Affaire Omar Raddad

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L'affaire Omar Raddad est une série d'événements impliquant un jardinier marocain accusé du meurtre d'une de ses clientes, Ghislaine Marchal, une veuve financièrement aisée.

Le caractère très mystérieux et théâtral des lieux du crime et les rebondissements de l'enquête donneront lieu à l'un des procès les plus médiatisés de l'époque en France. Le roi du Maroc est également intervenu.

Sommaire

[modifier] Histoire

[modifier] Les protagonistes

  • La victime, Ghislaine Marchal, une veuve financièrement aisée. Elle vivait alors sur les hauteurs de Mougins dans sa villa La Chamade.
  • L'accusé, Omar Raddad, jardinier de Mme Marchal, âgé de moins de 30 ans au moment des faits.
  • Maître Jacques Vergès, l'avocat d'Omar Raddad.

[modifier] Le meurtre

Le dimanche 23 juin 1991, Ghislaine Marchal s'apprête à aller déjeuner chez des amis voisins.

À 11 h 48, elle termine une conversation téléphonique avec une de ses amies qui doit venir lui rendre visite le lendemain.

À 13 h 30, s'interrogeant sur son retard, ses voisins téléphonent sans succès à la villa.

Ce jour-là Omar Raddad avait changé son emploi du temps sans prévenir personne, sauf celle chez qui il était allé, Madame Pascal, dans une propriété voisine. Il a déclaré être rentré chez lui pour déjeuner, ce qui n'a pas été confirmé par les différents témoins.

[modifier] L'agonie

Lardée d'un coup de couteau par son agresseur au fond de la cave de sa villa, Ghislaine Marchal, pendant son agonie qui a duré près de vingt minutes, aurait commencé par écrire « Omar m’a tuer » (avec la faute de grammaire ; selon la défense, Ghislaine Marchal n'aurait jamais fait une telle faute de grammaire) sans prendre assez de sang sur son doigt. Puis elle aurait recommencé une nouvelle fois un peu plus loin sur une autre porte de la cave, jusqu’à tracer la deuxième phrase « Omar m’a t », inachevée parce qu’elle n’avait plus assez de force, désignant ainsi le coupable.

[modifier] Le procès

Inculpé d'homicide volontaire, Omar Raddad est écroué à Grasse le 27 juin 1991. Son procès s'ouvre en février 1994 devant les assises des Alpes-Maritimes. Maître Jacques Vergès adopte la ligne suivante:

  • Dans une mise en scène machiavélique, le véritable meurtrier aurait utilisé la main de Mme Marchal pour faire accuser le jardinier.
  • Christian Veilleux, le fils, n'a pas une bonne relation avec sa mère.
  • L'amant de la femme de ménage, un personnage connu sous le sobriquet de « Pierrot le Fou », mais les enquêteurs et surtout les deux graphologues estimaient (avec une probabilité de deux-tiers), que l'auteur du message était bien Mme Marchal, scellant ainsi le sort du jeune Marocain : dix-huit ans de réclusion criminelle.

On retiendra la phrase choc de Maître Vergès faisant référence à l'affaire Dreyfus face aux journalistes: "Il y a 100 ans on condamnait un officier car il avait le tort d'être juif, aujourd'hui on condamne un jardinier car il a le tort d'être maghrébin."

Quant à l'analyse génétique, elle n'avait pas été utilisée lors de la découverte du corps de Mme Marchal puisqu'en 1991, cette technique n'en était alors qu'à ses balbutiements.

Le dispositif de fermeture de la porte de la cave démontré par les gendarmes était composé d'un lit pliable, d'une barre en fer et de divers objets lourds. Dès l'arrivée des gendarmes, la porte était verrouillée par ces objets dans cette disposition : la barre était glissée sous la porte, le lit tenait la barre de l'intérieur, permettant à cette dernière de ne pas tomber et de ne pas verrouiller la porte de la cave. Les autres objets étaient placés derrière le lit. Ce dispositif montré par les gendarmes a été contesté par la défense. En effet, il était difficile à mettre en place, mais a néanmoins été utilisé comme preuve contre Omar Raddad à son procès.

Une autre preuve a semblé contestable : la phrase "Omar m'a tuer". Une faute importante que Mme Marchal n'aurait pas pu commettre. En effet, les papiers retrouvés par les gendarmes dans la villa, qui indiquaient les tâches à faire, ne comportaient aucune faute de grammaire.

