Accords de Bretton Woods

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Harry Dexter White (à gauche) et John Maynard Keynes en 1946
Harry Dexter White (à gauche) et John Maynard Keynes en 1946

Les accords de Bretton Woods sont des accords économiques ayant dessiné les grandes lignes du système financier international de l'après-guerre. Leur objectif principal fut de mettre en place les bases de la politique monétaire mondiale et de favoriser la reconstruction et le développement économique des pays touchés par la Seconde Guerre mondiale.

Ils furent signés le 22 juillet 1944 au Mount Washington Hotel, à Bretton Woods aux États-Unis après trois semaines de débats entre 730 délégués représentant l’ensemble des 44 nations Alliées.

Le principal instigateur de ces accords a été John Maynard Keynes qui dirigeait la délégation britannique et Harry Dexter White, assistant au secrétaire au Trésor américain. La France y était représentée par Pierre Mendès France. Il y avait également un observateur soviétique.

Le plan Keynes fut ébauché dès 1941 et préparait un véritable système monétaire mondial (le bancor). La partie américaine, construite à partir de 1942, proposait plutôt de créer un fonds de stabilisation construit sur les dépôts des États membres et une banque de reconstruction pour l'après guerre.

Au final deux organismes ont vu le jour :

Un troisième organisme aurait du être créé et chargé du commerce international. Mais en l'absence d'accord, il ne verra le jour qu'en 1995 avec la création de l'Organisation mondiale du commerce après les cycles de négociations du General agreement on tariffs and trade (GATT).

Sommaire

[modifier] Contexte historique

[modifier] Crise de 1929

L’expérience de la Grande dépression, pendant laquelle les politiques de contrôle des changes et les barrières douanières excessives avaient mené au désastre économique, était encore fraîche dans les esprits des participants. Dans les années 1930, en effet, les politiques de contrôle des changes avaient handicapé le système des paiements internationaux sur lequel reposait le commerce international. De plus les politiques des différents gouvernements de l’époque, utilisant les dévaluations monétaires pour améliorer la compétitivité de leurs exportations en vue de réduire le déficit de leurs balances commerciales, accélérèrent les spirales déflationnistes et eurent pour conséquence une plongée des revenus nationaux, un rétrécissement de la consommation, un chômage de masse et un déclin global du commerce international. Les échanges commerciaux devinrent alors limités à des échanges entre zones ou pays utilisant la même monnaie (échanges entre pays et leurs colonies par exemple). Ceci eut pour effet d’entraver les flux financiers internationaux et de limiter les investissements. Même si à court terme ces politiques permirent d’augmenter les revenus des Etats qui les appliquèrent, elles se révélèrent catastrophiques à moyen et long terme.

[modifier] Montée de l’hégémonie américaine

La Seconde Guerre mondiale, qui fait rage depuis déjà 5 ans, a largement entamé les capitaux financiers et la main d'œuvre. Les pays européens, ayant le plus souffert de cette guerre, sont susceptibles de devenir des lieux de révolte et d'offrir un terreau au communisme. Les États-Unis décident d'organiser en 1944 une conférence dont le but est de créer un système monétaire capable de soutenir la reconstruction.

L’économie américaine sort de la guerre, confortée dans sa position d’économie la plus puissante au monde, avec une industrie en croissance rapide et ayant accumulé de nombreux capitaux. En effet les États-Unis n’avaient pas été touchés par les ravages de la guerre et au contraire le pays s’était enrichi et avait développé une industrie florissante en vendant des armes aux alliés et en leur prêtant des fonds. Ainsi la production industrielle de 1945 a doublé par rapport à ce qu’elle était juste avant la guerre. En comparaison, l’Europe et l’Extrême-Orient apparaissent ruinés militairement et économiquement.

Alors que la conférence de Bretton Woods se réunissait, les avantages relatifs de l’économie américaine apparaissaient évidents et prépondérants. Les États-Unis disposaient de la plus grande partie des capitaux mondiaux et ils étaient également premiers au niveau production manufacturière et exportations. En 1945 les États-Unis produisaient la moitié du charbon, les deux tiers du pétrole et plus de la moitié de l’électricité au niveau mondial. Ils étaient en mesure de produire de grandes quantités de bateaux, d’avions, de voitures, de produits chimiques, d’armes et d’autres produits manufacturiers. De plus 80% des réserves mondiales d’or étaient détenues par les américains et l’US Army. Étant donné cette situation, les États-Unis pouvaient espérer, plus que toute autre nation, profiter d’une libéralisation des échanges internationaux qui lui permettrait d’écouler ses produits sur le marché mondial et de s’y approvisionner librement en matières premières.

