de trois cases est répétée sur une face et trois cases identiques, ayant la même suite de signes, apparaissent dans le texte ; l'hypothèse qu'il s'agisse d'un nom propre ou de celui d'une divinité a été avancé, sans que d'autres éléments permettent d'invalider ou de corroborer cette hypothèse.
Diverses études détaillées ont par ailleurs été publiées, notamment celles de Louis Godart et d'Yves Duhoux, sans essai de déchiffrement, pour servir de référence (voir la bibliographie).
De très nombreux essais de déchiffrement ont été proposés depuis la découverte du disque en 1908, partant de diverses hypothèses. Le disque a été ainsi supposé originaire de Crète, des Cyclades, d'Anatolie, de Chypre, de Rhodes, d'Égypte, d'Afrique, de l'Inde, de Chine et même d'une Atlantide. Il a été lu de droite à gauche, de gauche à droite, et même dans les deux sens à la fois. Les divers déchiffrements proposés ont supposé qu'il était écrit en grec (opinion majoritaire), en hittite, en louvite, en basque, en ancien égyptien, en sumérien, en latin, en germanique, et dans divers dialectes sémitiques. En désespoir de cause, certains auteurs ont supposé qu'il s'agissait d'un calendrier, d'une partition de musique, d'un document astronomique, d'un objet astrologique, ou même d'un faux. La quasi-totalité de ces déchiffrements ne sont validés que par leur seul auteur.
Un grand nombre de savants pensent toutefois qu'un déchiffrement véritablement crédible ne pourra être atteint tant que le disque restera un hapax.
Cette opinion est contestée par l'un des « déchiffreurs », Jean Faucounau, lequel a abouti par une méthode statistique (dont le détail n'a pas été publié) à une solution déjà envisagée par l'un des premiers déchiffreurs, Florence Stawell. Cet auteur affirme que cette solution, dite « proto-ionienne », serait, contrairement à toutes les autres, appuyée par de très nombreuses preuves, dont les principales sont exposées dans son livre les Proto-Ioniens.
[modifier] Liste de quelques déchiffrements proposés
Ces déchiffrements sont classés par date :
- Florence Stawell, 1911 (interprétation par un dialecte grec ionien, écriture syllabique) ;
- Albert Cuny, 1914 (interprétation par l'ancien égyptien, écriture syllabico-idéographique) ;
- Pierre Edouard Aussant , Shény-ta 1969 . Médecine égyptienne en Crète minoenne à l'époque paleopalatiale. (Librairie orientaliste Geuthner, Paris).
- Paolo Ballotta, 1974 (écriture supposée idéographique) ;
- Leon Pomerance, 1976 (document astronomique) ;
- Vladimir Georgiev, 1976 (écriture syllabique, langue hittito-louvite) ;
- Peter Aleff, 1982 (jeu de l'oie ancien) ;
- Steven R. Fischer, 1988 (écriture syllabique, langue grecque) ;
- Harald Haarmann, 1990 (écriture supposée idéographique) ;
- Kjell Aartun, 1992 (écriture syllabique, langue sémitique) ;
- Derk Ohlenroth, 1996 (écriture alphabétique, langue grecque) ;
- Alan Butler, 1999 (calendrier à 366 jours) ;
- Jean Faucounau, 1999 (écriture syllabique, langue grecque) ;
- Friedhelm Will, 2000 (hypothèse d'une origine atlante) ;
- (en) Kevin et Keith Massey 2003 (écriture syllabique, langue grecque) ;
- (it)(en) Marco Corsini, 2006 (le disque aurait pour sujet l'« Apothéose de Rhadamanthe » 1348 av. J.-C. avec transcription en grec).
[modifier] Voir aussi
[modifier] Bibliographie
- L. Bonfante, J. Chadwick, B. F. Cook, W. V. Davies, J. F. Haley, J. T. Hooker et C. B. F. Walker, La Naissance des écritures, du cunéiforme à l'alphabet, Paris, 1994.
- Louis Godart, Le Disque de Phaistos : une énigme de l'histoire, Itanos, 1995.
- Yves Duhoux, Le Disque de Phaestos, Louvain, 1977.
- Jean Faucounau, Le Déchiffrement du disque de Phaistos : preuves et conséquences, L'Harmattan, Paris, 1999.
[modifier] Liens externes
- (en) Liste de nombreux essais de déchiffrements pris parmi les plus récents ;
- Le Disque de Phaistos : une énigme de l'Histoire : un résumé s'appuyant surtout sur l'ouvrage de L. Godart.