Le témoignage des deux graphologues insistant sur le fait que les inscriptions ont bien été écrites par Ghislaine Marchal emporte la conviction des jurés même si nul n'ignore que la graphologie n'est pas une science exacte.

[modifier] Grâce

Le 10 mai 1996 le président Jacques Chirac accorde la grâce partielle à Omar Raddad réduisant sa peine de quatre ans et huit mois. Le décret sera signé le 23 mai. Omar Raddad est libéré le 4 septembre 1998. Il a eu un comportement irréprochable en détention, d'où l’avis favorable émis en février de cette année-là par le comité consultatif de libération conditionnelle. Omar Raddad retrouve la liberté mais aux yeux de la justice, il demeure coupable.

Omar Raddad, très affecté par cette condamnation, a fait 45 jours de grève de la faim et a tenté de mettre fin à ses jours en avalant des rasoirs.

[modifier] Les doutes

Le 2 février 2000, la Commission de révision des condamnations pénales ordonne de nouvelles investigations et notamment, une nouvelle expertise graphologique pour savoir si Mme Marchal est l'auteur des inscriptions "Omar m'a tuer". Deux experts sont nommés : Anne Bisotti et Françoise Ricci D'Arnoux. Le 31 octobre 2000 ces deux graphologues remettent un rapport de 150 pages dans lequel elles se disent incapables de certifier que la victime est bien l'auteur des inscriptions. Par contre le sang qui a permis la rédaction des messages est bien celui de Ghislaine Marchal.

Le 14 janvier 2001, la justice ordonne une nouvelle expertise sur un chevron de bois ayant servi à tuer Ghislaine Marchal.

Le 20 février 2001, l'ADN masculin retrouvé sur la porte de la chaufferie n'est pas celui d'Omar Raddad. Les experts ne peuvent préciser à qui appartient cette empreinte génétique, ni sa provenance.

Selon un témoin, Guy Moyrin, se présentant comme l'ancien chauffeur de Joseph Di Mambro, Mme Marchal aurait été membre de l'ordre du temple solaire depuis 1982[réf. nécessaire] et aurait souhaité quitter la secte. Il aurait conduit lui-même les assassins sur le lieu du crime.[1]

[modifier] Voir aussi

[modifier] Sources

  • Pascale Nivelle, « Homme de peine », 5 février 2003, Libération. Consulté le 9 octobre 2007

[modifier] Bibliographie

  • Françoise Bouzon-Thiam, Omar n'a pas tué : l'assassin a signé son crime, Naturellement, Paris, 1997, 337 p. (ISBN 2-911064-01-1)
  • Georges Cenci, Omar l'a tuée : vérité et manipulations d'opinio, L'Harmattan, 2002, 375 p. (ISBN 2-7475-2477-9)
  • Deloire, Christophe. Omar Raddad : contre-enquête pour la révision d'un procès manipulé. Paris : R. Castells, 1998, 216 p. ISBN 2-912587-39-5
  • Gauthier, Jean-Paul. Expertise en écritures : quel poids dans la balance ? : les affaires, Dreyfus, Villemin, Omar Raddad. Villeurbanne : Éd. Golias, 2000, 141 p. ISBN 2-911453-91-3
  • Livet, Ève. L'Affaire Omar : mensonges et vérités. Paris : Éd. la Découverte, 1999, 276 p. (Enquêtes). ISBN 2-7071-2928-3
  • Raddad, Omar. Pourquoi moi ? / avec la collab. de Sylvie Lotiron. Paris : Éd. du Seuil, 2003, 173 p. ISBN 2-02-051689-6
  • Rouart, Jean-Marie. Omar : la construction d'un coupable. Paris : de Fallois, 1994, 165 p. ISBN 2-87706-215-5. Nouv. éd. augm. Paris : de Fallois, 2001, 203 p. ISBN 2-87706-215-5
  • Vergès, Jacques. "Omar m'a tuer" : histoire d'un crime. Paris : M. Lafon, 1994, 237 p. ISBN 2-840980-32-0

[modifier] Notes et références de l'article

  1. Journal télévisé, France 3, Édition nationale, « Affaire Omar Raddad » sur INA, 5 janvier 2002. Consulté le 3 octobre 2007