[modifier] Conséquences des Accords

Les décisions prises par les 44 États présents vont clairement à l'encontre des puissances de l'Axe : l'Allemagne et le Japon. L'Italie s'est déjà raliée aux alliés à ce moment.

La décision principale qui résulte de ces accords est l'abandon de l'étalon-or, adopté avant la première guerre mondiale, au profit de l'étalon change-or ou Gold Exchange Standard. Le nouveau système donne une place prépondérante au dollar, et les autres monnaies voient leur cours indexé sur lui. Les réserves des Banques Centrales doivent alors être constituées de devises et non plus d'or (En fait, il est théoriquement possible de gager une monnaie nationale sur l'or, mais seuls les États-Unis peuvent se le permettre. La tentative en ce sens de la Grande Bretagne a été un échec.).

Les architectes de Bretton Woods avaient pour but premier d’assurer la stabilité des taux de change. Cependant, le système de l’étalon-or reposant sur des taux figés n’apparaissait plus adapté aux exigences de l’économie moderne. De plus la production mondiale d’or ne permettait plus de faire face aux besoins liés au commerce et à l’investissement. Enfin une partie des réserves d’or mondiale étaient détenues par l’Union Soviétique qui ne participerait pas à un système capitaliste de régulation des changes. La monnaie britannique qui avait été utilisée avant guerre pour seconder l’or, ne pouvait plus remplir ce rôle du fait de l’état de l’économie britannique. Seul le dollar était une monnaie suffisamment forte pour satisfaire la demande internationale croissante en liquidités. La force de l’économie américaine, le taux fixe du dollar par rapport à l’or (35$ l’once) et le fait que ce taux soit garanti par le gouvernement américain rendaient le dollar aussi attractif que l’or. En réalité il était même plus attractif car il produisait des intérêts et était plus flexible d’utilisation que l’or.

Une critique formulée à l’encontre du système mis en place par ces accords porte sur le fait qu’aucun contrôle n’avait été instauré sur la quantité de dollars émis, ce qui permettait aux États-Unis de faire tourner la planche à billets et ainsi de s’enrichir sur le dos du reste du monde obligé de subir l’inflation résultante.

Les accords ont donné naissance à trois organismes internationaux :

Cependant, les États n'ont pu se mettre d'accord sur la définition exacte de ce dernier organisme. Ainsi, c'est une série d'accords qui est née de cette volonté de réguler le commerce : les accords du General agreement on tariffs and trade (GATT), formalisés en 1947 et modifiés par la suite sous forme de cycles. Au terme de l'Accord de Marrakech, le 1er janvier 1995, le GATT a été doté d'une personnalité morale officielle : l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

Alors que le GATT dépendait de l'Organisation des Nations unies (ONU), l'OMC elle, n'y est plus soumise puisqu'une partie de leurs objectifs respectifs sont en contradiction, ce qui permettra à l'OMC d'élaborer ses propres règles.

[modifier] La faillite du système

Dès le début, ces accords ont montré leur faiblesse. La mésentente à propos du commerce international a retardé de près de 50 ans la création de l'OMC. De même, le premier prêt accordé par la Banque mondiale à la France se révèle bien insuffisant aux yeux des libéraux français et est supplanté par le plan Marshall qui fournit alors une aide beaucoup plus efficace (malgré l'opposition des communistes).

Enfin, le Gold Exchange Standard ne put pas survivre aux diverses crises économiques qui ont secoué l'économie mondiale depuis les années 1950. Consacrant l'hégémonie du dollar, il fut l'objet de violentes critiques.

Dans L'or et la crise du dollar (1960), Robert Triffin note que le système de Bretton Woods induit que les États-Unis aient une balance des paiements déficitaire afin d'alimenter le monde en moyens de paiements internationaux. Toutefois, ce phénomène a un autre effet : il contribue à un affaiblissement progressif de la confiance des étrangers dans le dollar. Ainsi, les besoins importants de l'économie mondiale en une devise fiable, le dollar, contribuent paradoxalement à la perte de confiance en la fiabilité de cette monnaie. Robert Triffin croit voir dans ce paradoxe un dilemme insurmontable, connu comme le dilemme de Triffin, qui mène nécessairement à un effondrement du système et invite dès 1960 à une réforme du système monétaire international.

La convertibilité du dollar en or fut abandonnée le 15 août 1971 unilatéralement par les États-Unis. Après une période intermédiaire, où l'on tenta de maintenir tant bien que mal des parités fixes, le système des changes flottants fut mis en place le 19 mars 1973, ce qui fut entériné par les accords de la Jamaïque, en janvier 1976.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie